PLFR 3 : 45 Md€ pour les secteurs les plus touchés dont les collectivités

Philippe Pottiée-Sperry
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Le gouvernement a présenté au conseil des ministres du 10 juin un troisième projet de loi de finances rectificative pour 2020 (PLFR 3). Ses objectifs : renforcer le dispositif de soutien aux secteurs les plus touchés par la crise et déployer des mesures d’aide aux collectivités locales et d’accompagnement des plus précaires.

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Ce collectif budgétaire contient à nouveau des mesures de soutien mais aussi des dispositifs de relance. Et cela dans un contexte difficile car la prévision de croissance, révisée à la baisse avec à présent -11% du PIB en 2020, tire les conséquences de la baisse prolongée d’activité économique au deuxième trimestre durant le confinement et d’un retour très progressif à la normale.

Saisi par le gouvernement, le Haut Conseil des finances publiques a rendu un avis sur le PLFR 3 qui note que « la prévision de déficit du gouvernement s’établit à 11,4 points de PIB, un niveau jamais atteint depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. La dégradation du déficit par rapport au précédent PLFR résulte de nouvelles dépenses, de la forte révision des hypothèses macroéconomiques et de prévisions plus réalistes pour certaines dépenses décidées auparavant ». Le Haut conseil s’inquiète de la « hausse massive » de la dette publique, dont le ratio au PIB est révisé de plus de cinq points par rapport au précédent PLFR et de 22 points par rapport à la loi de finances initiale.

Le PLFR 3, transmis à l’Assemblée nationale, doit être examiné par les députés en commission des finances à partir du 23 juin, puis en séance publique durant la semaine du 29 juin. Le texte ira ensuite au Sénat pour un examen en séance publique prévue durant la semaine du 15 juillet.

Plans de soutien aux secteurs les plus touchés

Face aux conséquences économiques et sociales de la crise, les dispositifs d’urgence en faveur des salariés et des entreprises sont prolongés et leurs moyens renforcés pour atteindre au total près de 31 Md€ pour l’activité partielle et 8 Md€ s’agissant du fonds de solidarité pour les très petites entreprises (TPE). A noter pour le fonds de solidarité qu’une ordonnance a été présentée au même conseil des ministres du 10 juin afin de le prolonger jusqu’au 31 décembre 2020.

Ces mesures sont complétées par des plans de soutien aux secteurs les plus touchés par la crise, pour un montant total de 43,5 Md€ : plan tourisme (18 Md€), plan de soutien au secteur automobile (8 Md€), plan de soutien au secteur aéronautique (15 Md€), plan en faveur du secteur des startups et entreprises technologiques (1,2 Md€ dont 700 M€ de fonds publics), plan en faveur du secteur culturel (1,3 Md€).

4,5 Md€ pour les collectivités

Le PLFR 3 contient aussi des mesures d’urgence pour accompagner les collectivités face à la crise et les aider à soutenir la reprise d’activité, déjà annoncées par le Premier ministre le 29 mai. Près de 4,5 Md€ sont mobilisés avec des modalités adaptées à chaque niveau de collectivité. Tout d’abord, 750 M€ sont prévus pour compenser les pertes de recettes fiscales et domaniales des communes et intercommunalités en difficulté, constatées en 2020 par rapport à la moyenne des montants perçus entre 2017 et 2019. « Ces pertes pourraient en effet placer certaines communes et EPCI dans l’incapacité d’adopter et d’exécuter un budget en équilibre en 2020, précise le PLFR 3. Il s’élèvera à 750 M€ dont 500 M€ dès le présent projet de loi de finances rectificative ».

Par ailleurs, la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) est abondée d’un Md€ supplémentaires de crédits, à utiliser par les collectivités dans les six mois. « Cela va concerner trois secteurs, a précisé Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des comptes publics : les aménagements dus à la sécurité sanitaire, la transition écologique et la réfection du patrimoine [bâti et non bâti] ».

