34% des foyers éligibles au RSA ne le demandent pas

Philippe Pottiée-Sperry
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Etude non-recours au RSA

Une étude de la Drees estime que les sommes non-versées du fait du non-recours au RSA atteindraient pas moins de 750 M€ par trimestre (3 Md€ par an). 16 % des femmes seules avec enfants éligibles à la prestation seraient en situation de non-recours au RSA contre 49 % des couples éligibles sans enfant.

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Selon une récente étude de la Drees*, pas moins d’un tiers (34%) des foyers éligibles ne recourent pas au RSA en moyenne chaque trimestre et un cinquième de façon durable trois trimestres consécutifs. Les chiffres datent de 2018 mais ils semblent être du même ordre aujourd’hui. Intéressant à souligner au regard du débat dans la campagne présidentielle sur la fraude aux prestations sociales et l’énergie de certains candidats à dénoncer le manque à gagner pour l'Etat ! A ce sujet, la Drees estime que les sommes non-versées du fait du non-recours au RSA atteindraient quelque 750 M€, par trimestre, soit un montant de 3 Md€ par an. 

Un risque accru de pauvreté et d’exclusion

Dans le détail, le montant de RSA auquel ces foyers pourraient prétendre s’élèverait à 330 € en moyenne par mois et par unité de consommation (en tenant compte de la composition familiale du foyer RSA), soit un montant proche de celui perçu en moyenne par les foyers bénéficiaires. 
L’étude de la Drees rappelle que la réduction du non-recours aux minima sociaux fait partie des priorités de la politique de lutte contre la pauvreté. Lorsque des personnes ne bénéficient pas de prestations auxquelles elles ont droit, « il existe un risque accru de pauvreté et d’exclusion, en particulier lorsque les prestations concernées sont destinées aux plus démunis », constate-t-elle. 

Non-recours fréquent chez les couples éligibles sans enfant

Autre constat : les foyers ne demandant pas le RSA sont plus limités parmi ceux bénéficiant déjà d’une autre prestation. Parmi les éligibles au RSA, 18 % des bénéficiaires d’aides au logement, 21 % de ceux percevant des prestations familiales et 16 % des allocataires de la prime d’activité n’y recourent pas, contre respectivement 57 %, 40 % et 39 % des non-bénéficiaires de ces prestations.
En revanche, le non-recours est plus important parmi les personnes en couple sans enfant, diplômées, jeunes, propriétaires, résidant dans des territoires ruraux ou en agglomération parisienne. Ainsi, 16 % des femmes seules avec enfants éligibles à la prestation seraient en situation de non-recours au RSA contre la moitié (49 %) des couples éligibles sans enfant. Il en va de même pour 15 % des locataires en HLM contre 33 % des locataires du parc privé et 61 % des propriétaires (y compris accédants). Un cinquième des foyers éligibles résidents dans une agglomération de taille moyenne n’y recourent pas contre presque la moitié dans les unités urbaines de moins de 5000 habitants ou dans celle de Paris.

Pas d’estimation sur la prime d’activité

La Drees remarque que ces résultats ont peu évolué par rapport à ceux mis en avant il y a dix ans par le Comité national d’évaluation du RSA, peu après la mise en place de la prestation : le non-recours au RSA socle avait alors été estimé à 36 %. Par ailleurs, l’étude ne parvient pas à estimer le non-recours à la prime d’activité, compte tenu de la non disponibilité aujourd’hui de données complémentaires sur les revenus mensuels d’activité. L’accès à un dispositif statistique plus complet sur les revenus fait encore l’objet d’investigations, constate-t-elle. Et d’ajouter que des travaux plus approfondis sont menés sur les déterminants du non-recours.

*Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) du ministère des Solidarités et de la Santé

Philippe Pottiée-Sperry
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