Voirie, eau, réseaux … ce que les infrastructures révèlent vraiment de nos territoires
Selon l’étude de l’Institut Terram, " Infrastructures invisibles : ce que les Français disent de leurs réseaux du quotidien », menée par Victor Delage, les infrastructures invisibles — eau, voirie, assainissement, réseaux enterrés — deviennent un enjeu central pour les Français. À quelques mois des municipales, elles s’imposent comme un test de crédibilité pour les élus.
L’étude de l’Institut Terram montre à quel point les infrastructures du quotidien structurent désormais le regard des citoyens sur l’action publique. Leur état matériel devient un langage politique, un miroir du lien entre habitants et institutions. Plus d’un Français sur deux (56 %) déclare avoir constaté au moins une dégradation significative sur la voirie de sa commune dans l’année écoulée, loin devant les pannes de réseaux enterrés (28 %) ou les problèmes d’assainissement (26 %).
Signe révélateur : la route reste pour beaucoup la preuve tangible de la présence publique. « La route demeure la preuve la plus tangible de la présence publique », rappelle l’étude, soulignant que le reste — canalisations, réseaux souterrains — « ne devient visible qu’au moment de la panne ».
Cette matérialité du quotidien n’est pas perçue de manière uniforme. Les jeunes (moins de 35 ans) apparaissent comme la génération la plus sensible aux défaillances : 80 % disent avoir rencontré au moins un problème d’infrastructure dans l’année, contre 66 % des plus de 65 ans. Les artisans et indépendants, eux, remontent plus fortement les pannes de réseaux enterrés (46 %) du fait de leur incidence directe sur l’activité économique.
Transparence, entretien, priorités : la nouvelle grille civique
Au-delà des constats techniques, l’étude met en lumière une profonde demande de lisibilité. Six Français sur dix se disent mal informés sur l’état ou l’entretien des réseaux d’eau, d’électricité et de voirie. « Beaucoup ignorent qui entretient la route devant chez eux », note le rapport, citant le brouillage des compétences comme cause majeure de défiance. Cet appel à la transparence n’est pas une revendication militante : pour 56 % des habitants, il s’agit avant tout d’obtenir une information « accessible à tous, claire et régulière ». Les citoyens ne demandent pas de co-gouverner, mais de comprendre ce qui se joue, pourquoi et à quel rythme.
Autre enseignement fort : la hiérarchie des priorités. Avant les projets visibles, les Français veulent que l’on « tienne » ce qui existe. L’entretien des réseaux arrive en tête des sujets à traiter lors des élections municipales de 2026 : 88 % jugent qu’il devrait figurer au cœur du débat local. « Inaugurer une nouvelle place publique alors que les réseaux sont dégradés est une erreur de priorité », pensent 59 % des répondants.
L’écologie du quotidien suit la même logique. Pour une infrastructure « écologique », les Français évoquent d’abord « l’entretien qui évite les pertes et les fuites » (61 %) et l’économie des ressources (65 %), bien avant les aménagements symboliques. L’étude parle d’une véritable « écologie du maintien », où la sobriété consiste d’abord à faire durer, réparer, fiabiliser.
Municipales 2026 : vers un contrat de maintenance
Plus qu’un thème technique, les infrastructures deviennent un critère politique. Elles conditionnent la qualité de vie, mais aussi la confiance. L’étude montre que le consentement fiscal augmente lorsque la dépense est lisible et reliée à des besoins concrets : 53 % des Français accepteraient une hausse temporaire d’impôts pour remettre à niveau les réseaux… mais seuls 15 % sans condition. « Chaque euro doit pouvoir se traduire en preuve que la solidarité produit du concret », résume l’Institut Terram.
En creux, se dessine ce que le rapport appelle une « République du maintien » : non plus promettre la transformation spectaculaire, mais garantir la continuité. Les réseaux du quotidien sortent enfin de l’ombre. Ils deviennent un critère de crédibilité, un révélateur d’attention au réel. Autrement dit, un terrain où les élus locaux ont beaucoup à perdre… et peut-être beaucoup à regagner.