Les DG d’intercos prônent une "administration locale partagée"

Philippe Pottiée-Sperry
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L’ADGCF (Association des directeurs généraux des communautés de France) vient de publier, en partenariat avec Agora Territoires, une étude sur une administration locale unique. Loin d’être consensuelle chez les autres acteurs territoriaux, l’idée n’est pas nouvelle pour l'association qui affiche la volonté de « promouvoir une vision innovante et territoriale des politiques locales ».

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En 2016, l’ADGCF avait réalisé une enquête auprès de ses adhérents sur l’avenir du statut qui montrait une position très largement majoritaire : si 90 % d’entre eux ne souhaitaient pas la disparition pure et simple du statut, ils souhaitaient néanmoins « sa profonde modernisation ». L’association s’appuie aussi sur les récentes réformes territoriales (loi Maptam, loi NOTRe…) comme sur les diverses expériences de mutualisation des services menées durant la période 2010-2019. Son constat : « le moment est choisi pour amorcer un changement de paradigme dans la perception de nos organisations territoriales ».

Collectivités de moins de 50 agents

L’étude s’appuie sur le retour d’expérience de plusieurs intercos pionnières comme la communauté d'agglomération du Sicoval (Haute-Garonne), Loire Forez agglomération (Loire) ou la communauté de communes Mad et Moselle (Meurthe-et-Moselle et Moselle). Un des arguments forts de l’ADGCF s’appuie sur le constat de petites collectivités de moins de 50 agents qui regroupent pas moins de 70 % de l’ensemble, pour à peine 15 % des agents. Ce « saucissonnage des organisations humaines ne correspond plus, ni à l’efficience de l’action publique, ni aux aspirations des agents », affirme l’étude. Et de s’interroger : « comment peut-on sérieusement envisager de mener une véritable politique de RH sur un territoire, lorsque la collectivité occupe moins de 50 agents, dont en général un seul d’entre eux gère les RH et en général uniquement sur les fonctions liées à la paie ? ».

Un employeur unique

Cette conception nouvelle, d’ores et déjà testée par quelques territoires, consiste à faire de l’intercommunalité l’employeur unique de l’ensemble des agents du périmètre intercommunal. Une proposition loin de faire l’unanimité chez les autres acteurs, en particulier les communes ou les centres de gestion qui peuvent y voir une forme de concurrence à leurs services. Selon l’ADGCF, ce type d’organisation porte pourtant des « objectifs louables et nombreux ». En premier lieu, elle estime que cela permettrait une amélioration de l’ingénierie sur les territoires, notamment ruraux, en professionnalisant les équipes, en les formant davantage, en attirant les talents et en organisant la montée en compétence des agents grâce à des politiques « RH » mieux adaptées.

Autre atout mis en avant par l’ADGCF : une répartition plus équitable des ressources humaines sur le territoire, dans une recherche d’efficience et dans le respect de la volonté des agents. S’y ajouterait une amélioration de la situation des agents comme de leur bien-être au travail : sécurisation de la carrière et évolution professionnelle, modernisation de la gestion RH, socle minimum de droits mais aussi d’obligations...

Le déploiement rendue possible d’une GPEEC

L’étude insiste également sur un gain d’efficience rendu possible par la simplification et la professionnalisation de la gestion des RH du territoire permettant le déploiement d’une gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC) « efficace et ambitieuse ». Cela permettrait, en outre, une diminution mécanique du nombre d’employeurs locaux sans toucher à la carte administrative et cela avec une application homogène du statut de la fonction publique. Autres atouts mis en avant : la rationalisation et le pilotage de la masse salariale globale d’un territoire mais aussi la possibilité pour les agents de bénéficier de façon uniforme de rémunérations attractives et de politiques sociales plus ambitieuses.

Pour présenter en détail son étude, l’ADGCF a organisé, avec Weka, le 30 mars dernier, une web-conférence intitulée « Administration locale partagée : rêve organisationnel ou cauchemar technocratique ? ». Y participaient Dominique Garnier, DGS de la communauté de communes d’Erdre et Gesvres, secrétaire général de l’ADGCF, en charge du management des RH, et Mathieu Chartron, DGS de la ville de Sens et de la communauté d’agglo du Grand Sénonais.

Dix préconisations

Dans son étude, l’ADGCF formule dix préconisations afin de « faire de la politique des RH la politique fonctionnelle « pivot » permettant le déploiement des collaborations et des politiques publiques sur le territoire mutualisé ». Avec l’espoir que certaines puissent être reprises lors de la discussion du projet de loi « 4D » (différenciation, décentralisation, déconcentration et décomplexification), prévue normalement en juillet au Sénat, après une présentation au conseil des ministres du 12 mai.

1/ Adopter un seuil minimum de gestion des RH à 50 agents, en référence aux seuils actuels de création des comités sociaux territoriaux. 2/ Laisser le libre choix aux collectivités d’en définir les périmètres, le nombre et la ou les collectivités gestionnaires. 3/ Retenir le « service commun » défini au CGCT (Code général des collectivités territoriales) comme outil contractuel unique ; une simplification des modalités de mutualisation au sein du bloc local. 4/ Concevoir, piloter et mettre en œuvre les lignes directrices de gestion au niveau communautaire, en concertation avec les autres employeurs du bloc local. 5/ Inscrire obligatoirement un volet RH au sein des pactes de gouvernance et pactes financiers locaux. Présenter de façon obligatoirement consolidée les effectifs pour toutes les collectivités appartenant au même bloc local. 6/ Définir un calendrier de réalisation pour faire aboutir le processus, adossé à la durée programmée pour les lignes directrices de gestion du territoire, soit six ans maximum. 7/ Définir le collectif de DG (DGS des communes et de la communauté) comme instance de pilotage technique des RH sur le plan local. 8/ Transformer les centres de gestion départementaux en centres d’expertise au niveau régional. 9/ Faciliter l’inclusion des DGS communaux au sein d’un collectif de DG territorial et de l’organigramme communautaire. Possibilité de double détachement pour les DGS mutualisés (entre communes ou entre communes et interco). 10/ Responsable communal, un nouveau nom pour la fonction de secrétaire de mairie. Reconnaissance d’un DU comme diplôme professionnel.

Philippe Pottiée-Sperry

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