Covid-19 : prolongement de l’état d’urgence sanitaire jusqu'au 10 juillet
Le Parlement a adopté, le 9 mai, le projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet et complétant ses dispositions. Le texte, publié au Journal officiel du 12 mai, doit permettre la mise en place de la stratégie « protéger, tester, isoler ».
Le cadre juridique de ce nouvel état d’urgence est complété, pour l’adapter aux enjeux du déconfinement. Un nouveau système d'information pour lutter contre la propagation du Covid-19 est aussi envisagé.
Compte tenu de certaines dispositions, le Conseil constitutionnel a été saisi sur le texte par le président de la République et le président du Sénat, avec une décision rendue le 11 mai en fin de journée. Il a prononcé quelques censures partelles et émis plusieurs réserves concernant les mesures de mise en quarantaine, de placement en isolement des personnes ou de traçage des malades infectés par le Covid-19.
Réglementation des transports et de l’ouverture des ERP
La prolongation de l’état d’urgence de deux mois vise à prévenir la levée des mesures indispensables à la protection de la santé et à définir les modalités d’une reprise progressive des activités à compter du 11 mai, en adéquation avec l’évolution de la situation sanitaire. La loi adapte la réglementation des déplacements, des transports et de l’ouverture des établissements recevant du public (ERP) et des lieux de réunion, en vue du déconfinement. En pratique, le Premier ministre pourra réglementer par décret les déplacements, l’accès et l’usage des transports et l’ouverture des ERP (et non plus seulement limiter ou interdire). Objectif affiché : permettre la reprise progressive des déplacements, des transports en commun et des commerces, et les mesures nécessaires (port du masque...).
Adaptation de la responsabilité pénale des élus
Sur le sujet sensible de la responsabilité pénale, ayant divisé les parlementaires, les sénateurs l’avaient limité pour les élus locaux comme les employeurs publics et privés pour leurs décisions prises pendant l'état d'urgence. Leur amendement, voté contre l'avis du gouvernement, visait à éviter que la responsabilité pénale des élus soit engagée pour avoir exposé autrui à un risque de contamination, sauf si les élus avaient violé délibérément une obligation particulière de prudence ou de sécurité. Les députés l'ont supprimé en optant pour une solution qui complète la loi « Fauchon » du 10 juillet 2000 sur les délits non intentionnels mais en allant moins loin,. Leur amendement précise qu’« il est tenu compte, en cas de catastrophe sanitaire, de l’état des connaissances scientifiques au moment des faits ».
L’accord trouvé en CMP entre députés et sénateurs s'inscrit dans ce sens en permettant de tenir compte « des compétences, pouvoirs et moyens dont disposait l'auteur des faits éventuellement incriminé, dans la situation de crise justifiant l'état d'urgence sanitaire ». Durant cette période, alors qu'élus locaux et employeurs sont chargés de la mise en oeuvre de mesures qui leur sont imposées, leur responsabilité est donc réduite. La loi complète la loi « Fauchon » en précisant qu'il est tenu compte « des compétences, du pouvoir et des moyens dont disposait l’auteur des faits dans la situation de crise ayant justifié l’état d’urgence sanitaire, ainsi que de la nature de ses missions ou de ses fonctions, notamment en tant qu’autorité locale ou employeur ».
L’accès des plages à l’initiative du couple maire/préfet
Autre mesure de la loi : le prolongement de la trêve hivernale, également jusqu’au 10 juillet 2020. Concernant l’accès aux plages, aucune disposition n’est prévue, compte tenu de l’engagement pris par le gouvernement de « faire confiance au couple maire/préfet ».
La création d’un système d’information pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 doit s’effectuer « dans le parfait respect en matière vie privée et protection des droits et libertés fondamentaux », estiment les députés LREM. Il a été voté que les données à caractère personnel concernant la santé est réduite à six mois, et leur durée de conservation à trois mois après leur collecte. Le secret médical est garanti car il sera assuré par le seul médecin traitant. Par ailleurs, l’identité des personnes infectées ne pourra pas être transmise à un tiers, y compris à une personne contact, en l'absence d'accord expresse de celle-ci. De plus, la nécessité de l’avis conforme de la Cnil sur les projets de décrets a été rétablie.
Enfin, la loi instaure un « comité de contrôle de liaison sociétale » qui associera le Parlement (deux députés et deux sénateurs) et la société civile aux opérations de lutte contre l’épidémie pour le suivi des cas contact. Sa mission : évaluer l’apport réel des outils numériques à leur action et vérifier le respect des garanties qui entourent le secret médical et la protection des données personnelles.
Philippe Pottiée-Sperry