Danièle Licata

3 Minutes / 3 Questions dans les conditions du Direct avec Irène Félix

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Irène Félix, présidente de la communauté d’agglomérations de Bourges Plus

Zepros Territorial vous emmène chaque semaine avec France Climat à la rencontre d’un élu de France. Un format direct, rapide et percutant pour découvrir les défis, réussites et visions de femmes et d’hommes engagés. Invitée cette semaine, Irène Félix, présidente de la communauté d’agglomérations de Bourges Plus, vice-présidente du comité de bassin Loire-Bretagne et vice-présidente du Pôle d'Equilibre Territorial et Rural Centre-Cher (PETR). En 3 minutes chrono, elle partage ses projets marquants, ses petites frustrations et ses grandes ambitions pour sa commune. Un échange sans détour, à ne pas manquer ! 
 

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Vous avez mené plusieurs projets au cours de votre mandat. De quel projet abouti êtes-vous le plus fier ?

Je pense que le projet le plus emblématique reste la gratuité des bus sur l'agglomération de Bourges. Ce n'est pas seulement le fait de rendre les transports gratuits qui est marquant, mais d'avoir réussi à étendre et améliorer l'offre dans le même temps, notamment vers les secteurs périurbains et ruraux. Aujourd'hui, la fréquentation des bus a quasiment doublé par rapport à l'époque précédente. C'est la preuve que nous avons su proposer une mobilité pour tous, qui répond aux besoins du quotidien, qu'ils soient professionnels, personnels ou de loisirs. C'est un vrai changement de paradigme dans la manière d'appréhender les déplacements.

Constatez-vous un report modal significatif ?

Oui. Les enquêtes menées montrent que 30 % des utilisateurs actuels ne se seraient pas déplacés sans la gratuité. Nous avons ainsi permis à une partie de la population, souvent les plus fragiles, de retrouver de la liberté de mouvement, pour le travail, les loisirs ou les liens familiaux. De plus, 30 % des usagers ont laissé leur voiture au profit du bus, ce qui est un signal très fort en faveur d'une mobilité plus durable. Ce succès est aussi le fruit d'une stratégie de financement solide : grâce à l'augmentation du taux du versement mobilité, nous avons pu compenser la gratuité, améliorer l'offre (notamment vers les zones d'activités) et investir dans des infrastructures (carrefours, navettes à haut niveau de service, etc.).

Y a-t-il un projet abouti qui vous laisse malgré tout un goût d’inachevé ?

Oui, celui de la qualité de l'eau. C'est un dossier sur lequel nous avons beaucoup travaillé, en particulier sur la protection des captages. Mais les menaces sont nombreuses, et les outils juridiques à notre disposition trop faibles. Nous devons négocier avec les agriculteurs et les propriétaires fonciers, sans véritable levier coercitif. Même sur les captages prioritaires, les mesures sont bloquées ou freinées par l'État, qui hésite à imposer des contraintes au monde agricole ou industriel. Pour moi, c'est un dossier qui, pour aboutir, nécessite à la fois de la volonté politique, un engagement fort de l’État, et une évolution de la loi. Or les dernières annonces nationales sur ce sujet préfigurent plutôt des reculs que des avancées.

Redoutez-vous des conséquences sanitaires ?

Oui, très clairement. Si nous n'améliorons pas la qualité de l'eau, nous devrons renoncer à certaines masses d'eau pour l'alimentation, faute de niveau de qualité suffisant. Cela signifie des difficultés croissantes d'approvisionnement. Mais au-delà de la quantité, c'est la santé des populations qui est en jeu. Nous savons de plus en plus de choses sur les polluants dits « éternels », sur les substances chimiques et leurs effets. Si nous ne faisons rien aujourd'hui, que diront les décideurs publics dans 10 ou 20 ans ? J'utilise de plus en plus cet argument, parce qu'on ne peut pas dire que l'on ne savait pas. Et je crains que certains aient à répondre de leur inaction devant la justice dans quelques années.

Quel projet marquera votre mandat ?

Trois projets structurants. Le premier : la redynamisation du pôle défense à Bourges. Nous assistons à un retour industriel fort, dans un secteur crucial pour notre souveraineté nationale. Deuxième événement marquant : l'obtention du titre de Capitale européenne de la culture pour 2028, qui va entraîner une transformation de notre territoire, tant sur le plan culturel qu'économique, en stimulant l'éducation artistique, la création et l'accueil touristique. Enfin, j'ajouterais un projet que nous avons voulu et portés de toutes nos forces : l'expérimentation "Territoire zéro chômeur de longue durée", appliquée à un quartier. Il permet à des personnes privées d'emploi parfois depuis des décennies, de retrouver une place dans la société. C'est un projet d'inclusion qui honore notre territoire.

Redoutez-vous une tension sur le logement ?

Oui, d'autant que les projets de défense et culture vont attirer de nouvelles populations. C'est un défi que nous anticipons déjà, notamment via la rénovation de l'habitat ancien, la reconquête des friches, et un travail de fond sur le logement social et intermédiaire. Nous devons penser le logement comme un levier de transition écologique, économique et sociale.

Un mot de conclusion ?

Tous ces projets ont un point commun : ils s'inscrivent dans une logique de transition. Qu'elle soit écologique, sociale, économique ou culturelle, cette transition est au cœur de notre action. Bourges montre qu'une ville moyenne peut être innovante, inclusive et ambitieuse. Rien n'est joué, mais beaucoup est déjà engagé.

 

Danièle Licata
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