Améliorer et moderniser la formation des élus locaux
Malgré la loi de 1992 qui les y oblige, 62% des communes n’ont pas inscrit de dépense de formation de leurs élus dans leur compte de 2018.
Pour améliorer et moderniser le dispositif, la loi « Engagement et Proximité » du 27 décembre 2019 a prévu, via des ordonnances, de mieux cerner le champ des formations nécessaires, de permettre aux élus d’accéder, tout au long de leur vie, à une offre de formation plus développée et mieux articulée avec le compte personnel de formation, de faciliter leur accès à la formation, de clarifier les dispositifs existants, d’en mutualiser les financements, et d’assurer la transparence et la qualité des dispositifs de formation en renforçant le contrôle des organismes qui les dispensent. Une bonne année plus tard, la crise sanitaire expliquant ce retard, Jacqueline Gourault, la ministre de la Cohésion des territoires, a présenté au conseil des ministres du 17 février un projet de loi ratifiant les deux ordonnances des 20 et 27 janvier 2021 réformant la formation des élus locaux. Le gouvernement a engagé une procédure accélérée pour l’examen de ce texte qui a été déposé au Sénat. Les deux ordonnances, dont la plupart des dispositions entreront en vigueur dès le 1er janvier 2022, veulent consolider et améliorer les dispositifs de formation des élus locaux. Objectif : garantir une offre de formation « rigoureuse », conforter le dispositif de financement des formations par les collectivités et pérenniser le droit individuel à la formation (DIF) financé par des cotisations des élus.
Conforter le DIF
Concernant le DIF, cette réforme conduira à la création d’un espace dédié aux élus dans la plateforme numérique « moncompteformation.gouv.fr » et l’octroi de droits libellés en euros et non plus en heures, ce qui devrait permettre aux élus d’opter pour le meilleur rapport qualité/prix. Le recours au DIF pour financer des formations de reconversion est dorénavant réservé aux élus n'ayant pas liquidé leurs droits à pension. Elle offre aux élus la possibilité de participer au financement de formations organisées au titre de leur DIF d'élu local, en mobilisant les droits à formation dont ils disposent au titre de leur parcours professionnel ou leurs fonds personnels. Seules y sont éligibles les formations liées à la réinsertion professionnelle de l'élu. Par ailleurs, l'ordonnance veut moderniser le recouvrement et le fonctionnement du fonds du DIF des élus locaux via un prélèvement à la source des cotisations des élus. Elle prévoit également que le Conseil national de la formation des élus locaux (CNFEL) s'assure de l'équilibre financier du DIF, et formule des propositions, si nécessaire, pour le rétablir. Ces propositions peuvent notamment porter sur la valeur des droits que les élus acquièrent, sur le montant de leurs cotisations ou sur les conditions de prise en charge des formations.
Favoriser les mutualisations
S’agissant du financement par les collectivités, les communes qui le souhaitent et leurs intercommunalités pourront mutualiser tout ou partie de l’organisation et du financement de la formation de leurs élus. Chaque EPCI doit se prononcer, six mois après son renouvellement, sur la possibilité de proposer des outils communs afin de contribuer au développement de la formation des élus des communes membres. Ces outils communs sont laissés à la discrétion de l'EPCI, tout comme leur contenu, mais doivent viser uniquement les formations liées à l'exercice du mandat, que celles-ci soient organisées à l'initiative des communes ou des élus via leur DIF.
L'ordonnance introduit également des dispositions propres à moderniser le recouvrement et le fonctionnement du fonds du DIF des élus locaux via un prélèvement à la source des cotisations des élus, et donne à la Caisse des dépôts la possibilité de procéder à une avance de trésorerie au profit du fonds.
Renforcement du rôle du CNFEL
Les deux ordonnances renforcent également les contrôles exercés sur les organismes de formation des élus locaux ainsi que la transparence de leur fonctionnement. Plusieurs dispositions visent à faciliter les cofinancements par les différents dispositifs existants et à consolider leur pérennité financière par le biais d’une nouvelle gouvernance.
Il est prévu de redéfinir et renforcer le rôle du CNFEL, composé d'élus locaux et de personnalités qualifiées. Il est chargé de formuler des avis sur les agréments des organismes, de se prononcer sur la mise en oeuvre du DIF, d'émettre des recommandations sur la formation des élus locaux afin d'en renforcer l'efficacité, d'en assurer la transparence et d'en garantir l'équilibre financier et de produire un rapport annuel sur la formation des élus. Son avis peut être sollicité par le gouvernement sur tout projet de texte relatif à la formation des élus locaux. L’ordonnance crée, auprès du CNFEL, un conseil d'orientation, regroupant des élus locaux, des experts et des personnalités qualifiées. Ce conseil sera chargé de formuler des propositions pour renforcer l'évaluation et la qualité des formations et de proposer un répertoire des formations liées au mandat.
Règles plus strictes pour l’agrément des organismes de formation
L'ordonnance redéfinit les règles et procédures liées à l'obtention d'un agrément, nécessaire pour organiser des formations au profit des élus locaux liées à l'exercice de leur mandat. L'obligation, pour chaque organisme de formation, de produire un rapport annuel sur son activité est introduite. En cas de manquement, l’agrément pourra être suspendu jusqu’à quatre mois, à titre conservatoire. Avant l'expiration de ce délai, et après avis du CNFEL, l’agrément pourra être abrogé. L’organisme ne peut alors pas en solliciter un nouveau durant un an.
De plus, les organismes de formation seront soumis, avec quelques adaptations, aux règles applicables aux organismes de formation professionnelle : déclaration en préfecture, règles de fonctionnement, contrôles, et certification qualité (seuls les organismes n'exerçant que dans le domaine de la formation des élus et bénéficiant de financements publics issus des collectivités et du DIF élus pour un montant global inférieur à un montant fixé par décret seront exempts de l'obligation de certification).
Suppression de l'agrément de droit des CAUE
Par ailleurs, l'ordonnance supprime l'agrément de droit dont bénéficiaient les CAUE, depuis la loi du 7 juillet 2016, car jugé « incompatible » avec les nouvelles procédures d’évaluation de la qualité des formations et de contrôle des organismes titulaires d'un agrément. Pour assurer la transition de l'ancien système de formation vers le nouveau régime mis en place, les élus locaux peuvent utiliser les droits individuels à la formation comptabilisés en heures qu'ils détenaient à la date de publication de l'ordonnance sous cette forme, dans la limite d'un délai de six mois.
Philippe Pottiée-Sperry
👉 Découvrez le dernier numéro de ZePros Territorial
👉 Abonnez-vous gratuitement au journal numérique et à sa newsletter