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Envolée inquiétante des dépenses sociales
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En 2020, la dépense nette d’action sociale départementale a fortement augmenté, de l’ordre de 1,6 Md€ par rapport à 2019 (soit +4,2%), passant de 38,6 à 40,2 Md€, selon l’étude annuelle de l’Odas (Observatoire national de l'action sociale) sur l’action sociale départementale. La participation financière de l’État reste stable par rapport à 2019 (+1,4%). La charge nette progresse de 1,5 Md€ en un an pour atteindre 31,8 Md€ (+5,1%). Ces augmentations de la dépense nette et de la charge nette sont deux fois plus importantes que l’année précédente, s’alarme l’Odas. L’explication réside bien sûr, en grande partie, sur les actions complémentaires mises en place par les départements pour faire face à la crise sanitaire.
+7% de dépenses pour le RSA
En pratique, les départements ont répondu très vite à l’afflux de demandes de RSA et d’aides financières. L’Odas constate que l’incidence financière des effets liés au Covid-19 ne sera pleinement constatée dans les comptes des départements qu’en 2022 et 2023. La dépense nette liée au RSA a augmenté en 2020 de 725 M€ (+7%) par rapport à 2019. Elle atteint dorénavant plus de 11 Md€, dont la charge est répartie à égalité entre les départements et l’État. Toutefois, l’État n’ayant pas augmenté sa contribution financière, la charge nette pour les départements a augmenté de +15% (+ 725 M€ en 2020). « C’est donc bien le RSA qui explique près de la moitié de la charge supplémentaire d’action sociale pour les départements en 2020 », souligne l’étude de l’Odas.
8,1 Md€ pour la protection de l’enfance
Pour sa part, la dépense nette d’aide sociale à l’enfance a augmenté de 3% par rapport à 2019, pour atteindre 8,1 Md€. Cet accroissement est surtout lié aux frais de placement en établissements, qui atteignent près de 5 Md€ (+4,5%). Le placement familial est quasi stable à 2,2 Md€. Les autres dépenses nettes n’augmentent pas non plus, à l’exception des aides financières, passées de 160 à 190 M€ (+18,7%) après plusieurs années de baisse ou de stabilité. Il s’agit d’un accroissement des secours d’urgence et des aides alimentaires, que les départements ont mis en place depuis le début de la crise sanitaire.
Personnes âgées et handicapées
La dépense nette d’action sociale départementale pour les personnes handicapées a augmenté de 2,7%. Cette hausse atteint 5,6% pour la PCH (prestation de compensation du handicap) alors que le nombre de bénéficiaires fin 2020 n’a augmenté que de 3,1% (+9000), pour avoisiner 300 000 personnes.
S’agissant des personnes âgées dépendantes, la hausse atteint 3,6%, soit 260 M€ supplémentaires. Compte tenu de l’augmentation de l’apport de la CNSA pour l’APA (allocation personnalisée d’autonomie), la charge nette n’a augmenté que de 2,8%, soit 140 M€. Par ailleurs, le coût du personnel départemental dédié à l’action sociale a augmenté de 3,9%. Cela s’explique notamment par l’octroi de primes et d’indemnités, ainsi que par les créations provisoires de postes liés à la pandémie (remplacements ou recours à des prestations extérieures).
Une hausse qui va se poursuivre
Au total, l’Odas souligne une forte progression de la dépense et de la charge d’action sociale en 2020, qui devrait se poursuivre et s’accroître en 2022 et 2023, « car les effets réels de la pandémie sur l’économie et leurs conséquences sociales ne seront visibles que dans les prochaines années ». Et d’estimer que, comme en 2020, « on devrait voir s’accroître le nombre de bénéficiaires du RSA, mais aussi le nombre d’enfants à protéger, car nombre de familles et d’enfants ont été fortement perturbés par les contraintes nées de la crise sanitaire ». À cela devra s’ajouter la prise en compte dans les budgets départementaux des déficits prévisibles des services et établissements sociaux et médico-sociaux.
« Le plus préoccupant est que face à cette forte augmentation des besoins, les départements risquent d’être moins bien outillés pour pouvoir y répondre », s’inquiète l’Odas. En effet, l’État ne pourra certainement pas accroître sa contribution au budget des collectivités, alors que les recettes autonomes des départements seront elles aussi nécessairement affectées par les effets de la crise sanitaire. « Il s’ouvre un cycle très préoccupant pour l’avenir de l’action sociale départementale », conclut, inquiète, l’Odas.
Philippe Pottiée-Sperry
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