Politique de la ville : le gouvernement juge son bilan positif

Philippe Pottiée-Sperry
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Julien Denormandie, le ministre chargé de la ville et du logement, a présenté au conseil des ministres du 22 mai un bilan de la politique de la ville, un an après les annonces d’Emmanuel Marcon, le 22 mai 2018, suite à la remise du rapport Borloo.

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Des annonces très mal passées à l’époque auprès des différents acteurs, et jugées insuffisantes, mais qui avaient été progressivement rattrapées suite à l’annonce, le 18 juillet 2018, de la feuille de route de « la mobilisation nationale pour les habitants des quartiers ».

En charge de ce dossier, Julien Denormandie indique que cette mobilisation correspond à un engagement supplémentaire de 3 Md€ par an pour renforcer les dispositifs existants et déployer de nouvelles mesures. Les crédits spécifiques de la politique de la ville bénéficient, dans le cadre de la loi de finances pour 2019, « d’une augmentation inédite de 20 % sur le quinquennat », estime le ministre, soit une hausse de 81,1 M€. Doublée, l’enveloppe dédiée aux opérations de renouvellement urbain permet de financer certaines mesures nouvelles.

Décloisonnement des acteurs

La politique de la ville est déclinée dans chaque territoire à travers les contrats de ville, dont la durée a été prorogée jusqu’en 2022. En cours de rénovation, ces contrats intègrent les engagements de l’État mais aussi des collectivités et d’autres signataires. « Un plus grand décloisonnement des acteurs et un travail collaboratif avec les associations sont aujourd’hui une priorité », affirme le gouvernement. Lors de sa communication en conseil des ministres, Julien Denormandie a fait un point d’étape sur les indicateurs de la mobilisation nationale (rénovation urbaine, sécurité, éducation, emploi, insertion et formation, associations...).

« Accélération » du renouvellement urbain

Le ministre a insisté tout d’abord sur l’accélération du nouveau programme national pour le renouvellement urbain (NPNRU), en indiquant, qu’entre mai 2018 et avril 2019, l’agence nationale pour le renouvellement urbain (ANRU) et ses partenaires ont approuvé la moitié des projets concernant 238 quartiers. 5,7 Md€ d’euros sont ainsi mis à disposition des collectivités et des bailleurs sociaux pour engager les chantiers de transformation des quartiers. Ces concours financiers doivent permettre la réalisation de projets estimés à près de 19 Md€, tous financeurs confondus, ajoute le gouvernement. Parallèlement, un plan de lutte contre les propriétés dégradées, lancé en octobre dernier, concerne 684 copropriétés, dont 128 en grande difficulté sur 14 sites faisant l’objet d’un suivi et d’une priorité nationaux.

60 « quartiers de reconquête républicaine » en 2020

Pour le déploiement de la police de sécurité du quotidien (PSQ), après une première vague en septembre 2018, 32 nouveaux quartiers de reconquête républicaine (QRR) ont été retenus en 2019. Ces créations portent à 47 le nombre de ces quartiers en 2019. Selon le gouvernement, ils seront au moins 60 en 2020, qui bénéficieront de la création de 1300 postes de policiers et gendarmes, soit entre 10 et 30 créations nettes d’effectifs par QRR.

Favoriser le label « cité éducative »

Pour favoriser l’éducation dans les quartiers, Julien Denormandie a évoqué le dédoublement des classes bénéficiant à 190 000 élèves de CP et CE1 depuis la rentrée 2018/2019. L’augmentation sur trois ans de la prime aux 60 000 personnels de l’éducation nationale exerçant dans les établissements REP+ a été mise en place. Les dispositifs « devoirs faits » et « plan mercredi » ont été déployés et la médiation à l’école, pour prévenir et gérer les conflits et le harcèlement, va être renforcée. Encore en matière d’éducation, le label « cité éducative » repose sur l’ambition de fédérer tous les acteurs des quartiers prioritaires de la politique de la ville pour faire « des établissements scolaires des lieux de réussite républicaine ». Dans les 80 territoires présélectionnés, des stratégies territoriales partagées seront définies pour créer un écosystème favorable autour de l’école et du collège, et offrir aux enfants et aux jeunes une éducation de qualité pendant le temps scolaire et hors temps scolaire. L’État accompagne le dispositif avec 100 M€ sur la période 2019-2021. Les projets seront labellisés en juillet pour une mise en œuvre à la rentrée de septembre.

