Finances locales : l’AMF demande à l’État d’aller plus loin
Le gouvernement estime à ce jour à 14 Md€ l'impact financer de la crise sanitaire sur les budgets locaux. Dans ce contexte, l’AMF juge « indispensable de préserver la capacité financière des communes et des intercommunalités, pour continuer d'assurer les services essentiels à la population et pour relancer les investissements indispensables au soutien du tissu économique local ».
Elle se félicite que Gérald Darmanin, ministre de l'Action et des Comptes publics, et son secrétaire d’Etat Olivier Dussopt, aient répondu favorablement à ses premières demandes dans un courrier daté du 5 mai « pour soulager à court terme les finances locales ». Et de citer « cinq engagements importants » : l'élargissement du dispositif comptable d'étalement de charges sur plusieurs exercices, le versement anticipé du FCTVA, l'élargissement du périmètre d'aides en créant un « troisième étage » du Fonds de solidarité, la suspension des contrats d'encadrement des dépenses pour 2020 et le relèvement à 30% du taux de participation de la DSIL et de la DETR aux projets d'investissements.
Un compte dédié aux pertes Covid-19
L'AMF juge néanmoins nécessaire que le gouvernement aille plus loin en complétant le dispositif proposé. Elle demande notamment un compte dédié aux pertes Covid-19, permettant l'étalement de la charge mais obligeant à prédéterminer les pertes et les dépenses à inscrire dans ce nouveau compte, devant être complété par la création d'un sous-compte traçant au fur et à mesure sur toutes lignes budgétaires ces pertes et dépenses pour les rassembler ensuite dans ce compte dédié.
Sur le FCTVA, l'avancement du versement doit pouvoir bénéficier à toutes les collectivités, estime l’AMF. De plus, comme toutes les autres associations d’élus locaux, elle réitère sa ferme opposition à une remise en cause des impôts économiques locaux, qui, « dans ce contexte, aggraverait encore les difficultés financières du bloc communal ». Dernière demande de l’AMF envers l’Etat : garantir jusqu'en 2022 la compensation totale des pertes financières et des dépenses supplémentaires liées à la crise, subies par les communes et les intercommunalités, en les intégrant à la dette nationale.
« L’État ne laissera pas tomber les collectivités »
Auditionnée par la délégation aux collectivités territoriales du Sénat, le 13 mai, Jacqueline Gourault, la ministre de la Cohésion des territoires a assuré qu’un troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR 3) sera présenté d’ici quelques semaines pour venir en aide aux communes les plus en difficulté. Il s’inspirera du premier volet du rapport du député (LREM) Jean-René Cazeneuve, président de la délégation aux collectivités de l’Assemblée nationale, qui doit être rendu prochainement. Se voulant rassurante, la ministre a promis que « l’État ne laissera pas tomber les collectivités qui en ont le plus besoin ». A ce jour, 4000 communes sont en grande difficulté et jugées « à risque ». « Nous sommes très attentifs au fait que la crise n’a pas touché de la même manière toutes les collectivités. Il faudra donc des politiques de soutien particulièrement ciblées », a indiqué Jacques Gourault.
Pour sa part, Sébastien Lecornu, ministre chargé des Collectivités territoriales, a précisé, le 18 mai lors d’une audition par la commission du développement durable de l’Assemblée nationale, que le PLFR 3 contiendra « des mesures d’urgence envers les communes touristiques, les communes d’outre-mer et les communes percevant des DMTO ». Selon lui, « l’essentiel des mesures financières en direction des collectivités, concernant leurs pertes de recettes, seront contenues dans le projet de finances pour 2021 », présenté à la rentrée.
Projet de loi « 3D » : pas encore de calendrier prévu
Par ailleurs, la réunion de la délégation sénatoriale du Sénat a salué « le rôle pivot » joué par les préfets de département durant la crise. « Il a été le couteau suisse de l’action de l’État. Il a joué le rôle de guichet unique avec les autres services de l’État », a notamment estimé Sonia de La Provôté, sénatrice (UC) du Calvados. Selon la ministre de la Cohésion des territoires, « cette crise a montré plus que jamais la complémentarité de l’État et des collectivités et ça nous amènera à avoir des réflexions sur le projet de loi 3D [décentralisation, différenciation et déconcentration]. Cette crise nous amène aussi à parler de la réorganisation de l’État territorial (...) et sur le plan de la santé un certain nombre de choses sont à faire dans le cadre de la décentralisation ». Jacques Gourault a reconnu, le 18 mai devant les députés, qu’il n’y avait pas encore de date prévue pour la présentation du projet de loi « 3D ». « La crise actuelle montre que les sujets traités dans ce texte sont encore plus d’actualité », a-t-elle conclu.
Philippe Pottiée-Sperry