Acceptabilité des ZFE : le Sénat prend le pouls
Sur le sujet très sensible des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m), le gouvernement mène une concertation, jusqu’en juin. Après les députés, le Sénat a créé une mission d’information. Pour mieux identifier les difficultés rencontrées, elle mène une consultation en ligne. Lors de son lancement, plus de 11 000 réponses ont été envoyées en à peine quelques heures !
Attention, sujet à risque ! Même pas encore vraiment mises en place, les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) suscitent déjà les plus grandes inquiétudes. Et cristallisent une certaine colère de la part des professionnels, des habitants (quand ils sont au courant) et des élus locaux. En ligne de mire : un dispositif hyper-complexe, avec un accompagnement de l’Etat jugé insuffisant. Plus grave : le risque d’être une bombe sociale avec les restrictions progressives de circulation, transformant les ZFE en zones d’exclusion des plus précaires et des ruraux, pouvant enclencher un mouvement de protestation de type Giles jaunes.
Comité de concertation
Depuis plusieurs mois, les initiatives se multiplient pour tenter d’éteindre l’incendie. En janvier dernier, le gouvernement a nommé Edouard Manini, coordonnateur national pour le déploiement des ZFE-m. Sa mission ? Tenter de désamorcer la situation. Il insiste sur la volonté « d’écouter et d’entendre l’ensemble des parties prenantes, dont les représentants de collectivités, et de parvenir à un dispositif si nécessaire ajusté en lien avec le comité de concertation, les élus et les acteurs économiques et sociaux ».
Un comité de concertation a démarré en mars ses travaux avec plusieurs groupes de travail : harmonisation des dispositifs, acceptabilité sociale et territoriale, logistique… Leurs conclusions doivent être rendues d’ici cet été.
Une mission sénatoriale
Déjà, à l’automne dernier, une mission menée par deux députés pointait « des questions majeures d’acceptabilité et de justice sociale ». Les sénateurs s’y sont mis à leur tour en lançant, le 8 mars, une mission d’information sur l’acceptabilité des ZFE-m, en rappelant ses mises en garde dès l’examen, en juillet 2021, de la future loi « Climat ». Cette mission pointe le manque de communication et de pédagogie, l’insuffisance et le coût des offres alternatives (transports en commun et véhicules peu polluants, le risque de creusement des inégalités sociales voire de fractures territoriales, l’absence de moyens de contrôle. « Autant d’angles morts qui cristallisent les tensions et font de cette mesure une "bombe sociale à retardement" », estiment les sénateurs. Leur rapport sera rendu courant juin.
« Envie de se faire entendre »
Degré de connaissance et jugement du dispositif des ZFE-m, obstacles à surmonter… Pour répondre à différentes questions, la mission sénatoriale a lancé, le 17 avril, une consultation en ligne auprès de toutes les parties concernées. Son constat : les restrictions de circulation applicables, prévues par les ZFE-m aux véhicules les plus polluants, sont, bien souvent, peu connues, incomprises voire peu respectées.
Pour affiner cette analyse et mieux identifier les difficultés rencontrées voire les bonnes pratiques, la consultation du Sénat est ouverte jusqu’au 14 mai. « Plus de 11 000 réponses ont été envoyées en à peine quelques heures », a indiqué Philippe Tabarot, le rapporteur de la mission, sur Public Sénat. La preuve, selon lui, que « le sujet des ZFE questionne, interpelle et préoccupe nos concitoyens qui ont envie de se faire entendre ».
Recul de certaines métropoles
De nombreux élus locaux et nationaux élèvent également la voix et dénoncent la très faible acceptabilité du dispositif. Parmi les associations d’élus, l’AMF insiste sur la nécessité d’une recherche d’équilibre entre les territoires, passant notamment par plus de souplesse et de liberté données aux collectivités.
Preuve des difficultés de mise en oeuvre, plusieurs métropoles commencent à ralentir (Grand Paris, Lyon, Grenoble, Grand Reims…) en décalant les dates d’interdiction des véhicules classés Crit’Air 3 et Crit’Air 2. Une réunion organisée par le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires, Christophe Béchu, le 16 mai, avec les associations d’élus, doit notamment aborder ce sujet brulant des ZFE.