
Les maires, derniers bastions de la confiance démocratique

Réalisée auprès de 6 034 électeurs français entre le 16 et le 23 juin 2025, l’enquête CEVIPOF pour l’AMF, menée par Ipsos, dresse un état des lieux précis des perceptions et attentes des citoyens à l’approche des élections municipales de 2026. Elle interroge la relation des Français à leur maire, leur cadre de vie, leur environnement institutionnel et leur niveau d’engagement local. L’enquête réaffirme la place du local comme un espace où l’efficacité de l’action publique est attendue, et les maires comme les élus préférés des Français, qui se sentent plus engagés dans leur commune qu’ailleurs.
Dans un climat politique marqué par la défiance, le maire résiste. Avec 69 % de confiance, il reste « la figure politique bénéficiant du plus haut niveau de confiance », loin devant les élus nationaux. Une constante observée depuis plus de dix ans, malgré les crises. Ce crédit repose avant tout sur deux qualités : l’honnêteté (61 %) et la capacité à tenir ses engagements (50 %).
Comme le note Martial Foucault, directeur du CEVIPOF, « la demande de probité, d’exemplarité et d’éthique dans la fonction est non seulement perçue comme la condition sine qua non de la confiance, mais elle s’impose pour l’ensemble des maires quelle que soit la taille de la juridiction ». Dans ce contexte, la proximité n’est pas l’unique levier de confiance : seul un Français sur trois cite le lien de proximité comme déterminant, et à peine 20 % ont déjà pris contact avec leur maire ou son équipe.
Un maire apprécié… mais observé de près
Près de trois Français sur quatre (73 %) se déclarent satisfaits de l’action de leur municipalité. Un chiffre stable depuis 2019. Ce satisfecit est plus marqué dans les petites communes, où l’image du maire bâtisseur domine : 71 % des sondés affirment que leur maire a conduit des réalisations importantes depuis 2020.
Les citoyens attendent aussi du maire qu’il soit porteur d’une vision. 71 % estiment qu’il a des projets pour l’avenir, et 58 % souhaitent sa réélection. Mais cette reconnaissance n’équivaut pas à un blanc-seing. L’enquête fait émerger un portrait exigeant de l’élu local idéal : il doit être « présent sur le terrain » (67 %), « efficace » (64 %), « accessible » (63 %), et surtout « irréprochable dans l’utilisation de l’argent public » (63 %).
À ces qualités s’ajoute une attente forte en matière de méthode. Le maire doit « représenter fidèlement les aspirations des citoyens » (87 %), « mettre en œuvre son programme » (85 %), « assurer la transparence des débats » (83 %) et « créer du consensus avant les décisions » (74 %). Il est aussi attendu comme médiateur, une fonction en hausse de 7 points depuis 2019.
Engagement citoyen : une énergie disponible, mais diffuse
Malgré cet attachement à la démocratie locale, seuls 14 % des sondés participent réellement à la vie de leur commune. Un chiffre en recul. En revanche, 23 % se disent prêts à s’engager, et 35 % aimeraient le faire mais manquent de temps. Ce sont donc près de trois Français sur quatre qui, en théorie, sont ouverts à l’implication locale.
Les formes d’engagement souhaitées sont variées : associations culturelles (32 %), solidarité (31 %), collectifs citoyens (29 %), sport (24 %) ou conseil municipal (24 %). Les petites communes restent les plus dynamiques : « Avec 31 % de personnes prêtes à s’investir dans le conseil municipal, c’est la confirmation que la vitalité démocratique municipale résiste », résume l’étude.
Des attentes précises pour les municipales de 2026
Interrogés sur leurs priorités pour le prochain mandat, les Français placent en tête la sécurité (43 %, +9 points par rapport à 2019), suivie de la transition écologique (38 %, en baisse de 9 points), du maintien des services publics de proximité (38 %), de l’attractivité économique (28 %) et des transports (26 %). Ces attentes varient selon la taille des communes : la sécurité domine dans les grandes villes, tandis que l’environnement prime dans les plus petites.
Quant aux critères de vote, ils se structurent autour du programme (84 %), du bilan (79 %) et de la personnalité du maire (79 %). L’étiquette politique, en hausse (61 %, +8 points depuis 2019), devient plus déterminante dans les villes de plus de 10 000 habitants. Ce glissement traduit une polarisation croissante du débat local.
La commune, un havre d’optimisme modéré
La note moyenne d’optimisme quant à l’avenir de sa commune s’établit à 5,7/10, stable depuis 2019. Les optimistes sont deux fois plus nombreux que les pessimistes (28 % contre 13 %). Ce sentiment est fortement lié à la perception du territoire : 65 % des pessimistes estiment vivre dans une commune en difficulté, contre seulement 28 % des optimistes.
Ce relatif optimisme cohabite avec une vive inquiétude : 87 % des sondés se disent préoccupés par la montée de la violence dans la société. Mais seulement 47 % pensent que cette violence s’est accrue « là où ils habitent ». Cette perception varie selon la taille de la commune : elle n’est partagée que par 7 % dans les villages, contre 33 % dans les métropoles.
Un message clair pour 2026
La nouvelle enquête CEVIPOF-AMF confirme que la démocratie locale résiste. Les maires sont jugés crédibles, honnêtes et engagés, mais sous conditions. Leur légitimité repose sur la probité, la proximité, la capacité à incarner l’intérêt général et à créer du lien. Le maire reste un acteur central, mais sous le regard exigeant d’une population lucide.
Comme le résume la note : « La démocratie locale n’est pas en crise, mais elle demande à être nourrie, respectée, écoutée. » Les municipales de 2026 se joueront à cette échelle : celle de la confiance méritée, plus que donnée.
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