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Agressions d’élus locaux : demande de mesures rapides

Philippe Pottiée-Sperry
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Depuis le début de l’année, 233 maires et adjoints ont été agressés contre 198 à la même période, en 2019, selon l’AMF qui « condamne fermement » ce phénomène.

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Depuis début juillet, cinq nouvelles agressions d’élus se sont produites. Le 4 août, Philippe Becheau, le maire de Saint-Philippe d’Aiguille (Gironde, 418 habitants), a été roué de coups lors d’une intervention contre du tapage nocturne, nécessitant une hospitalisation. « Ces faits et ces violences sont inadmissibles », a réagi le Premier ministre, Jean Castex. Les choses n’ont pas trainé car, dès le 14 août, le tribunal correctionnel de Libourne condamnait le jeune homme de 26 ans, auteur de l’agression, à douze mois de prison dont six assortis d’un sursis probatoire.

Fin juillet, l’AMF a « exigé » qu’une réponse pénale soit systématiquement apportée à l’encontre des auteurs de tels actes et réitéré sa disponibilité pour participer aux côtés de l’Etat et des autres acteurs institutionnels, à « l’élaboration rapide de mesures visant à conforter l’autorité des élus ».

Une réunion avec le gouvernement à la rentrée

Eric Dupond-Moretti, le ministre de la Justice, semble avoir entendu le message. Il s’est entretenu le 13 août avec chacun des présidents des associations d’élus pour « leur assurer qu'il était pleinement conscient des problèmes qu’ils rencontraient quotidiennement et notamment des agressions dont ils sont fréquemment victimes ». Il a rappelé la mise en œuvre d’une politique pénale de fermeté en répression des actes commis à l’encontre des élus, dans le prolongement de l’instruction générale déjà adressée le 6 novembre 2019. Un discours pas suffisant pour certains. Le jour même, Christophe Bouillon, président de l’APVF (association des petites villes de France), a ainsi affirmé que « les textes législatifs existent, il suffit de les appliquer fermement et systématiquement ».

Par ailleurs, le ministre de la Justice dit vouloir renforcer le dialogue entre les élus locaux et les procureurs de la République, et donner toute sa portée aux dispositions de la loi « Engagement et Proximité » du 27 décembre 2019. Il a aussi dit aux présidents des associations qu'il organiserait avec eux à la rentrée une réunion de travail sur ce sujet, avec également Gérald Darmanin et Jacqueline Gourault, ministres de l’Intérieur et de la Cohésion des territoires. Cette réunion aura lieu le 2 septembre en présence du Premier ministre Jean Castex.

Une enquête lancée par l’AMIF

Dans un communiqué publié mi-août, l’APVF a estimé que malgré les avancées de la loi « Engagement et Proximité », les maires des petites villes et des communes rurales « doivent être systématiquement aidés dans leurs démarches judiciaires afin de se sentir moins seuls en cas d’agression ». De même, l’association demande la prise en charge automatique des frais de justice des élus victimes de violence.

Pour sa part, l’AMIF (association des maires d’Ile-de-France) s’inquiète de l’aggravation de la situation. Le bureau de l’AMIF et son président Stéphane Beaudet se sont dits « particulièrement choqués et bouleversés par les agressions dont sont victimes de plus en plus d’élus locaux dans l’exercice de leurs fonctions » dans un communiqué du 12 août. « Cette nouvelle forme de délinquance pollue nos villes et nos villages. Ces agressions sont la conséquence de comportements délictueux, et du manque de moyens donnés aux élus dans l’exercice de leurs fonctions », déplore Stéphane Beaudet.

L’AMIF va lancer à la rentrée une enquête auprès des maires d’Ile-de-France afin de recueillir davantage d’éléments permettant de prendre précisément la mesure du phénomène dans cette région. L’enquête mesurera notamment le sentiment d’insécurité des maires dans l’exercice de leur fonction d’officier de police judiciaire. Elle recensera aussi les élus victimes de comportements agressifs dans le cadre de leurs fonctions.

Le Sénat défend ses recommandations

De son côté, la commission des lois du Sénat a également fermement condamné les agressions d’élus locaux et rappelé ses recommandations pour la sécurité des maires, adoptées dès octobre dernier. Celles-ci avaient été formulées sur la base d’une enquête nationale réalisée à la suite de la mort brutale du maire de Signes (Var), Jean-Mathieu Michel, le 5 août 2019. Le président de la commission des lois du Sénat, Philippe Bas, a écrit au Premier ministre pour lui transmettre les recommandations sénatoriales. Selon lui, « ces actes de violence mettent en lumière l’insécurité à laquelle les maires continuent d’être confrontés dans l’exercice de leurs missions quotidiennes. Ils s’inscrivent dans un climat de contestation croissante de l’autorité des représentants de l’État ». Et d’ajouter : « La République ne peut les laisser seuls face aux risques auxquels leur fonction les expose. Elle doit conforter les moyens d’action mis à leur disposition pour assurer la paix publique et mieux les protéger dans l’exercice de leurs fonctions ». Philippe Bas rappelle que si une partie des recommandations sénatoriales ont été reprises dans la loi « Engagement et Proximité » ou dans des instructions données aux procureurs et aux préfets pour mieux accompagner et soutenir les maires, « une partie essentielle des propositions est restée sans suite à ce jour ». Il plaide ainsi pour mettre en place, dans chaque préfecture, un dispositif d’accompagnement systématique des maires agressés. Parmi les autres demandes : accorder systématiquement la protection fonctionnelle aux élus victimes de violences, de menaces ou d’outrages, sans qu’il soit besoin d’une délibération préalable du conseil municipal ; mieux accompagner les maires dans l’exercice de leurs pouvoirs de police, par une meilleure formation, un soutien juridique renforcé des services déconcentrés de l’État et une police municipale rénovée ; élargir la possibilité pour les policiers municipaux de dresser des amendes forfaitaires (ou timbres-amendes), pour les infractions aux arrêtés de police municipale aisément caractérisables, dont la constatation ne nécessite pas d’actes d’enquête.

Philippe Pottiée-Sperry

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