Elections sénatoriales 2023, mode d’emploi
Les élections sénatoriales auront lieu le 24 septembre prochain. Scrutin indirect, mode de scrutin différent selon les territoires, modalités de désignation du corps électoral différentes selon la taille de la commune : il est souvent difficile de s’y retrouver !
Par Thomas Chevandier, avocat au Cabinet Seban & Associés
La moitié des sièges du Sénat sera renouvelée cette année. Le collège électoral se compose de 160 000 grands électeurs dont 95% des conseillers municipaux.
Qui peut être candidat aux élections sénatoriales ?
Il faut déjà être âgé au moins de 24 ans (Code électoral, article LO 296), détenir la nationalité française et avoir satisfait aux obligations imposées par le Code du service national. A ces conditions tenant à la personne du candidat s’ajoutent celles relatives aux fonctions exercées, qui empêchent par exemple les candidatures des préfets et d’une série de cadres de la fonction publique, de la magistrature ou de l’arme ayant exercé leurs fonctions dans le département depuis moins de trois ans (Code électoral, article LO. 132).
Les règles de non-cumul s’appliquent également aux candidats élus et font obstacle à la conservation de l’ensemble des mandats sous certaines conditions qui s’appliquent également aux députés (Code électoral, article LO 297).
Comment déclarer sa candidature ?
Les candidatures sont déposées au moyen de formulaires CERFA, remplis individuellement par tous les candidats, qu’ils soient titulaires ou suppléants, candidats sur une liste ou au scrutin uninominal. Au surplus, un ensemble de pièces justificatives s’ajoute à ce formulaire, lesquelles permettent de prouver notamment que les conditions d’éligibilité sont remplies (Code électoral, articles R. 99 et R. 149).
Les candidats ou les têtes de listes de candidats doivent en outre déclarer un mandataire financier (qui peut être une personne physique ou une association de financement électoral), qui est le seul autorisé à recueillir les fonds destinés au financement de la campagne dans les six mois précédant le premier jour du mois de l’élection et jusqu’à la date du dépôt des comptes (Code électoral, article L. 52-4).
Qu’est-ce qui distingue les sénatoriales des législatives ?
En premier lieu, les sénateurs sont renouvelés par moitié tous les trois ans, de sorte qu’un mandat de sénateur dure six ans. Le renouvellement de moitié vise notamment à assurer la continuité de l’institution.
En second lieu les sénateurs sont élus au suffrage universel indirect, par un collège électoral formé d’élus locaux rassemblés par circonscriptions et pour lesquels le vote est obligatoire, sous peine d’une amende 100 € en cas d’abstention non justifiée.
Comment se compose le corps électoral des grands électeurs ?
Les élus en question sont : les députés, les conseillers régionaux, les conseillers départementaux (ou équivalent, selon le statut de la collectivité) et les conseillers municipaux ayant la nationalité française ou leurs délégués. Cela fait un total de plus de 160 000 grands électeurs dont 95% sont des conseillers municipaux. Le 9 juin prochain aura lieu la désignation des délégués des conseils municipaux.
Dans les communes de moins de 9000 habitants, les conseillers municipaux élisent un nombre de grands électeurs en leur sein, qui dépend du nombre d’habitants. Dans les communes de 9000 habitants et plus, tous les conseillers municipaux sont grands électeurs. Et, dans les communes de plus de 30 000 habitants, les conseillers municipaux élisent des délégués supplémentaires, à raison d’un par tranche de 800 habitants (Code électoral, article L. 280).
Pourquoi y-a-t-il deux modalités de votes différentes pour chaque renouvellement ?
Les élections sénatoriales se déroulent soit au scrutin uninominal, soit au scrutin proportionnel, en fonction du nombre de sénateurs à élire par département, lequel dépend de sa population.
C’est un scrutin uninominal majoritaire à deux tours dans les circonscriptions où il y a au maximum deux sénateurs à désigner et un scrutin proportionnel pour les autres circonscriptions.
Comment sont organisés ces deux scrutins ?
