Réduction des déficits : tour de vis sur les collectivités
Pour réduire le déficit public, le gouvernement veut modérer les dépenses de fonctionnement des collectivités en limitant à 0,5% leur hausse annuelle. Une contribution au redressement des finances publiques qui n’est pas du goût des associations d’élus qui dénoncent les contradictions de l’exécutif. La rentrée s’annonce chaude.
Le gouvernement a transmis cet été, à la Commission européenne, son programme de stabilité visant à repasser sous le seuil des 3% de déficit public en 2027. Sa méthode ? La réduction des dépenses de fonctionnement de l’Etat et des collectivités. L’annonce faite par Bercy, le 21 juillet, a fait l’effet d’une douche froide auprès des associations d’élus locaux. Pour les collectivités, cela se traduira par une limitation à 0,5% de la hausse de leurs dépenses de fonctionnement par an à compter de 2023.
Les modalités de cette contribution au redressement des finances publiques seront précisées à la rentrée puis inscrites dans la nouvelle loi de programmation des finances publiques (LPFP) soumise au Parlement cet automne.
« Changement de pied »
La contribution de l’Etat et des collectivités reprend l’annonce faite par Emmanuel Macron durant sa campagne présidentielle mais que les ministres chargés des collectivités avaient évacué dans leurs échanges avec les associations d’élus. Sans surprise, celles-ci ont vivement réagi, en dénonçant un changement de pied du gouvernement sachant que, le 19 juillet, Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, affirmait devant les représentants des associations d’élus renoncer à toute norme encadrant les dépenses des collectivités en raison d’une inflation record. D’autant que cette annonce de l’abandon de 10 Md€ d’économies annuelles demandés aux collectivités avait été réitérée le lendemain lors d’une rencontre des présidents de région avec la Première ministre !
Levée de boucliers des élus
Furieuse, Régions de France estime que « la baisse de 0,5% reviendrait à un effort encore plus important que celui qui avait été demandé au travers des contrats de Cahors qui visaient à encadrer la hausse des dépenses des collectivités et non pas la diminuer ! ». Et de dénoncer « l’effet mortifère » pour l’investissement public local. De plus, l’association présidée par Carole Delga fustige la contradiction d’une baisse imposée des dépenses aux collectivités au moment où l’État augmente leurs dépenses à travers la hausse du point d’indice (+3,5%) et la revalorisation de la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle ou encore pour faire face « au mur de dépenses de fonctionnement et d’investissement lié aux transports et à la mobilité ». Les autres associations d’élus sont sur la même position.
L’APVF (Association des petites villes de France) pointe un « manque de cohérence au moment où les collectivités n’ont jamais eu autant besoin de stabilité et de visibilité » et appelle la Première ministre à dissiper au plus vite ces inquiétudes.
« Ne pas sacrifier les investissements » des communes
Exprimant « son incompréhension face aux déclarations contradictoires du gouvernement sur la baisse imposée des dépenses des collectivités », l’AMF conteste l’objectif de baisse de 0,5% et l’absence de concertation préalable. Estimant que « les budgets de fonctionnement des collectivités ne sont pas un problème pour les comptes publics », David Lisnard, le président de l’AMF, juge qu’« il n’y a aucune raison pour que les collectivités aient à sacrifier leurs investissements ». Dans le contexte actuel d’inflation, l’association attend, au contraire, une revalorisation des recettes des communes, et notamment l’indexation de la DGF sur l’inflation, « pour assurer la continuité des services publics locaux, essentiels à la population ».
Christophe Béchu répond aux élus
Face aux vives réactions des associations d'élus locaux, Christophe Béchu a tenté de calmer le jeu en précisant que le gouvernement envisageait seulement une limitation de la progression des dépenses de fonctionnement des collectivités au cours du quinquennat. « Il n’y aura pas de baisse des dotations des collectivité et il n’y aura pas non plus de retour des contrats de Cahors », a-t-il précisé. Et d’ajouter : « Le pacte de stabilité prévoit bien au contraire une progression des dépenses des collectivités de 24 Md€ sur cette même période ».
Le ministre veut éviter un mauvais procès en insistant sur les mots employés et en refusant ainsi le terme de « baisse ». « Ce qui est attendu, c’est seulement une modération des dépenses de fonctionnement pour qu’elles augmentent en moyenne annuelle de 0,5% de moins que leur tendance naturelle », tient-il à préciser.
Concertations à la rentrée
Par ailleurs, Christophe Béchu réfute l’argument des élus quant aux conséquences sur l’investissement public local en affirmant que « les collectivités trouveront l’Etat à leurs côtés par un soutien renforcé à l’investissement pour la transition écologique dans le cadre de la priorité donnée à cette politique indispensable. C’est en effet en investissant dans la transition énergétique dès maintenant que nous diminuerons les dépenses de fonctionnement des collectivités comme celles de l’Etat (énergies, fluide, bâtiment…) ». Pas sûr que ces arguments suffisent à convaincre les associations d’élus. La rentrée et les concertations à venir promettent d’être chaudes.