Coup d’envoi à l’extension de "Territoires zéro chômeur"
C’est la dernière ligne droite pour l’adoption définitive de la proposition de loi (PPL) relative au renforcement de l’inclusion dans l’emploi par l’activité économique et à l’expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée ».
Le Sénat a ainsi adopté, le 4 novembre, les conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) sur ce texte, puis cela sera le tour de l’Assemblée nationale, d'ici fin novembre. Mais après l’accord en CMP, ces votes ne sont que formels. La CMP est parvenue, fin octobre, à un « bon équilibre » selon la députée LREM Marie-Christine Verdier-Jouclas, signataire et rapporteure de la PPL à l’Assemblée. Le compromis trouvé entre députés et sénateurs « concrétise des avancées majeures pour lutter efficacement contre l’isolement social et professionnel grâce à la création d’un "CDI inclusion senior" à destination des personnes de plus de 57 ans et à l’extension de l’expérimentation », estime la députée. Saluant l’adoption de cette loi, Laurent Grandguillaume, président de l’association « Territoires zéro chômeur de longue durée » (TZCLD) estime que cette « deuxième étape expérimentale est incontournable pour contribuer à faire face aux conséquences sociales et économiques de la crise sanitaire que nous traversons ». Il attend une promulgation de la loi en décembre
Un dispositif issu d'ATD Quart-Monde
Pour rappel, le dispositif TZCLD, issu d’une initiative d'ATD Quart-Monde, a été créé par une loi du 29 février 2016. Il est expérimenté depuis 2017 dans 10 territoires, sélectionnés pour embaucher des chômeurs privés depuis longtemps de travail. Avec des résultats assez encourageants. Ces personnes sont employées en CDI par des entreprises de l'économie sociale et solidaire dites entreprises à but d'emploi (EBE), pour des activités non couvertes par le secteur privé des bassins d'emploi concernés (recycleries, épiceries ou garages solidaires...). Leur salaire est financé par une réaffectation des montants liés aux coûts du chômage (indemnités, RSA, autres minima sociaux...).
50 nouvelles expérimentations
La PPL prévoit notamment une augmentation du nombre d’expérimentations (une dizaine actuellement) du dispositif. Elles seront 50 alors que la PPL n’en proposait que 30 au départ. A cela s’ajoutent la prolongation des dix territoires précurseurs. En outre, le gouvernement pourra aller au-delà du plafond de 60 territoires en habilitant des territoires supplémentaires, à titre dérogatoire, par décret. Plus de 120 territoires (communes, intercos, groupes de collectivités) sont déjà sur les rangs pour candidater, selon l’association Territoires zéro chômeur de longue durée. En pratique, les nouveaux territoires qui seront retenus disposeront de cinq ans pour « mettre un terme à la privation durable d’emploi ». Des entreprises à but d’emploi (EBE) y embaucheront en CDI des chômeurs, depuis au moins un an. Spécificité de la démarche : ils exerceront des activités économiques non concurrentes de celles déjà présentes sur le territoire.
Rôle accru du fonds d’expérimentation territoriale
Le financement du dispositif est assuré par le fonds d’expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée, dont le rôle est étendu. Aux côtés de l'État, seuls les départements concernés par une expérimentation devront concourir au fonds. Le montant de leur participation doit être fixé par décret. Comme auparavant, les autres collectivités et les organismes publics et privés des bassins d'emploi sélectionnés peuvent contribuer volontairement au fonds. Les départements donneront leur avis pour qu’un territoire se porte candidat. Selon Frédérique Puissat (LR, Isère), rapporteur du texte au Sénat, « on ne peut pas imposer au département de participer financièrement à une expérimentation qui ne serait pas cohérente avec la politique qu’il définit librement en matière d’insertion ».
Regard du chef de file en matière d’insertion
« On ne peut concevoir une expérimentation sans le regard du chef de file en matière d’insertion, des initiatives de cette nature doivent s’intégrer dans une logique territoriale. Sa contribution financière permet aussi de sécuriser cette expérimentation », a également estimé la ministre chargée de l’Insertion Brigitte Klinkert. Les départements seront également cosignataires des conventions signées entre les territoires et le Fonds d’expérimentation. Le principe repose sur « l’activation » des dépenses dites « passives », comme le RSA ou les autres aides sociales que les personnes, une fois en emploi, ne recevront plus.
Suppression de l’agrément de Pôle emploi
De plus, le texte accélère le développement des structures d’insertion par l’activité économique (IAE) en supprimant l’agrément délivré par Pôle emploi préalablement à toute embauche dans ces structures. Il s’agissait d’une demande de longue date du secteur. Cet agrément constituait parfois un frein aux embauches comme l'avait souligné un rapport de la Cour des comptes en 2019. Les structures d'insertion par l'activité économique pourront directement prescrire un parcours d'insertion, via une nouvelle procédure, le "Pass IAE".
Création d’un « CDI inclusion senior »
Autre mesure pour renforcer l’inclusion dans l’emploi par l’activité économique : la création d’un « CDI inclusion senior » pour les personnes de plus de 57 ans. Par ailleurs, sur amendement gouvernemental, le « contrat passerelle » sera expérimenté sur trois ans pour faciliter le recrutement par les entreprises privées des personnes en fin de parcours d’insertion. L'objectif du gouvernement est de permettre à 5000 salariés d'accéder à un CDI d'ici à 2022. A noter aussi la possibilité de cumuler un contrat d'insertion avec un autre contrat de travail à temps partiel, dans une logique de transition progressive vers l’emploi de droit commun. « Alors que le marché de l’emploi est durement frappé par la crise, nous renforçons des dispositifs efficaces pour favoriser le retour à l’emploi des personnes qui en sont les plus éloignées (chômeurs de longue durée, bénéficiaires des minima sociaux, personnes handicapées ou parents isolés) », a estimé Xavier Iacovelli, sénateur des Hauts-de-Seine, chef de file du groupe RDPI.
Philippe Pottiée-Sperry
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