
Élections municipales 2026 : quelles conséquences pour les EPL ?

Les élections municipales de mars 2026 approchent à grands pas et leur impact dépasse largement le cadre des seules collectivités territoriales. Pour les entreprises publiques locales (EPL), dont la gouvernance repose en grande majorité sur des élus, ce scrutin marque un tournant stratégique et juridique majeur.
" À six mois de l’échéance, il est temps d’anticiper les conséquences statutaires, organisationnelles et éthiques afin de garantir la continuité de fonctionnement des EPL " avertit maître Anne-Laure Labaeye – Avocate en droit des sociétés chez A2L Avocat. Rencontre.
Quelles sont les premières conséquences du renouvellement des conseils municipaux sur les EPL ?
Le renouvellement intégral des conseils municipaux entraîne, de plein droit, la fin des mandats des élus siégeant dans les organes dirigeants des EPL (conseils d’administration ou de surveillance), même s’ils ont été désignés en cours de mandat. Cette règle, prévue à l’article R. 1524-3 du CGCT, s’impose même en présence de dispositions statutaires contraires.
Certaines nuances doivent toutefois être relevées concernant, d’une part, les assemblées spéciales où le mandat d’un représentant de collectivité territoriale ne prend fin qu’en cas de perte de la qualité d’élu. Il ne s’agit donc pas d’une fin automatique. Concernant les assemblées générales, la situation est différente. La collectivité territoriale, en tant qu’actionnaire, conserve sa représentation à l’assemblée générale. Toutefois, si la personne physique désignée comme représentant n’a plus la qualité d’élu à la suite du scrutin, une nouvelle désignation devra être décidée par l’organe délibérant de la collectivité. Les EPL doivent donc anticiper la vacance des sièges, organiser le remplacement des représentants et sécuriser les décisions adoptées durant cette phase transitoire.
Que se passe-t-il entre le scrutin municipal et la désignation des nouveaux représentants au conseil d’administration ou de surveillance ?
Durant cette période transitoire, les mandats des représentants « sortants » sont prorogés jusqu’à leur remplacement officiel par la nouvelle assemblée délibérante. Leurs pouvoirs sont cependant restreints à la gestion des affaires courantes.
Si la loi ne définit pas précisément cette dernière notion, il s’agit le plus souvent d’actes de gestion courante – de nature administrative ou financière – indispensables au bon fonctionnement de l’EPL. Ces actes de gestion incluent notamment la convocation du conseil d'administration.
Faut-il modifier les statuts ou pactes d’actionnaires en amont ?
Pas nécessairement, en revanche, il est recommandé de procéder à un audit juridique de ces derniers. Cet audit permet de vérifier la conformité des clauses relatives à la durée des mandats ou aux délégations de pouvoirs, ainsi que d’identifier les éventuels risques ou blocages en période de transition.
La période post-électorale pourra aussi être mise à profit pour adapter et moderniser les statuts ou pactes à la lumière des enjeux identifiés.
Comment prévenir les conflits d’intérêts en période électorale ?
Les élus-candidats siégeant dans les EPL doivent faire preuve d’une vigilance accrue face aux risques de conflits d’intérêts, notamment en évitant toute confusion entre intérêts publics et intérêts privés ou électoraux. La loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 a renforcé cette obligation de prévention, fondée sur les notions d’interférence, d’influence ou même d’apparence d’influence dans l’exercice impartial du mandat. En cas de risque identifié, la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique recommande des mesures comme l’abstention aux votes, le déport ou la démission de certaines fonctions exécutives
Quelle communication institutionnelle pour les EPL à l’approche des élections ?
En période pré-électorale, la communication des EPL doit être rigoureusement encadrée. Tout message valorisant un élu-candidat, ou mettant en avant l’action de l’exécutif sortant, peut être requalifié en communication électorale prohibée au sens de l’article L. 52-1 du Code électoral. La jurisprudence impose une stricte neutralité des messages publics à l’approche des scrutins locaux.
Existe-t-il des risques pour les élus siégeant dans les organes des EPL durant cette période électorale ?
Oui. Un élu administrateur ou président de conseil qui outrepasse son mandat ou interfère dans la gestion de l’EPL à des fins électorales personnelles peut voir sa responsabilité engagée. Dans certains cas, il peut être considéré comme dirigeant de fait, et encourir des sanctions civiles ou financières : comblement de passif, interdiction de gérer, voire responsabilité personnelle. L’anticipation juridique est donc essentielle, tant pour protéger les EPL que pour sécuriser les élus dans l’exercice de leur mission.