Départements : 2,7 Md€ d’avances pour compenser les baisses de DMTO

Pour les collectivités d’outre-mer, très dépendantes de la fiscalité indirecte, un nouveau prélèvement sur recettes est créé pour compenser les pertes de recettes d’octroi de mer et de taxe spéciale de consommation constatées en 2020 du fait de la crise sanitaire, pour un montant de 60 M€. De plus, à l’instar du dispositif adopté pour la Nouvelle-Calédonie dans la LFR 2, la garantie de l’État sera octroyée à un prêt de l’Agence française de développement (AFD) destiné à la Polynésie française, à hauteur de 240 M€. Ce prêt est axé sur le soutien à l’activité partielle, à la protection sociale et à la relance de l’économie.

A cela s’ajoutent 2,7 Md€ d’avances (dont 2 Md€ en 2020) pour les départements confrontés à des pertes de recettes des droits de mutation à titre onéreux (DMTO). « Ces avances remboursables feront l’objet d’un versement en 2020 puis d’un ajustement en 2021 et d’un remboursement en 2021 et en 2022, à travers un prélèvement sur les avances mensuelles de fiscalité locale », précise le PLFR 3.

A noter que rien n’est prévu pour l’instant pour les régions, au grand dam de ces dernières. Une réunion est prévue courant juin entre elles et le gouvernement, et devrait porter plus spécifiquement sur des mesures de relance de l’activité économique.

Des aides aux personnes les plus fragiles

Par ailleurs, des aides sont prévues pour les plus fragiles. Concernant l’hébergement d’urgence, 200 M€ de crédits financeront la prolongation de la trêve hivernale, la distribution de chèques-services pour l’alimentation et l’hygiène ou pour les centres d’hébergement. S’agissant des jeunes précaires et des étudiants, 155 M€ vont financer la prime exceptionnelle annoncée pour les moins de 25 ans en difficulté du fait de la crise sanitaire. Cette aide, versée en une fois, devrait concerner 800 000 jeunes. En outre, 45 M€ viendront combler les pertes de recettes des CROUS et 30 M€ serviront aux bourses sur critères sociaux qui seront versées en juillet.

S’agissant des jeunes en âge scolaire, 283 M€ financeront le programme « Vacances apprenantes », qui permettra l’accueil des enfants cet été dans les écoles ainsi que dans les centres de loisirs et les colonies. S’agissant du ministère de l’Education nationale, 176,5 M€ serviront à l’accompagnement renforcé des élèves pour leur permettre un rattrapage scolaire, leur accueil par les collectivités, les colonies et les centres de loisirs avec des activités éducatives hors temps scolaire. Pour le ministère de la Cohésion des territoires, 86,5 M€ financeront la mise en place du dispositif pour les élèves des quartiers prioritaires de la politique de la ville. S’agissant du ministère de la culture, 20 M€ financeront des dispositifs participant à « un été apprenant et culturel ».

Enfin, la lutte contre les violences faites aux femmes sera renforcée grâce à une enveloppe de 7 M€, dont 4 M€ de crédits supplémentaires, pour soutenir les associations, l’accompagnement psychologique et social et pérenniser les solutions d’hébergement.

Permettre aux TPE-PME de réduire leurs passifs sociaux

Une mesure « inédite » d’exonération de cotisations et contributions sociales patronales, associée à un crédit de cotisations, pour près de 3 Md€, est également mise en place. Elle permettra notamment aux TPE-PME des secteurs de l’hôtellerie, de la restauration, de la culture, de l’événementiel, du sport, du transport aérien et aux TPE ayant été frappées d’une interdiction d’accueil du public, de réduire leurs passifs sociaux très rapidement et massivement, soutenant ainsi la reprise d’activité. Des remises de cotisations patronales sur demande pour les petites entreprises qui auront subi une perte d'activité supérieure à 50% pourront également être accordées. Toutes les entreprises pourront par ailleurs bénéficier d’étalement long, jusqu’à 36 mois, pour payer les cotisations reportées.

Philippe Pottiée-Sperry

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