, mis à jour le 17/11/2025 à 12h04

« L’autoroute de demain sera autant numérique que physique »

Delphine Séné
Experte des transports
Alenium (Klee Group)
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" La modernisation du réseau doit dépasser la simple question des péages et devenir un véritable projet de mobilité connectée ".

Experte des transports chez Alenium (Klee Group), Delphine Séné appelle à profiter des prochaines échéances de concessions autoroutières pour engager une transformation profonde : infrastructures digitales, interopérabilité, voiture autonome… Rencontre.

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Les débats publics portent surtout sur les péages et le statut des concessions. Pourquoi selon vous manque-t-on un enjeu majeur : la digitalisation des autoroutes ?

Les concessions autoroutières arrivent en effet à échéance entre 2031 et 2036, et le débat se focalise presque exclusivement sur les tarifs ou sur l’opposition renationalisation/privatisation. Or, cette période charnière n’est pas qu’un jalon contractuel : c’est une opportunité unique de repenser les infrastructures numériques du réseau. Aujourd’hui encore, on conçoit l’autoroute principalement sous son angle physique – chaussée, barrières, aires. Pourtant, l’autoroute de demain devra être une infrastructure numérique à part entière, capable de dialoguer avec les véhicules, de s’adapter aux flux et de proposer des services enrichis.

Concrètement, à quoi ressemblerait cette autoroute « numérique » ?

Elle devra s’inscrire dans un écosystème de mobilité beaucoup plus large : ferroviaire, covoiturage, logistique urbaine… L’usager devra pouvoir connaître en temps réel son coût, son impact carbone ou ses alter natives.Cela implique un socle numérique ouvert : des API standardisées, un partage de données entre acteurs, une capacité à faire évoluer les systèmes d’information avec agilité. Aujourd’hui, c’est encore trop rare dans les modèles contractuels. Cette transformation sera également essentielle pour accueillir les véhicules connectés et autonomes, dont le déploiement s’accélérera durant la prochaine vague de concessions. Cela suppose une signalisation intelligente, une connectivité 5G/6G performante, des capteurs et des données de trafic en temps réel. À l’heure actuelle, ces briques existent, mais elles restent dispersées et non interopérables.

Quel rôle l’État doit-il jouer dans cette transformation numérique ?

Il devra jouer un rôle central. L’État doit définir les standards techniques, garantir la sécurité et la souveraineté des données, et veiller à l’interopérabilité des systèmes. Il doit aussi accompagner la mise en commun des données et arbitrer les conflits d’intérêts entre acteurs pour préserver l’intérêt collectif.
Face à l’évolution des usages, des technologies embarquées et des attentes des usagers, les prochaines négociations contractuelles doivent devenir un levier pour faire entrer les autoroutes dans une nouvelle ère : plus digitale, plus connectée, mais surtout plus utile à leurs futurs utilisateurs.

 

Danièle Licata, rédactrice en chef Zepros Territorial, décrypte enjeux publics et collectivités. Forte de 20 ans en presse économique, elle rend accessibles les sujets complexes avec passion et engagement.
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