Relance et transition écologique : mode d’emploi des nouveaux CRTE

Philippe Pottiée-Sperry
Image

Une circulaire sur l’élaboration des nouveaux contrats territoriaux de relance et de transition écologique (CRTE), signée du Premier ministre et datée du 20 novembre, a été envoyée aux préfets de régions et de départements.

Partager sur

Afin de simplifier mais aussi d’unifier les dispositifs existants, il n’y aura désormais plus que deux niveaux de contractualisation : les contrats de plan État-région (CPER) et les CRTE pour tous les autres niveaux de collectivités. Les CRTE ont vocation à remplacer et regrouper les nombreux contrats existants, comme les contrats de ville, les contrats de ruralité ou les CTE (contrats de transition écologique). Le gouvernement souhaite que chaque territoire « soit accompagné pour décliner, dans le cadre de ses compétences, un projet de relance et de transition écologique à court, moyen et long terme, sur les domaines qui correspondent à ses besoins et aux objectifs des politiques territorialisées de l'État ».

Un calendrier serré

Le Premier ministre demande aux préfets d’engager au plus vite la formalisation des nouveaux CRTE qui s’appuient sur le triptyque transition écologique, développement économique et cohésion territoriale. Tous les territoires doivent être couverts par un CRTE, signé ou sur le point de l'être, d'ici le 30 juin 2021. Les contrats seront co-signés par le représentant de l'État et les élus locaux, en associant, dans la mesure du possible, les régions et les départements, qui pourront être parties prenantes au contrat. De même, ils peuvent associer les opérateurs de l'État (Anah, Ademe, Cerema), la Caisse des dépôts et les chambres consulaires.

Sur la durée du mandat municipal 2020-2026, le CRTE a vocation à traiter l'ensemble des enjeux du territoire, dans une approche transversale et cohérente, notamment en matière de développement durable, d'éducation, de sport, de santé, de culture, de revitalisation urbaine, de mobilités, de développement économique, d'emploi, d'agriculture, d'aménagement numérique. « Les projets portés dans le cadre de ces contrats devront être économes en foncier et en ressources et améliorer l'état des milieux naturels, afin de s'inscrire dans les engagements nationaux (stratégies bas-carbone et biodiversité) », précise la circulaire.

Périmètre à déterminer d’ici le 15 janvier

Le périmètre des CRTE ne peut être inférieur au niveau intercommunal, ni supérieur au niveau départemental. Sauf exception, les intercommunalités sont donc « l'échelle à privilégier pour la signature des CRTE et ce, même si la maîtrise d'ouvrage des projets inscrits dans le contrat, publique et/ou privée, est diversifiée (communale, intercommunale, départementale, régionale ou nationale) », indique la circulaire. Si la signature du contrat se fait à l'échelle d'une ou plusieurs intercos, les projets ou actions pourront ainsi être portés en maîtrise d'ouvrage par des communes, notamment sur leur propre patrimoine, ou par d'autres acteurs publics et privés. Les préfets ont jusqu’au 15 janvier pour faire remonter à l’ANCT (Agence nationale de la cohésion des territoires) les périmètres retenus, déterminés en concertation avec les élus.

Dans un délai maximum de six mois, le projet de territoire, incluant la stratégie de transition écologique et de cohésion du territoire ainsi qu’un plan d'actions doivent être arrêtés. Les CRTE déclineront, secteur par secteur, les priorités d'action et les projets du territoire pour conduire « une démarche de transformation à moyen-long terme, en mobilisant dans la durée les moyens des différents partenaires publics et privés ». Ils devront aussi traduire la manière dont les moyens du volet territorial du CPER se déclineront concrètement dans le territoire sous contrat.

Diagnostic préalable très précis

Pour signer un CRTE, il faut établir au préalable un diagnostic partagé, avec des indicateurs précis pour mesurer l'atteinte des objectifs déterminés en commun. Ces travaux pourront s'appuyer sur le projet d'aménagement et de développement durable (PADD) élaboré par la collectivité signataire, lorsqu'il existe. Toutes les actions inscrites dans le CRTE doivent respecter les orientations du gouvernement sur la transition écologique (lutte contre l'artificialisation des sols, accompagnement des nouvelles pratiques agricoles et des circuits courts, développement des mobilités douces, rénovation énergétique des bâtiments, développement de l'économie circulaire, préservation de la biodiversité et de la ressource en eau, promotion des énergies renouvelables…).

