, mis à jour le 02/06/2025 à 09h54

« Santé mentale : la prévention commence par ceux qui soignent »

Régis Douaud
Responsable du management des risques RH
Relyens
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Dans les hôpitaux, la prévention de l’épuisement professionnel devient un enjeu crucial

À l’heure où les soignants sont plus que jamais soumis à des pressions multiples, la prévention de l’épuisement professionnel devient un enjeu crucial. Régis Douaud, responsable du management des risques RH chez Relyens, décrypte les résultats d’une étude menée via le dispositif HoliCare et propose des pistes concrètes pour agir, au plus près du terrain, en redonnant du sens et des moyens aux professionnels comme aux managers.

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Quels sont les principaux enseignements de votre étude sur l’épuisement professionnel dans les établissements de santé ?

Le premier constat marquant, c’est la différence très nette entre les femmes et les hommes : 25 % des femmes présentent des signes d’épuisement professionnel contre 13 % des hommes. Ce chiffre grimpe à 29 % pour les femmes si l’on étend à tous les secteurs d’activité, selon une étude épidémiologique menée par l’Inserm. Deux profils ressortent : les femmes, et les managers. Et lorsqu’on cumule les deux, les risques sont encore plus élevés.

Quelles en sont les causes principales ?

La charge de travail, l’incertitude sur l’organisation du travail et le manque de clarté dans les missions sont les causes les plus citées. À cela s’ajoutent des sous-effectifs chroniques, notamment dans les hôpitaux. Pour les managers, la situation est d’autant plus difficile qu’ils sont souvent promus pour leur expertise, mais insuffisamment formés à la fonction managériale. Ils ne sont pas assez accompagnés pour devenir des relais efficaces auprès des équipes.

Comment mesurez-vous la santé mentale d’une organisation ?

Il existe plusieurs indicateurs. Par exemple, le taux de salariés qui s’arrêtent fréquemment dans une même équipe est un signal d’alerte. On peut aussi s’appuyer sur les remontées de la médecine du travail, des syndicats ou encore sur les taux d’absentéisme. Côté management, le rôle de proximité est crucial : détecter les changements d’humeur, l’isolement, la perte d’engagement… tout cela peut alerter sur une situation de souffrance.

Quels outils proposez-vous pour agir en prévention ?

Nous utilisons un outil de diagnostic issu du dispositif HoliCare, conçu à partir de l’expérience du docteur Clément Duret, spécialiste de l’épuisement professionnel. Il permet aux professionnels de s’autoévaluer, et aux organisations de disposer de données anonymisées pour comprendre les facteurs collectifs en jeu. L’idée est de pouvoir agir avant qu’un burn-out ne soit avéré.

Comment passer de l’identification des risques à l’action concrète ?

L’important, c’est d’agir à deux niveaux : individuel et collectif. Il faut accompagner les personnes en souffrance, bien sûr, mais aussi comprendre ce qui dysfonctionne dans l’organisation. Une mauvaise gestion des plannings, par exemple, peut générer un fort sentiment d’iniquité. Nous aidons les structures à identifier ces causes et à coconstruire des solutions adaptées, en impliquant les équipes et les parties prenantes.

Certains établissements mettent en place des « bienveilleurs ». Est-ce une piste pertinente ?

Oui, cela rejoint les formations aux premiers secours en santé mentale qui se développent en France. Il s’agit de former certains membres de l’équipe à détecter les signaux faibles, à intervenir ou orienter en cas de souffrance psychologique. Plus généralement, il faut pouvoir donner l’occasion aux agents de discuter du travail et de ce qui fait ressources et contraintes. Cela permet d’agir concrètement, au plus proche du terrain et redonne du pouvoir d’action aux opérateurs eux-mêmes, ce qui est essentiel.

Quelles sont vos préconisations ?

Il faut redonner aux managers de proximité les moyens d’être de vrais managers : à l’écoute, capables de réguler la charge de travail et de soutenir leurs équipes. Et ne pas oublier une quatrième étape souvent négligée : mesurer l’impact des actions mises en œuvre. Sans cela, difficile de savoir si les solutions apportées sont réellement efficaces et utiles.
 

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