Arrêts maladie des agents : les collectivités réclament plus de souplesse face à la baisse de l’indemnisation

Danièle Licata
Image
L’indemnisation des arrêts maladie des agents publics a été réduite de 100 % à 90 % pour les trois premiers mois d’absence

Depuis le 1er mars 2025, l’indemnisation des arrêts maladie des agents publics a été réduite de 100 % à 90 % pour les trois premiers mois d’absence. Une réforme qui divise et qui suscite une forte opposition, tant du côté des syndicats que des employeurs territoriaux. Ces derniers demandent davantage de flexibilité dans l’application de la mesure, estimant qu’elle pourrait nuire à l’attractivité de la fonction publique.

Partager sur

« Les économies ne peuvent pas se faire sur le dos des agents publics », s’indignent les organisations syndicales, tandis que les employeurs territoriaux réclament la possibilité de moduler cette réforme en fonction des réalités locales. La baisse de l’indemnisation des congés maladie, actée par l’article 189 de la loi de finances pour 2025 et mise en application par les décrets du 27 février, s’impose désormais aux trois versants de la fonction publique. Mais les collectivités, déjà confrontées à des tensions de recrutement et à une augmentation des arrêts maladie, dénoncent une mesure qui risque d’aggraver la situation.

Une indemnisation réduite, une réforme contestée

Jusqu’à présent, un agent en congé maladie ordinaire percevait l’intégralité de son traitement pendant trois mois, avant de passer à demi-traitement au-delà. Désormais, ce taux passe à 90 %, ce qui, selon les estimations syndicales, pourrait représenter une perte de plus de 200 euros pour un agent de catégorie C sur un arrêt de 20 jours.
Si cette réduction ne concerne ni les congés de longue maladie (CLM), ni les congés de longue durée (CLD), ni les arrêts pour accident du travail ou maladie professionnelle, elle n’en reste pas moins un coup dur pour les fonctionnaires. Pour les syndicats, dans un contexte de dégradation des conditions de travail et de pouvoir d’achat, " cette mesure envoie un signal négatif aux agents publics ".
Les employeurs territoriaux, eux aussi, expriment leurs réserves. Lors des réunions du Conseil commun de la fonction publique en février, la majorité des représentants des collectivités et des hôpitaux ont voté contre les décrets d’application, tandis que les employeurs de la fonction publique d’État ont soutenu la réforme.

Une réforme aux conséquences incertaines

Cette réforme s’inscrit dans une logique de réduction des dépenses publiques. Le gouvernement table sur une économie de 900 millions d’euros sur l’ensemble de la fonction publique, dont 300 millions pour les collectivités territoriales. « Cette mesure vise à lutter contre l’absentéisme et à responsabiliser les agents », défend le ministère la Fonction publique.
Pourtant, les élus locaux redoutent un effet inverse. « Nous risquons de voir une augmentation des arrêts de longue durée, car les agents pourraient reporter ou prolonger leurs congés pour éviter de subir une perte de revenu », a déclaré Philippe Laurent, maire de Sceaux et porte-parole des employeurs territoriaux.

Les collectivités veulent garder la main

Face à cette réforme imposée, de nombreuses collectivités demandent à pouvoir décider elles-mêmes de son application. Certaines envisagent même d’indemniser leurs agents à 100 % par le biais de décisions internes comme dans le secteur privé, où de nombreux accords de branche permettent de maintenir l’intégralité du salaire en cas d’arrêt maladie. 
Toutefois, la légalité de cette approche reste incertaine. Si des collectivités adoptent des délibérations allant en ce sens, il faudra voir si les préfets choisissent d’attaquer ces décisions, car rien n’indique dans la loi que les collectivités peuvent déroger à cette règle.

Un impact sur l’attractivité de la fonction publique
Au-delà de la question financière, cette réforme pose un problème plus large : celui de l’attractivité des métiers publics. Déjà confrontées à des difficultés de recrutement, les collectivités s’inquiètent des répercussions sur l’engagement des agents. Car cette réforme est mise en place au moment même où l’État impose aux collectivités de financer la protection sociale complémentaire des agents. 
Si le gouvernement espère que cette réforme contribuera à rationaliser les dépenses publiques, les collectivités, elles, réclament des aménagements pour éviter qu’elle ne se traduise par un désengagement des agents et une fragilisation du service public. Le débat est loin d’être clos...

 

Danièle Licata
Partager sur

Inscrivez-vous gratuitement à nos newsletters

S'inscrire