Maîtriser les coûts du foncier : adoption de la proposition de loi « Lagleize »

Philippe Pottiée-Sperry
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La proposition de loi du député (Modem) de la Haute-Garonne Jean-Luc Lagleize pour réduire le coût du foncier et augmenter l'offre de logement a été adoptée le 28 novembre à l'Assemblée nationale. Il s’était vu confier par le Premier ministre une mission sur la maîtrise des coûts du foncier dans les opérations de construction.

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Son rapport, remis à Julien Denormandie, ministre chargé de la Ville et du Logement, le 6 novembre dernier, contient 50 propositions. « Près de la moitié concerne directement les élus locaux et vise à consolider et diversifier la boîte à outils à leur disposition pour mener à bien leur politique foncière, d’urbanisme et d’aménagement du territoire », explique le député.

La proposition de loi contient une dizaine de préconisations du rapport.

Soutien du gouvernement

Julien Denormandie s’est « félicité » de l’adoption de la proposition de loi, résultat selon lui « d’un véritable travail de co-construction entre le gouvernement et la majorité ». Un soutien de bon augure pour la suite de la discussion parlementaire du texte. Le coût du foncier explique en grande partie la hausse des prix de l’immobilier. Dans certaines zones tendues, il atteint souvent près de la moitié du prix du projet immobilier. Ce phénomène progresse : le coût du foncier a augmenté trois fois plus vite que les coûts du logement, + 71% en l’espace de dix ans. Selon Julien Denormandie, « trop de Français sont empêchés d’accéder à la propriété à cause des prix du logement, en particulier dans les zones tendues. Tout l’enjeu de cette proposition de loi soutenue par le gouvernement est d’en permettre l’accès à un maximum de ménages. » Il se félicite également du « dialogue constructif initié par Jean-Luc Lagleize qui a permis aux députés de tous bords d’enrichir cette proposition de loi votée à une large majorité ».

Dissocier la propriété du foncier et du bâti

Parmi les dispositifs probablement les plus innovants du texte, le mécanisme de dissociation de la propriété du foncier et de celle du bâti. Il s’inspire directement des organismes de foncier solidaire (OFS) qui soutiennent l’accès à la propriété des ménages modestes. Ce dispositif, instauré par la loi Alur, a été renforcé par le gouvernement dans la loi Elan. Concrètement, les particuliers payent nettement moins cher l’achat de leur logement car ils ne payent plus le prix du foncier, mais seulement celui du bâti. « C’est un véritable outil de lutte contre la spéculation foncière », estime le ministère du Logement. Et d’ajouter : « Ce dispositif a su convaincre les collectivités, avec une vingtaine d’OFS créées en deux ans. Plus de 8400 logements sont d’ores et déjà programmés, les premiers d’entre eux seront livrés au premier semestre 2020 ».Le dispositif actuel se concentre sur l’accession sociale à la propriété et est ouvert sous condition de ressources. Fort de son succès, son principe sera élargi prochainement à l’ensemble des logements grâce à des offices fonciers libres (OFL), détenus à majorité par des capitaux publics.

Limiter le recours aux enchères

La proposition de loi vient aussi limiter le recours aux enchères pour les ventes de fonciers de l’Etat et des collectivités. « La vente par adjudication constitue l’un des verrous essentiels à lever pour répondre aux objectifs de baisse du prix des logements », estime l’exposé des motifs du texte. Cette pratique conduit en effet à des prix de vente très élevés dans les zones tendues, lesquels font ensuite référence pour l’ensemble des vendeurs, ce qui alimente la spéculation foncière. Demain, le prix ne serait plus le seul critère, ce qui permettrait de valoriser encore d’avantage la qualité du projet urbain prévu.Selon la proposition de loi, la cession aurait lieu en gré à gré (après consultation d’experts fonciers tel que le service des Domaines) ou sur concours à prix fixe portant sur le programme, l’architecture, l’intégration paysagère ou encore l’écologie des bâtiments.Par ailleurs, l’article 4 du texte vise à mettre en place un fonds pour la dépollution des friches. Il serait chargé de libérer les friches urbaines et industrielles en les dépolluant et en leur donnant de nouveaux usages. Il pourrait être géré par Action logement.

Libérer plus de foncier et optimiser le foncier disponible

« Les règles d’urbanisme nationales freinent, voire rendent parfois impossibles les volontés locales de construction et d’agrandissement », constate la proposition de loi. Son article 6 propose donc d’inverser le principe de la règle et de l’exception afin que lorsqu’une opération de construction et d’aménagement est souhaitée par le maire, il puisse la mettre en œuvre sans devoir déroger à la règle. À l’inverse, les maires ne pourraient pas ajouter de contraintes supplémentaires aux règles déjà édictées par le PLU (plan local d’urbanisme).Enfin, l’article 7 propose d’établir un lien direct et mesurable entre le PLU (éventuellement intercommunal), le PLH (Plan local de l’habitat, éventuellement intercommunal) et la délivrance des permis de construire en rendant obligatoire un compte-rendu annuel de la construction de logements en conseil municipal et s’il y a lieu en conseil communautaire. Il présenterait, en début d’année, les écarts entre les objectifs annualisés du PLH, et les logements effectivement construits dans l’exercice écoulé. Il présenterait aussi l’évolution des prix des logements (par typologie) et du foncier sur la commune (produits par l’Observatoire foncier local).Philippe Pottiée-Sperry
Philippe Pottiée-Sperry
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