
Avec les territoires sur l’eau, c’est une nouvelle ère de l’aménagement qui s’ouvre

Face à la raréfaction du foncier, au défi climatique et à la pression démographique, les collectivités cherchent de nouvelles voies pour aménager leurs territoires. Le « foncier bleu », ou développement sur l’eau, s’impose progressivement comme une alternative crédible. Quentin Bresson, directeur des relations institutionnelles de Wearth Group, pionnier de l’aménagement flottant depuis 40 ans, décrypte pour nous les enjeux d’un modèle urbain encore émergent en France.
Comment concilier développement économique et préservation des écosystèmes aquatiques ?
C’est tout l’enjeu : aujourd’hui, les élus doivent arbitrer entre réindustrialisation, besoins en logements et préservation des terres agricoles. Le territoire est sous pression. L’idée d’aménager sur l’eau, sans couler de béton, permet d’explorer d’autres voies. On parle ici de structures flottantes, non-invasives, qui peuvent être retirées sans laisser de traces sur l’écosystème. Contrairement aux extensions bétonnées, comme à Monaco, ces solutions respectent le fond marin.
Existe-t-il des exemples concrets d’aménagements flottants ?
Oui, notamment aux Pays-Bas qui sont pionniers dans ce domaine. Le quartier d’Ijburg, par exemple, est entièrement flottant. On y trouve aussi le plus grand bâtiment flottant connu, à Rotterdam. En France, cela reste émergent, même si quelques projets voient le jour : un théâtre flottant à Lyon, des logements touristiques à Gruissan, ou encore les baignades naturelles en Seine à Paris, impulsées par Anne Hidalgo qui devraient voir le jour cet été.
Mais peut-on réellement construire des logements ou des bâtiments publics sur l’eau ?
Absolument. C’est techniquement possible, réglementairement encadré, et cela commence à intéresser des collectivités. On peut imaginer des écoles, des entreprises, des logements… Des technologies existent : des fondations flottantes en béton ou en blocs de polystyrène armés permettent la stabilité de bâtiments de plusieurs étages.
Comment les élus perçoivent-ils ces solutions ?
Ils commencent à y voir une réelle opportunité. Certains territoires, confrontés à une pression foncière et à l’arrivée de nouvelles industries, n’ont tout simplement plus de place pour loger. Ils envisagent d’utiliser leurs plans d’eau – souvent sous-exploités – pour accueillir des logements, notamment pour des publics CSP+, ou des espaces publics flottants. Des projets dans le Nord de la France émergent et apparaissent comme une solution alternative sérieuse.
Quel cadre réglementaire pour ces aménagements ?
L’occupation se fait généralement via une autorisation temporaire, comme un bail de 10 à 30 ans. Le bâtiment appartient à l’usager, mais pas le terrain – ce qui réduit considérablement le coût d’acquisition. Cela fonctionne un peu comme un mobil-home : le bien peut être déplacé. Dans certains cas, il est aussi possible d’acheter le foncier flottant.
Quel est le niveau de maturité du marché aujourd’hui ?
Il est encore émergent en France. Mais il y a un vrai frémissement. Nous voyons de plus en plus de collectivités intégrer cette idée dans leurs projets. Des promenades flottantes ou des places publiques vont voir le jour en Île-de-France. La dynamique est là.
Quel est le rôle de Wearth Group sur ce marché ?
Wearth Group est un acteur industriel de référence, spécialisé dans les structures flottantes depuis 40 ans. Nous fabriquons notamment les pontons via notre marque Poralu Marine. Depuis une dizaine d’années, nous avons élargi notre offre pour intervenir sur toute la chaîne de valeur : conception, fabrication, installation, mise en service, conseil. Nous ne faisons pas de bateaux, mais tout ce qui peut flotte.
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