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Plus de 8 Md€ nécessaires par an pour rénover le patrimoine de l’eau

Philippe Pottiée-Sperry
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Plus de 8 Md€ nécessaires par an pour rénover le patrimoine de l’eau

Les besoins de rénovation des infrastructures de l’eau s’élèvent à 4,6 Md€ par an, selon l’Union des industries de l’eau. Un coût élevé d’autant qu’il faudrait y ajouter 3,7 Md€ pour les investissements « verts » contre les atteintes aux milieux aquatiques. Une facture salée pour laquelle il faudra trouver des financements. 

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Une étude de l’Union des industries de l’eau (UIE), menée par Maria Salvetti, économiste indépendante, et rendue publique le 6 octobre, chiffre à pas moins de 4,6 Md€ les besoins annuels supplémentaires pour moderniser et décarboner les infrastructures de l’eau, de l’assainissement et de l’eau pluviale. Dans ce contexte, l’UIE plaide pour « une trajectoire nouvelle intégrée à la planification écologique lancée par l’État et la formation d’une nouvelle génération de professionnels à même de réindustrialiser la filière ».

Un patrimoine global de 500 Md€
Dans le détail, l’étude se base sur des données et rapports publics dont une étude de 2019 de l’Office français de la biodiversité. Après une première édition en 2017, elle dresse un état des lieux de la gestion du patrimoine eau potable, assainissement collectif et eaux pluviales, permettant ainsi d’actualiser la valorisation du patrimoine global (500 Md€) et de préciser les besoins d’investissements. Nouveauté : l’évaluation des coûts environnementaux relatifs aux dommages sur les milieux aquatiques (hors infrastructures industrielles et agricoles).

Chute de l’investissement sur l’assainissement 
Premier constat : une aggravation du sous-investissement relevé il y a cinq ans. Les services d’eau potable et d’assainissement représentent la plus large part avec respectivement 1,8 et 1,4 Md€. Ce dernier secteur connaît la plus grande baisse d’investissement par rapport à la précédente étude qui affichait un excédent de 0,6 Md€ pour l’assainissement collectif (entre 2009 et 2014). Le renouvellement des réseaux d’eau constitue toujours la plus grande part des investissements nécessaires (environ 3 Md€). 
La gestion des eaux pluviales n’est pas tellement mieux lotie avec des besoins estimés à 1 Md€. L’UIE juge nécessaire de mieux connaître ce patrimoine dont la gouvernance peine à se stabiliser, alors que le risque inondation s’accroît avec le changement climatique et l’augmentation des pluies diluviennes. Enfin, le traitement des micropolluants (polluants organiques, pesticides, micro-plastiques, résidus médicamenteux…), poste rattaché aux stations d’épuration, est évalué à 390 M€.

Pistes de financement
Les besoins supplémentaires de 4,6 Md€ s’ajoutant à l’investissement actuel d’environ 6 Md€ amèneraient ainsi le budget annuel à plus de 10 Md€ ! L’UIE défend l’intégration de cet enjeu au chantier de la planification écologique lancé fin septembre par le ministère de la Transition écologique. Elle met en avant plusieurs pistes de financement possibles comme la meilleure utilisation des Aqua prêts de la Banque des Territoires ou les excédents de trésorerie (5 Md€) des services d’eau et d’assainissement des collectivités. 
L’urgence est là. « Les indicateurs démontrent le vieillissement inéluctable de nos infrastructures, s’alarme Jean-Luc Ventura, le président de l’UIE. Le rythme actuel ne permettra pas à notre patrimoine de tenir sur le long terme, en particulier concernant le renouvellement des canalisations. En 2050, deux tiers des infrastructures auront plus de 70 ans : nous ferons face à un papy-boom des installations ! ». Et d’appeler à un changement de trajectoire et la volonté politique pour adapter les capacités de production. 

3,7 Md€ de coûts environnementaux
Au-delà de ces investissements « gris » (les infrastructures), l’étude de l’UIE souligne également les investissements « verts » nécessaires pour parvenir à la bonne qualité des masses d’eau. Estimés à 3,7 Md€, ces coûts quantifient les dommages environnementaux sur les milieux aquatiques. Ils ont été évalués sur la base de la moyenne annuelle des coûts des deux programmes de mesures 2016-2021 et 2022-2027 des agences de l’eau.
Par ailleurs, l’étude pointe la baisse des budgets alloués pour l’investissement dans l’eau potable ou l’assainissement de la part des agences de l’eau, au profit du grand cycle de l’eau. Résultat : le petit cycle dispose des aides les plus faibles depuis 15 ans (1 Md€ en 2020 contre 1,8 Md€ en 2012). Enfin, l’UIE rappelle que l’application du principe pollueur-payeur et l’activation des dispositifs de responsabilité élargie des producteurs (REP) permettraient de financer le traitement des micropolluants.

Besoin de 13 000 emplois d’ici 2025
Aujourd’hui, le secteur de l’eau représente plus de 130 000 emplois directs et indirects. L’étude décrit un besoin de 13 000 équivalents-temps-plein à l’horizon 2025 dont plus de la moitié pour remplacer des départs en retraite.
« La réindustrialisation de la filière eau va se faire sur le temps long, pour permettre le redéploiement des outils de production nécessaires. La question du capital humain et l’anticipation des compétences nouvelles seront essentielles », considère Jean-Luc Ventura. Et d’insister sur le besoin d’une nouvelle génération de professionnels de l’eau.

Philippe Pottiée-Sperry
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