La Caisse des dépôts met 26 Md€ dans le plan de relance
Eric Lombard, le directeur général de la Caisse des dépôts (CDC), a détaillé la participation de l’établissement au plan de relance à hauteur de 26 Md€ montrant l’importance de cet opérateur public. D’autant qu’il s’agit de fonds propres.
Son plan d’action massif, présenté le 7 septembre, repose sur quatre axes prioritaires : la transition écologique, le logement, le soutien aux entreprises et la cohésion sociale. L’objectif est d’investir dans les deux ans à venir près de 80% de ces 26 Md€. « A côté des 40% de l’Etat, des 40% de l’Union européenne, la Caisse des dépôts intervient donc à hauteur de 20% du plan France relance sur 2021 et 2022, explique Eric Lombard. Les 6 Md€ restants sont programmés pour les années suivantes avec des possibilités d’abondements. En outre, les montants de nos prêts seront encore plus importants avec des conditions d’utilisation assouplies ». Et d’ajouter : Pour ce programme extrêmement ambitieux, il faudra que les fonds arrivent vite ».
6,3 Md€ pour la transition écologique et énergétique
Un des premiers axes de ce volet est d’accompagner la rénovation thermique des logements et de bâtiments publics. Le financement sera assuré par des fonds d’épargne. L’objectif du gouvernement est la rénovation de 22 millions de m2 (logements sociaux, bâtiments publics, bâtiments tertiaires privés). « Pour la rénovation thermique des bâtiments publics, nous allons accompagner les collectivités qui sont en sont les principaux propriétaires, financièrement mais aussi par une aide importante en ingénierie », explique Olivier Sichel, directeur général adjoint de la CDC et directeur de la Banque des territoires. S’y ajoutera la rénovation thermique de 125 000 logements sociaux via les éco-prêts financés sur fonds d'épargne.
La CDC affirme aussi vouloir investir massivement dans les infrastructures durables dans les territoires. Concrètement, un plan dédié à la mobilité durable (3,5 Md€ de la Banque des territoires et de BpiFrance) sera mis en place notamment pour aider les collectivités à développer les flottes et recharges de voitures électriques. Objectif affiché : 11 000 véhicules basses émissions (véhicules électriques, au gaz naturel, véhicules à hydrogène) de plus dans les flottes de véhicules (véhicules électriques, au gaz naturel, véhicules à hydrogène) et 50 000 bornes de recharge électrique et biogaz installées. Pour financer des flottes de matériel roulant propre (transport routier, fluvial ou ferroviaire…), la Banque des territoires apportera des fonds propres (350 M€) et des prêts dédiés (300 M€). En matière d’adaptation des mobilités post-Covid, la Banque des territoires financera aussi les plans de transformation des voiries des villes en faveur des nouvelles mobilités (pistes cyclables, logistique urbaine durable …). Le financement passera par 70 M€ de fonds propres et 350 M€ de prêts dédiés.
La Banque des territoires prévoit 1,3 Md€ de prêts pour financer l’accélération des travaux pour la durabilité et la résilience des infrastructures dans les territoires (régénération du rail sur certains axes, rénovation des ouvrages d’art routier et des ports…). S’y ajoutera 200 M€ en fonds propres pour des projets d’infrastructures régionales et locales.
Soutien aux ENR et rénovation des réseaux d’eau
En matière d’énergies renouvelables (ENR), la Banque des territoires, intervenant déjà dans le financement des parcs éoliens et solaires, accentuera son action en soutenant les secteurs de l’hydrogène vert et de la biomasse. Ce sont au total 8,8 GW de puissance nouvelle d’ENR qui sont prévus, soit le tiers de l’effort à mener sur les ENR pour rééquilibrer le mix énergétique, permettant d’accélérer la part des ENR dans l’énergie consommée. De plus, la Banque des territoires soutiendra la rénovation des réseaux d’eau (20% de perte aujourd’hui) et d’assainissement via son dispositif « Aqua Prêt » (les conditions d’utilisation seront élargies). Pour le recyclage des déchets, des financements seront fléchés sur la réduction du volume de déchets enfouis, la valorisation des matières premières secondaires et la production de combustible en local.