Stages de 3ème de « qualité »

Pour proposer des « stages de qualité » aux élèves de 3ème scolarisés en REP+, un portail internet a été créé : monstagedetroisieme.fr. Grâce à la mobilisation des acteurs publics, des entreprises privées, des clubs d’entreprises et des associations, 33 000 offres de stages ont été mises à leur disposition. Cette mobilisation sera poursuivie et amplifiée à la prochaine rentrée et l’efficacité du dispositif améliorée grâce à l’élaboration d’une nouvelle plate-forme.

Formation et insertion professionnelle

Dans le cadre du plan d’investissement dans les compétences (PIC), 2 Md€ ont été fléchés pour le financement de parcours de formation qui devront bénéficier, d’ici 2022, à 150 000 jeunes sans qualification et 150 000 chômeurs de longue durée résidant dans les quartiers. Trois appels à projets ont déjà été lancés pour soutenir les expérimentations dans une logique d’essaimage (« prépa-apprentissage », « 100 % inclusion », « Repérer et mobiliser les publics invisibles »). Les dispositifs de deuxième chance mis en place pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes sont développés dans le cadre du PIC avec des objectifs précis exprimés en nombre de bénéficiaires issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Le délégué interministériel au développement de l’apprentissage dans les QPV doit parvenir à doubler le nombre d’apprentis dans ces quartiers.

Extension des emplois francs

Les emplois francs ont été étendus à de nouveaux territoires et leurs conditions d’attribution assouplies, avec l’arrêté du 22 mars 2019. Ainsi, plus de la moitié des habitants vivant en QPV est désormais éligible aux emplois francs, contre un quart précédemment. L’extension géographique de cette expérimentation concerne de nouveaux départements répartis sur l’ensemble du territoire, notamment l’ensemble des départements et régions d’outre-mer. En outre, le décret du 24 avril 2019 a assoupli les conditions d’éligibilité au dispositif et aux modalités d’attribution de l’aide.

Une journée de mobilisation le 13 juin

Un appel à manifestation d’intérêt, #TremplinAsso, doté de 15 M€, a été lancé pour soutenir les solutions portées par 44 associations structurantes, tout en préservant les crédits existants destinés aux associations de proximité. Parallèlement, un plan « associations de proximité » est en cours d’élaboration pour mieux répondre aux attentes des petites associations. Une journée de mobilisation sera organisée le 13 juin à la grande halle de la Villette, à Paris, pour promouvoir la dynamique d’une « grande équipe de la réussite républicaine ». Seront présents les établissements publics, les collectivités, les acteurs culturels, éducatifs, sportifs, etc.

Une bonne note de Ville & Banlieue

Au diapason des autres associations d’élus locaux, l'Association des maires Ville & Banlieue de France avait été très sévère suite au peu d’annonces d’Emmanuel Macron il y a un an. Mais aujourd’hui le jugement est beaucoup moins sévère suite aux actions mises en place. L’association reconnaît ainsi que « des mesures ont été obtenues » qui concernent notamment la « dynamisation » de l'Anru, les cités éducatives, le prolongement de la durée des contrats de ville, la nouvelle vague de création de « quartiers de reconquête républicaine » ou encore le soutien aux associations. Ville & Banlieue estime néanmoins qu’il reste « d'énormes chantiers à mener à bien, pour que l'égalité républicaine devienne une réalité pour les territoires urbains ». Et de citer les finances locales, les dispositifs de péréquation solidaire, l'habitat social, la tranquillité publique et la sécurité, l'accès à la formation et l'accompagnement vers l'insertion par l'emploi. Ville & Banlieue s’inquiète des réformes sur les contrats aidés et les missions locales qui « fragilisent gravement les outils en faveur des habitants les plus en rupture ».
Philippe Pottiée-Sperry
Philippe Pottiée-Sperry
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