Les budgets participatifs ont le vent en poupe

Philippe Pottiée-Sperry
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Antoine Bézard, fondateur du site Lesbudgetsparticipatifs.fr, expert associé à la Fondation Jean-Jaurès, a publié, le 26 février, le nouveau volet de son bilan des budgets participatifs en France.

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Constat : un essor sans précédent au cours des six dernières années passant de sept démarches en activité en 2014 à 170 en 2020. Parmi les explications : les suites de la crise des gilets jaunes et les effets du grand débat qui a suivi.

À l’approche des municipales, la note publiée par la Fondation Jean-Jaurès s'interroge sur le devenir de cette forme de démocratie participative venue du Brésil, et préconise de donner davantage de sens à l'engagement des citoyens. L’auteur constate que de nombreuses listes candidates au scrutin des 15 et 22 mars veulent proposer un budget participatif. « 2020 et 2021 seront-elles les années d’une généralisation des budgets participatifs ? », s’interroge Antoine Bézard.

La France compte donc 170 budgets participatifs en activité en 2020 dans 141 communes, 18 départements, une région (l’Occitanie) et une dizaine d’universités. Cela représente près de 19 millions de Français qui peuvent décider directement d'une part du budget d'investissement de leur collectivité. Les villes pionnières ont réaffirmé des principes de bonnes pratiques : régularité, montant alloué défini, vote par tous les citoyens et, bien sûr, respect de ce vote par les élus. « Une normalisation serait la bienvenue », estime Antoine Bézard.

 

Des communes de toutes tailles concernées

Si beaucoup de grandes villes telles que Paris, Rennes, ou Bordeaux mènent cette démarche de démocratie participative, les communes de toutes tailles le font également : un tiers des communes engagées compte entre 5 000 et 20 000 habitants, un quart entre 20 000 et 50 000 habitants et un autre quart entre 50 000 et 200 000 habitants.

Dans le détail, l'Ile-de-France compte près de 30% des budgets participatifs, suivie de la Nouvelle-Aquitaine, de l'Occitanie, des Hauts-de-France et de la Bretagne réunissant chacune autour de 10% des communes engagées. Cela s'explique par la proximité géographique qui permet une meilleure diffusion de la démarche, l'expérience d'une collectivité similaire ainsi que la couleur politique des municipalités et collectivités. En l'occurrence, la gauche a été moteur dans le développement des budgets participatifs dans l'hexagone puisqu'au niveau des communes engagées, 64% étaient dirigées par la gauche en 2017.

Une participation record dans le Gers

Les projets votés dans les budgets participatifs en 2019 sont très souvent liés à l'environnement et à la protection de la biodiversité : plantations d'arbres, nichoirs, ruches, jardins partagés… C'est près de 40% des projets arrivés en tête des votes aux budgets participatifs qui sont en lien avec l'environnement suivis des projets d'aménagements et de mobilité qui orientent les investissements vers une ville plus respectueuse avec la végétalisation de l'espace public, la pratique du vélo ou des aménagements pour les piétons.

Concernant la participation, ce sont 5% des habitants d'une commune en moyenne qui votent aux budgets participatifs. Toutefois, de plus en plus de villes dépassent les 10% de participation comme Plélan-le-Grand (29), Guichen Pont-Réan (35) ou encore Paris qui atteint les 11% de participation en 2019. À noter que le département du Gers atteint 25% de participation au vote du budget participatif en 2019, un record en France.

Un besoin de normalisation

La question d’une normalisation ou d’une labellisation interroge depuis quelques années les villes pionnières du budget participatif. Dès 2016, Grenoble, Rennes, Montreuil et Paris ont accueilli des rencontres nationales pour réfléchir autour des bonnes pratiques. En novembre 2019, durant leur dernière édition, ces villes ont signé une déclaration affirmant six principes essentiels. Quatre d’entre eux ont valeur de bonnes pratiques et pourraient s’imposer comme des normes. Le budget participatif doit ainsi être organisé régulièrement, s’appuyer sur un montant défini, être ouvert à tous les citoyens et, enfin, être sanctionné par un vote que le conseil municipal s’engage à respecter. Les deux autres principes sont en fait des objectifs : la confiance et l’émancipation.

Dans sa mise en œuvre, le budget participatif se décline généralement en cinq étapes : définition du montant alloué à la décision des citoyens et règles de la démarche ; participation des citoyens ; analyse de la faisabilité de leurs idées et chiffrage par les services ; vote sur les projets réalisables, souvent sans condition de nationalité et ouvert aux plus jeunes ; réalisation des projets votés dans un délai maximum de deux ans.

En 2019, 98 communes se sont conformées à ces quatre principes (sur les 138 qui ont mené un budget participatif). Tous les départements ayant un budget participatif se conforment à ces quatre principes. Dans 39 communes, la décision finale appartient à un jury, à une commission ad hoc ou aux instances de démocratie locale, conseils ou comités de quartier.

Philippe Pottiée-Sperry

Philippe Pottiée-Sperry
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