Pour permettre un recours massif aux prêts sur fonds d’épargne, les clients du secteur public local qui peuvent en bénéficier sont élargis. De plus, « la tarification des prêts a été améliorée pour des thématiques prioritaires du plan de relance dont la transition écologique (rénovation thermique des bâtiments publics, infrastructures de transports…) », explique la Caisse des dépôts. Au total, ce sont près de 40 Md€ qui seront mobilisés dans un plan climat dédié, entre les prêts et les investissements (6,3 Md€).
11,1 Md€ pour l’habitat et de la construction
La Caisse des dépôts va concentrer la moitié de sa capacité d’investissement vers le secteur du logement. Elle va ainsi poursuivre son plan logement lancé en 2018 grâce auquel les fonds propres des organismes de logement social seront renforcés via notamment l’acquisition par la Caisse de titres participatifs. 900 M€ soutiendront ainsi les organismes de logement social. Conséquence de la crise du Covid-19, une attention particulière sera portée aux publics prioritaires, dits « travailleurs clés », comme les soignants. Un plan dédié de 5000 logements sera ainsi déployé avec un ciblage particulier du personnel soignant.
Pour accélérer la construction de logements neufs sociaux, intermédiaires et abordables, sa filiale CDC Habitat sera dotée de pas moins de 8,3 Md€ de fonds propres. Il s’agira de mettre en œuvre son programme exceptionnel d’acquisition d’ici fin 2020 de 40 000 logements annoncés fin mars. S’y ajoutera la construction de 6300 logements sociaux en Outre-mer.
Son action en faveur de la politique de la ville passera à travers le développement du programme Action Coeur de Ville, le NPNRU (nouveau programme nationale de rénovation urbaine) et la réhabilitation des copropriétés dégradées. « Nous allons contribuer au programme du gouvernement d’accélérer la rénovation urbaine avec un axe important pour nous concernant la rénovation des copropriétés dégradées », indique Eric Lombard.
8,3 Md€ pour sécuriser les entreprises et investir
La Banque des Territoires et sa filiale Bpifrance ont déjà annoncé en mai dernier le « plan tourisme » de la Caisse des dépôts pour amorcer la reprise et accompagner les professionnels. Autre axe : favoriser la relocalisation des entreprises dans les territoires. Cela passe notamment par un apport d’un Md€ de la CDC au programme Territoires d’industries ou l’extension de la couverture très haut débit des zones peu denses (objectif de 2,6 millions de raccordements en 2020 et de huit millions de locaux raccordés fin 2022).
Il s’agit aussi de redynamiser les centres villes en soutenant la reprise des petits commerces avec la création de 100 foncières pour un objectif de 6000 commerces accompagnés d’ici cinq ans, un programme lancé par la Banque des territoires avec 300 M€. « 30 projets de foncières ont déjà été initiés, indique Olivier Sichel. La démarche se fera ici en direct avec les collectivités, en s’insérant dans des structures déjà existantes comme des Sem par exemple. La Caisse restera un actionnaire minoritaire des foncières. L’objectif est d’associer également des opérateurs privés ». A noter que ces foncières pourront parfois être mixes en faisant aussi de l’habitat.
Par ailleurs, la Caisse mobilisera ses gestions d’actifs pour assurer son rôle d’investisseur de long-terme, notamment en réabondant ou relançant des fonds Nov’ de nouvelles générations pour les PME et ETI dans le secteur de la santé.
500 M€ pour la cohésion sociale
Tous les moins de 25 ans, sans qualification, auront accès via MonCompteFormation, plateforme développée par la Caisse des dépôts, à une formation intégralement financée par le service public d’ici fin 2020. Objectif : 100 000 formations qualifiantes ou préqualifiantes dans les métiers d’avenir, notamment dans le numérique (5000 formations certifiantes au numérique en 2020 puis 10 000 en 2021).
Par ailleurs, des moyens seront consacrés au financement des hôpitaux publics mais aussi pour rénover et investir dans les Ehpad. Objectif : la construction ou la rénovation de 400 Ehpad (15 000 places), avec à la clé 6500 emplois induits.
Philippe Pottiée-Sperry