Les élus s’alarment de l’inégalité d’accès au numérique
Le 2ème congrès national des élus au numérique, organisé par Villes Internet, s’est tenu le 12 octobre en visio-conférence, et non au Sénat comme prévu, crise sanitaire oblige.
Plus de 280 élus ont posté, en l’espace de deux mois, plus de 1000 contributions, enrichies et synthétisées dans une motion adoptée le jour du congrès ). Organisée autour de huit grands enjeux, cette motion réaffirme la place centrale des collectivités pour définir des politiques publiques numériques. Inquiets de la crise sociale et conscients du rôle essentiel des collectivités, les élus de Villes Internet, association présidée par Mathieu Vidal, adjoint à la maire d’Albi (81), ont exprimé une volonté d’organiser leur compétence numérique. Et cela en matière de gestion locale du cheminement de la donnée, de consommation responsable et durable du numérique et de services de proximité renforcés par de nouvelles formes de médiation. La motion a été présentée au cabinet du Premier ministre le 19 octobre.
Une motion organisée autour de huit enjeux
Les huit grands enjeux de la motion de Villes Internet sont : une égalité d’accès aux réseaux et usages par les citoyens et pour les territoires ; une transition numérique qui renforce la transition écologique ; une stratégie publique de la gestion du cycle de vie de la donnée ; une proximité consolidée par des formes de médiation réinventées ; des coopérations sur les politiques publiques numériques ; la formation des agents, des élus rapprochés des usagers par le numérique ; des moyens humains et financiers à la hauteur de la modernisation des services publics locaux ; l'implication des citoyens dans une démocratie locale qui choisit ses innovations
Egalité d’accès aux réseaux et usages
Le premier enjeu s’appuie sur le constat d’une urgence à lutter la grande inégalité d’accès au numérique et aux services publics dématérialisée qui touche les zones rurales mais aussi de nombreux autres territoires. Conséquence : l’instabilité des communications et de la circulation de l’information n’est plus soutenable quand on rend obligatoire la dématérialisation et l’accès numérique à tous les services publics. « Plus la dématérialisation se développe plus le fossé de l’inaccessibilité produit de l’inégalité sociale », s’alarme Villes Internet. Sa motion demande donc à l’Etat de peser pour limiter les freins du déploiement des réseaux liés à la compétition des opérateurs et industriels du numérique, accrue dans la perspective du déploiement d’une cinquième génération de standards de téléphonie mobile.
Gestion du cycle de vie de la donnée
Les collectivités interviennent à chaque étape de cheminement de la donnée : protection, stockage, ouverture, exploitation, disparition. Elles portent donc une partie de la responsabilité juridique. Appelées à optimiser les usages et les infrastructures de ces données collectives ou personnelles, les collectivités doivent préserver la souveraineté "territoriale" sur la donnée. La gestion des données et des lieux en proximité où elles doivent être conservées et d’où elles sont distribuées, est une gestion locale. Appelant à une stratégie publique de la gestion du cycle de vie de la donnée, la motion de Villes Internet affirme que « seule une compétence locale avec des référents formés permettra d'assumer cette nouvelle politique publique locale de la donnée ».
« Le service public ne doit pas se déshumaniser en se dématérialisant ». Face à cette urgence, l’association appelle à des formes de médiation réinventées en insistant sur une « médiation numérique pensée comme une médiation sociale ».
Coopération inter et intra territoriale
La motion plaide également pour des coopérations locales sur les politiques publiques numériques. L'Etat doit coordonner et financer les politiques publiques numériques sans se focaliser sur « les échelons territoriaux pertinents » mais en encourageant l'initiative locale. « Des coopérations doivent s’organiser localement pour permettre aux besoins et aux usages innovants de se déployer », estime Villes Internet. Et de préciser : « cette coopération inter et intra territoriale doit permettre la dynamisation inclusive des corps intermédiaires pour une économie locale favorable à l’emploi et à la formation pour l’activité de tous dans le maintien de la santé publique et des services sociaux utiles aux ainés comme aux jeunes ».
Formation des agents territoriaux
Un autre enjeu repose sur le besoin de formation des agents territoriaux car ce sont « les premiers acteurs de la lutte contre la fracture numérique sociale, économique et culturelle ». Cette formation doit être continue et évaluée pour être diffusée dans la collectivité. Pour sa part, l’accompagnement des citoyens doit passer par les associations locales, les centres sociaux et les acteurs de l’éducation populaire.
Le besoin de moyens humains et financiers
« La reconnaissance de la compétence de gouvernance numérique des collectivités doit être organisée collectivement avec les associations d’élus », estime la motion pour étayer l’enjeu clé de moyens humains et financiers à la hauteur de la modernisation des services publics locaux. Une politique dédiée au numérique doit ouvrir un poste budgétaire à chaque échelon local pour la gestion du numérique et ses incidences matérielles et fonctionnelles sur le développement local. Côté organisation, cela se traduirait par un service numérique associé à l’élu au numérique avec au moins un référent numérique local (commune ou intercommunalité). Celui-ci doit avoir une fonction transversale aux services pour coordonner la définition des cahiers des charges de l’application de la politique numérique locale.
P.P.-S.
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