Sept propositions pour répondre à l’exclusion énergétique et sanitaire

Philippe Pottiée-Sperry
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Alors que le confinement a été, pour la plupart d’entre nous, synonyme de protection, il n’est pour beaucoup qu’une source de mal-être, d’insécurité et de dégradation de la santé. La pandémie du Covid-19 a creusé les inégalités face à la santé et exacerbe les multiples vulnérabilités de ceux qui sont en situation de précarité globale.

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Alors que les initiatives sociales et solidaires fleurissent, dans la veine des actions déployées par le gouvernement comme à tous les niveaux de territoires autour des maires, nous appelons à ce que les précaires énergétiques fassent l’objet à leur tour d’une attention particulière, et que celle-ci constitue l’un des axes principaux de la relance économique.

Rénovation de l’habitat, économies d’énergie, réduction des émissions carbone, amélioration de la qualité de l’air intérieur sont autant d’opportunités sociales, économiques, sanitaires et environnementales que nous devons saisir.

Confinement strict, précarisation réelle….

La population française a été confinée à domicile. La présence permanente de toute la famille dans le foyer a augmenté naturellement la consommation énergétique d’autant que les usages évoluent (chauffage en permanence, utilisation des équipements électroménagers, accroissement des usages du numérique) et dégradent les conditions sanitaires (principalement la qualité de l’air intérieur). Le nombre de Français en précarités va s’accroître malgré certaines mesures exceptionnelles décidées par le gouvernement. De nouveaux exclus s'ajouteront aux plus de sept millions de Français déjà concernées (1). Anticiper l’explosion des coûts liés à la précarité passe par une mobilisation à même de synchroniser les dispositifs existants et de mettre en synergie les priorités politiques.

Résorber la fracture énergétique et protéger la santé, ensemble !

Réunis dans le collectif STOP Exclusion énergétique (2), les organisations de la solidarité, des territoires et de l’économie, engagées dans la lutte contre la précarité énergétique œuvrent à l’élaboration de solutions. Elles appellent dans le contexte actuel de refondation de notre modèle de société à :

1/ Augmenter et coordonner les moyens des structures publiques (ANAH, ADEME, CCAS…) et des autres opérateurs dans chaque territoire ; leur permettre de financer 100 % des travaux.

2/ Accélérer la production de Certificats d’économie d’énergie (CEE) par l’ouverture de nouveaux programmes. Stabiliser les objectifs sur le long terme, en donnant de la lisibilité sur une « cinquième période » ambitieuse. Élargir l’obligation à d’autres filières professionnelles.

3/ Déployer à grande échelle des « Ensembliers solidaires », experts à la fois de l’accompagnement social et de la gestion de travaux (capables d’accompagner de bout en bout la rénovation chez les grands précaires).

4/ Favoriser le développement et la massification de solutions innovantes (3) notamment numériques, pour le suivi, le pilotage et l’optimisation des consommations.

5/ Répondre à l’urgence actuelle par le versement immédiat d’un chèque énergie spécial confinement. A moyen terme opter pour la création d’un chèque énergie-santé qui donnerait à la fois plus de lisibilité et d’efficacité des moyens alloués et aiderait les ménages avec des solutions d’accompagnement sur le long terme (4).

6/ Donner la liberté aux entreprises de s’acquitter de leurs obligations vis-à-vis du climat en réaiguillant localement la compensation carbone de leurs activités (« Label bas carbone »).

7/ Renforcer les garanties financières nécessaires aux acteurs économiques (artisans, fournisseurs, maîtres d’œuvres, structures de l’ESS, établissements financiers).

Une nouvelle mobilisation générale contre les exclusions

Alors qu’une réflexion est en cours sur le plan de relance d’après-crise, nous sommes convaincus que nous ne pourrons construire une société résiliente qu’en combattant les inégalités. La lutte contre la précarité énergétique et sanitaire doit être une question prioritaire et transversale au service de la sécurité des territoires et de la transition écologique et solidaire. Nous procédons collectivement en appelant à plus de moyens financiers certes mais avec une réelle cohérence d’action et d’accompagnement. L’emploi profitera à plein régime d’une telle approche et constituera un indicateur privilégié en parallèle du nombre de familles accompagnées. L’équation ne peut être que positive puisque quand les conditions de vie des personnes précaires s’améliorent, la santé, l’environnement et l’économie en bénéficient. L’exclusion énergétique et sanitaire, comme le non-respect des règles écologiques, n’ont plus leur place sur nos territoires (5). Chacun.e devrait pouvoir vivre en confort et en sécurité dans son logement.

Signataires de la tribune : ici

(1) Les chiffres varient entre 7 et 12 millions de précaires énergétiques, 7 millions étant le chiffre de référence pour l’ONPE

(2) Scénario Sortir 1 million de personnes par an de la précarité énergétique : www.stopexclusionenergetique.org

(3) Trophées de l’innovation pour la précarité énergétique : www.lab-stopexclusionenergetique.org

(4) D’ores et déjà, l’État va financer pour plus de 700 millions de « chèques énergie » en 2020

(5) Territoires Triple zéro, zéro exclusion, zéro pauvreté, zéro carbone (par Acted au niveau mondial)

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Philippe Pottiée-Sperry
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