Filière socio-éducative : revalorisation de 183 € par mois à compter d’avril

Philippe Pottiée-Sperry
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Lors de la Conférence des métiers de l’accompagnement social et médico-social, qui s’est tenue le 18 février, le Premier ministre, Jean Castex, et le président de l’Assemblée des départements de France (ADF), François Sauvadet, ont annoncé « un engagement historique des pouvoirs publics » en faveur des professionnels de la filière socio-éducative. Concrètement, il leur est accordé une revalorisation de 183 € nets par mois, par équité avec les personnels soignants. Elle interviendra pour les rémunérations dues à compter du mois d’avril et devra être versée au plus tard en juin sur le bulletin de paie. « Il fallait mettre un terme à cette injustice et il fallait que le secteur du médico-social bénéficie des mêmes mesures financières et de la même reconnaissance que celles accordées initialement aux soignants », a indiqué François Sauvadet sur Twitter.

540 M€ en 2022 et 720 M€ en année pleine

Ces revalorisations bénéficieront aux professionnels de la filière socio-éducative des structures présentes dans le secteur non-lucratif (environ 140 000 équivalents temps plein, ETP). Leur coût s’élève à 540 M€ pour 2022 (720 M€ en année pleine), financées à hauteur de 360 M€ par l’État et la sécurité sociale d’un côté, et de 180 M€ par les départements de l’autre. Sont également concernés les personnels sous statut de la fonction publique exerçant des métiers de la filière socio-éducative (environ 30 000 ETP). L’État, la sécurité sociale et les départements « prendront la part qui leur revient au titre des structures qu’ils financent », précise le gouvernement.

Négocier une nouvelle convention collective unique

Par ailleurs, la conférence a convenu de la nécessité de soutenir la démarche des partenaires sociaux pour moderniser le cadre conventionnel dans la branche du secteur sanitaire et social (BASS) avec l’objectif de parvenir rapidement à la négociation d’une nouvelle convention collective unique. Il s’agit d’améliorer le recrutement dans ce secteur, alors qu’il est le quatrième employeur privé en France et que ses besoins vont augmenter fortement sous l’effet des départs en retraite et du vieillissement de la population. Cela doit permettre d’agir sur les débuts de carrière, de faciliter la mobilité des parcours professionnels, de mieux reconnaître les compétences acquises et de garantir ces mêmes droits à tous les professionnels actuellement pas couverts par cette protection conventionnelle.

Une contribution totale de 1,3 Md€

Une enveloppe supplémentaire de 500 M€ est prévue (380 M€ de l’État et 120 M€ des départements) pour s’assurer que les revalorisations dans le secteur non lucratif conduisent à une répartition de 70% pour l’État et la sécurité sociale, et 30% pour les départements. Au total, leur contribution pour les métiers de la filière socio-éducative s’élève à 1,3 Md€.

D’ici les mois d’avril, un comité des métiers socio- éducatifs doit être installé. Son objectif : « être le garant des ambitions portées pour la filière », s’agissant par exemple de la gestion prévisionnelle des effectifs dans ce secteur, de la rénovation de l’architecture des qualifications et des diplômes, ou de l’amélioration des outils de contractualisation pour améliorer la qualité du travail des professionnels et faciliter l’innovation.

Elaborer un nouveau référentiel de formation

Il a aussi été annoncé des actions concrètes rapides : un investissement de 120 M€ sur trois ans, pour la formation des professionnels et le renforcement de la validation des acquis de l’expérience (VAE). Le Premier ministre a demandé à Mathieu Klein, président du Haut conseil du travail social, d’élaborer un nouveau référentiel de formation des professionnels du travail social, intégrant notamment l’expertise des personnes accompagnées elles-mêmes. De plus, un plan d’amélioration de la qualité de vie au travail devra favoriser les conditions d’exercice de ces métiers avec un soutien par des actions de formations et des aides financières de la branche AT-MP (Accidents du travail – Maladies professionnels) (65M€).

Des revalorisations pour les « soignants oubliés »

Par ailleurs, des mesures de revalorisation ont été annoncés pour les « soignants oubliés », notamment les aides à domicile du secteur public. Il s’agit des soignants qui auraient dû relever du Ségur de la santé, mais « qui sont restés à l’écart des revalorisations en raison de l’éclatement des filières et des cadres statutaires ou conventionnels du secteur ». Ainsi sont concernés les 3000 médecins coordonnateurs des EHPAD (40 M€) qui, pour la plupart, ne relèvent pas de la fonction publique hospitalière. S’y ajoutent les médecins, sages-femmes et personnels soignants de la protection maternelle et infantile (60 M€ dont 30% par l’Etat). De plus, l’État « veillera » à ce que les soignants des structures de prévention, de dépistage ou d’accompagnement des personnes en grandes difficultés sociales soient également revalorisés (pas de montant précisé). Enfin, l’État, via la CNSA, prendra en charge pour moitié la revalorisation des 20 000 aides à domicile employés par les CCAS (40 M€), sur le modèle de l’avenant 43 de la branche de l’aide à domicile.

Réactions satisfaites mais attentes sur d’autres secteurs

Frédéric Bierry, président de la Collectivité européenne d’Alsace et vice-président de l’ADF en charge de la solidarité, de la santé du travail, se « réjouit de cet accord significatif » tout en précisant qu’il ne faut « pas exclure de nouvelles négociations au bénéfice des professionnels de la solidarité d’autres filières en contact direct avec les publics vulnérables ». Pour sa part, Chaynesse Khirouni, présidente du département de Meurthe-et-Moselle, salue « quelques avancées salariales » mais regrette « encore trop d’incertitudes ». Selon l’élue, « l’Etat est trop imprécis quant à son niveau de compensation des revalorisations prévues pour les agents des établissements publics accueillant des personnes handicapées, les agents du Réseau éducatif de Meurthe-et-Moselle relevant de la fonction publique hospitalière et les personnels soignants de la PMI ». Pour sa part, l’UNCCAS « se réjouit vivement de ces annonces » qui marquent « la juste reconnaissance des aides à domicile du secteur public (…) confrontés jusqu’ici à une profonde inégalité de traitement ». Mais l’association tient aussi à rappeler que « dans le domaine de l’accompagnement du grand âge, le travail de fond doit se poursuivre autour de ces métiers en tension confrontés depuis des années à un manque d’attractivité ».

Philippe Pottiée-Sperry

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