S’agissant du scrutin uninominal, la première règle est que le candidat et son remplaçant doivent être de sexe différent (Code électoral, article L. 299). Sa principale spécificité est qu’il se déroule sur un seul jour, y compris s’il y a plusieurs tours de vote, ce qui n’a pas été sans poser certaines difficultés, comme on le verra ci-après. Il n’est pas besoin de convoquer un second tour dès lors qu’un candidat a obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés représentant au moins 25% des inscrits.
S’il y a un ballotage, le second tour est organisé dans l’après-midi, mais chacun peut maintenir sa candidature de sorte qu’il est, dans ces cas-là, fréquent que le candidat élu ne bénéficie que d’une majorité relative.
Quant au scrutin proportionnel, les modalités du scrutin sont on ne peut plus classiques, la règles de répartition qui s’applique est la plus forte moyenne et les listes doivent être composées en alternant les candidats de sexe différents (Code électoral, article L. 295).
Comment la campagne électorale se déroule-t-elle et quelles sont ses règles ?
En dépit du caractère plus limité du corps électoral et des spécificités afférentes de la campagne, la conception et l’envoi des circulaires et bulletins de vote répondent aux mêmes règles que pour les autres élections (voir notamment Code électoral, articles R. 155 et suivants) et l’envoi aux électeurs peut être effectué par la commission de propagande.
Quant à l’affichage électoral, il ne peut être effectué, le cas échéant, qu’aux frais des candidats, qui ne bénéficient alors d’aucun remboursement de la part de l’Etat.
Quelles sont les règles des autres moyens de propagande ?
S’agissant des autres moyens de propagande, les règles sont les suivantes :
-Réunions électorales : le prêt de salles publiques est possible sans que cela ne contrevienne aux règles de financement des campagnes et l’article L. 52-8 du Code électoral (CC, 13 février 1998, AN Val d’Oise 5ème circo), les collectivités doivent respecter strictement le principe d’égalité.
-Bilan de mandat : ils sont autorisés, par et pour le candidat, à condition qu’il le finance et qu’il apparaisse sur ses comptes de campagne. S’il est élu d’une collectivité qui souhaite faire un compte rendu de mandat au cours de la période préélectorale, les règles de prudence liées à l’application des articles L. 52-1 et L. 52-8 du Code électoral s’appliquent.
-Fin de campagne : la règle de principe édictée à l’article L. 49 du Code électoral s’applique (interruption de la campagne la veille du scrutin à 0h), moyennant un ajustement pour les circonscriptions où le vote s’effectue au scrutin uninominal (voir ci-après).
Quelles sont les règles relatives au financement des campagnes ?
Depuis le scrutin de 2014, les candidats doivent se soumettre aux règles relatives au financement des campagnes (désignation d’un mandataire financier, ouverture d’un compte de campagne, plafonnement des dépenses, dépôt du compte à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques - CNCCFP).
Avec un collège électoral bien plus restreint que pour les autres élections, les règles relatives au plafonnement des dépenses sont évidemment plus restrictives. Ainsi, le plafond des dépenses est fixé à 10 000 € par candidat ou par liste, avec une majoration de quelques centimes par habitant du département qui varie selon le nombre de sénateurs à élire.
Enfin, tout candidat ayant recueilli plus de 5% des suffrages exprimés percevra une somme forfaitaires correspondant à 50% du plafond des dépenses autorisées, sous la réserve que les sommes ont bien été dépensées.
Qu’en est-il de la représentation des Français établis hors de France ?
Les douze sénateurs représentant les Français de l’étranger sont également renouvelés par moitié et élus au scrutin indirect, par un seul collège formé des membres élus de l’Assemblée des Français de l’étranger. L’élection a lieu à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne.
Quelles sont les nouvelles règles de la loi du 2 février 2023 ?
La loi du 2 février 2023 sur le déroulement des sénatoriales a opéré des changements à la marge pour les élections au scrutin majoritaire à deux tours (lesquels ont lieu le même jour). Cette nouvelle loi permet aux candidats de faire campagne entre les deux tours et supprime l’embargo des résultats avant 17h30, ce qui était préalablement interdit.