« Attention à la dégradation des situations de travail »

Philippe Pottiée-Sperry
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Entretien sur l'impact de la crise sanitaire pour les agents avec Isabelle Estienne, psychologue du travail et consultante (1).

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En contexte post confinement, qu’est-ce qui doit alerter ?

Des modifications dans le comportement des agents : problèmes d’adaptation, résistance au changement, repli sur soi... mais aussi des troubles obsessionnels au-delà des gestes barrières appliqués ou à l’inverse le déni d’application de ces gestes voire une défiance. Sur le plan institutionnel, attention à la dégradation des situations de travail au sein de services et à la survenue de conflits entre collègues. L’isolement dans des espaces et tous ces temps réduits ou disparus où se jouait le lien social vont aussi avoir des conséquences sur la qualité des dialogues de travail et entre individus.

Que faire lorsque l'on perçoit un risque pour un agent ?

Prendre un temps d’arrêt pour analyser la situation et le comportement, pour observer si cette souffrance a sa seule cause dans le travail ou non. J’en appelle aussi aux ressources des collectivités au travers de l’évaluation des risques psycho-sociaux intégrée au document unique, avec toute une boîte à outils : ce qui est possible de faire, procédure de traitement des situations d’alerte, procédure de saisine des médecins, des instances… Ce qui peut fonctionner avec une personne peut se transposer à une équipe.

Quelles sont les erreurs à ne pas faire ? Et qu’est-ce qui doit être prioritaire ?

Croire que la situation va s’autoréguler d’elle-même, que les agents vont bien finir par s’habituer aux gestes barrières, de ne pas accuser réception de ce qui a été vécu, de demander de continuer de se surinvestir, de faire des réunions pour des réunions qui ne sont pas du temps où l’on réfléchit à comment nous pourrions améliorer notre façon de travailler, à ce que cela veut dire faire un bon boulot en mode dégradé... Le levier du dialogue collectif est important et constructif, et la priorité doit être l’ouverture du dialogue sur les situations de travail, sur ce qui fonctionne et dysfonctionne, avec des enjeux de reconnaissance, de sens donné au travail, de respect de l’autre et de santé.

Propos recueillis par Estelle Mallet-Chevassu

(1) http://isabelle-estienne.fr/

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