Les communes bien associées à l’élaboration des CRTE

Philippe Pottiée-Sperry
Image

Le nouveau contrat de relance et de transition écologique (CRTE) se veut intégrateur en ramassant tous les dispositifs existants (contrat de ville ou de ruralité, Action cœur de ville, Petites villes de demain, Territoire d’industrie...).

Partager sur

Simplicité donc mais aussi visibilité avec une programmation pluriannuelle (six ans sur la durée du mandat). Le périmètre retenu est a minima intercommunal. Pour connaître l’état d’avancement des CRTE, l’AMF a réalisé une enquête inédite (1) en avril auprès des EPCI porteurs de ces nouveaux contrats. Premier constat : plusieurs interrogations, soulevées dès le départ, demeurent. Elles portent notamment sur l’intégration des dispositifs existants au CRTE comme de leur articulation avec celui-ci. Même chose sur le devenir des financements dédiés à ces dispositifs. En clair, les CRTE seront-ils des contrats « uniques » ou des contrats « chapeau » ? C’est donc l’esprit même du dispositif qui pose encore question.

Des périmètres définis sans problème

837 périmètres ont été arrêtés par le gouvernement dont 80% sont des intercommunalités et 20% des regroupements (PETR, pays, pôles métropolitains, syndicats). Il en faut 845 pour couvrir toute la métropole, l’outre-mer disposant d’un peu plus de temps compte tenu de ses spécificités territoriales. Selon l’enquête de l’AMF, la définition de ces périmètres n’a pas posé de difficulté pour la plupart des répondants ayant participé à une concertation avec les services de l’Etat. 80 % affirment ainsi avoir été concertés, et cela quelle que soit l'échelle concernée. Une bonne nouvelle quand on se souvient des inquiétudes initiales sur le sujet, relayées à plusieurs reprises par l’AMF. A noter toutefois que trois EPCI intégrés au sein d’un périmètre supra-intercommunal soulignent « un manque, voire une absence totale de concertation », relate l’enquête. De plus, certains affichent « une incompréhension devant l’échelle retenue ». Des choix qui peuvent parfois s’expliquer par l’alignement du périmètre de contractualisation sur celui retenu par la région pour ses propres contrats.

Construire le projet de territoire

La circulaire du 20 novembre 2020 du Premier ministre insiste sur la nécessité de construire un projet de territoire afin de servir de socle au CRTE. Fin avril, près de la moitié des EPCI répondants et porteurs d’un CRTE n’avaient pas encore finalisé ce projet de territoire. Cela montre le travail important pour l'élaborer mais aussi pour l'actualiser lorsqu'il existe déjà. Un temps nécessaire pour la plupart des répondants afin d’identifier les dispositifs nationaux devant être intégrés au CRTE. 57% affirment avoir déjà anticipé cette intégration. Par ailleurs, les axes de contractualisation sont priorisés ou en cours de priorisation pour 70% des répondants. Quelques exemples : accompagner les transitions, développer les mobilités, renforcer l'attractivité et le rayonnement du territoire…

Demande d’un report du calendrier

Tout ce travail préparatoire prend du temps et apparaît difficilement compatible avec le calendrier très serré, fixé dès le départ par le gouvernement (signature du CRTE fin juin). D’autant que le rythme ne permet pas, à ce stade, d'associer la société civile et les autres partenaires alors même que les répondants en affichent la volonté. Autre chiffre instructif : 90% des répondants n’avaient pas encore signé, fin avril, de protocole d’engagement (détail des contrats préexistants, méthode d’élaboration et grands axes du CRTE). Dans ce contexte, malgré la concession faite par la ministre Jacqueline Gourault en affirmant que le 30 juin n’est plus une date « couperet », le sujet continue d’inquiéter. Ainsi, 54% des répondants jugent nécessaire de prolonger le calendrier jusqu’à l'automne, voire la fin de l'année.

Bonne concertation avec les communes

Bonne nouvelle, pas moins de 80% des répondants ont développé ou sont en train de mettre en place des outils de concertation ou d’association avec les communes (conseil des maires, informations à destination des maires et de leurs services, plateforme de recensement des projets communaux, etc.). De même, les deux tiers des EPCI ayant répondu à l’enquête affirment que des projets communaux seront portés au sein de leur CRTE et près de la moitié (47 %) envisage même un volet communal spécifique. Ces résultats traduisent donc une forte volonté d’associer les communes à la construction du CRTE pour leur assurer « une juste place dans le contrat ». En conséquence, l’AMF estime que « l’Etat doit en prendre acte en prévoyant la cosignature du contrat avec les communes ou pour le moins la définition d’un volet communal clair ».

Par ailleurs, l’enquête constate de bonnes relations avec les services de l'État : deux tiers des répondants les jugent relativement développées. Ce constat positif s’observe aussi concernant pour la mise en œuvre du plan de relance. Ainsi, 80 % des répondants affirment être en contact régulier avec le préfet ou le sous-préfet à la relance. De même, 63% sont associés aux comités de suivi départementaux du plan de relance. Et plus du tiers a signé des contrats « relance » avec l’Etat (devant eux aussi intégrer les CRTE) qui concernent principalement la rénovation énergétique, le logement, les projets structurants, les mobilités, la requalification des friches et la transition numérique.

Freins de l'ingénierie et de la capacité financière

Si 80% des répondants s’estiment en capacité de réaliser les diagnostics nécessaires au bilan territorial, il apparaît tout de même que l’État est absent pour plus de la moitié d’entre eux en ne les accompagnant pas pour leurs diagnostics. « Au vu de l'enjeu de la construction du projet de territoire, la question de l'accompagnement des CRTE en ingénierie est essentielle et se pose pour la majorité des territoires répondants », estime l’AMF. Sans surprise, le manque d’ingénierie ressort surtout pour les plus petits territoires comptant moins de 30 000 habitants. A savoir si l’accompagnement prévu par l’ANCT (Agence nationale de la cohésion des territoires) sera suffisant et facile d’accès.

Les CRTE s’inscrivent dans un contexte financier fragile des collectivités, dû notamment à la crise sanitaire. En conséquence, 77% des répondants estiment leurs capacités financières partielles voire insuffisantes pour participer à la relance. Selon l’AMF, « cela traduit des attentes fortes quant à un accompagnement financier réel de l’Etat dans la durée et une clarification des moyens alloués aux contrats pour leur mise en œuvre ».

Philippe Pottiée-Sperry

(1) L’enquête de l’AMF a été menée du 22 mars au 30 avril auprès des 1253 EPCI. Résultat : un échantillon jugé représentatif de 125 intercommunalités porteuses d'un CRTE (EPCI à fiscalité propre, pays, pôles métropolitains, syndicats, PETR). Il correspond à 15 % des CRTE en cours d'élaboration et suit la répartition nationale.

👉 Découvrez le dernier ZePros Territorial

👉 Abonnez-vous gratuitement au journal numérique et à sa newsletter

Philippe Pottiée-Sperry
Partager sur

Inscrivez-vous gratuitement à nos newsletters

S'inscrire