Une annexe de la circulaire dresse une liste complète d’items très précis (nombre de km de pistes cyclables, estimation du volume de produits phytosanitaires utilisés, taux de mobilisation des droits à construire au regard des documents d'urbanisme, taux de fuite des réseaux d’eau…) pour dresser le bilan écologique du territoire avec des objectifs concrets et mesurables pour l'améliorer.

Les moyens financiers apportés par l'État

Les CRTE doivent formaliser les concours financiers de l'État aux collectivités : moyens financiers du plan de relance, dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), autres dotations des ministères... Ils pourront être abondés en crédits par le volet territorial des fonds européens et des CPER, dont ils sont censés être une déclinaison directe. Les concours de l'État sont dotés de moyens renforcés sur les deux premières années de déploiement des CRTE, dans le cadre du plan de la relance, indique la circulaire. L'instruction du 30 juillet dernier relative à la part exceptionnelle de la DSIL et à l'accompagnement de la relance dans les territoires en précise le cadre d'emploi. Pourront s’y ajouter les crédits de la part exceptionnelle de la DSIL (1,046 Md€) et ceux de la DTER (5 70 M€).

Ingénierie et animation

La circulaire indique qu’en matière d'ingénierie et d'animation, les CRTE permettront de mutualiser les moyens déjà mobilisés par les partenaires dans les différents contrats et programmes intégrés, comme Action cœur de ville ou Petites villes de demain. S'agissant des collectivités dont les capacités ne sont pas suffisantes, notamment en matière de transition écologique, elles pourront bénéficier d'un cofinancement de poste de chef de projet contractualisation dans le cadre du volet territorial du CPER ou d'un appui de l'ANCT en activant ses marchés nationaux d'ingénierie. L'Ademe pourra aussi, à travers ses actions territoriales, apporter des financements sur des postes d'ingénierie ou d'animation. De plus, les crédits du FNADT (fonds national d'aménagement et de développement du territoire) peuvent, « si nécessaire », contribuer au financement de l'ingénierie et de l'animation des projets de territoire à l'échelle de chaque contrat.

Satisfaction de l’AdCF

Sans surprise, l’AdCF (Assemblée des communautés de France) se félicite « de l’ambition et de la méthode » et salue ces nouveaux contrats qu’elle réclame depuis plusieurs années. Lors d’un échange avec Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires, le président de l’AdCF, Sébastien Martin, a souhaité « une refondation en profondeur des relations contractuelles entre l’Etat et les territoires ». Les contrats dits « intégrateurs » doivent, pour l’AdCF, permettre de réduire la prolifération des appels à projets nationaux et la mise en concurrence des territoires. « Ils doivent mettre fin à la superposition de multiples contrats ou programmes mal coordonnés sur le terrain », ajoute-t-elle. « Ce n’est pas d’un contrat de plus dont nous avons besoin, mais d’une contractualisation plus globale, pluriannuelle, appuyée sur nos projets de territoire. Il faut sortir de l’action publique en miettes. C’est l’ambition que porte le nouveau dispositif et nous nous y retrouvons pleinement », s’est réjoui Sébastien Martin. L’AdCF plaide pour que les futurs CRTE soient « les vecteurs d’une attribution beaucoup plus efficace et équitable des financements ». Et d’insister sur l’effet levier qu’ils peuvent avoir sur la commande publique du bloc communal (plus de 50% de la commande publique nationale), « ce qui nécessite de territorialiser les crédits et d’encourager la réalisation de plans de relance locaux ».

Philippe Pottiée-Sperry

👉 Découvrez le dernier numéro de ZePros Territorial

👉 Abonnez-vous gratuitement au journal numérique et à sa newsletter

Philippe Pottiée-Sperry
Partager sur

Inscrivez-vous gratuitement à nos newsletters

S'inscrire