Quelques avancées contre les déserts médicaux

Philippe Pottiée-Sperry
Image
Quelques avancées contre les déserts médicaux

La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023 prévoit plusieurs mesures pour améliorer l’accès aux soins dans les déserts médicaux : création d’une 4ème année d'internat, aide à la reprise d’activité pour les médecins retraités, mise en place par l’ARS d’un guichet unique départemental pour l’installation des professions de santé...

Partager sur

Comme le projet de loi de finances, celui relatif au financement de la Sécurité sociale (PLFSS) est passé en force via l’article 49-3. Saisi de trois recours, le Conseil constitutionnel a rendu sa décision, le 20 décembre, en validant, l’essentiel du texte. La loi du 23 décembre a été publiée au Journal officiel du 24 décembre.  
Parmi les grands axes de la LFSS 2023 : le renforcement de la prévention, l’accès aux soins dans les déserts médicaux, le soutien aux familles en particulier pour la garde des enfants, la priorité au « vieillir à domicile », la lutte contre la fraude sociale...
La loi prévoit la mise en place de « rendez-vous de prévention » aux âges clés de la vie (20-25 ans, 40-45 ans et 60-65 ans) dès 2023. De plus, une nouvelle compétence de prescription vaccinale pour les pharmaciens, les infirmiers et les sages-femmes, sur les recommandations de la Haute Autorité de santé.

Lutter contre la pénurie médicale dans les territoires
Selon le ministère de la Santé, la loi prévoit une simplification importante des aides à l’installation des médecins libéraux dans les zones dites sous-dotées, ainsi que de nouvelles mesures pour renforcer la permanence des soins dans tous les territoires. 
Pour lutter contre la pénurie de médecins dans les territoires, plusieurs mesures sont mises en place dont la création d’une 4ème année d'internat de médecine générale, très décriée par les syndicats de médecins et les associations d’étudiants en médecine. Cette année supplémentaire sera consacrée à des stages en cabinet médical, en priorité dans les zones médicalement tendues. Le ministère de la Santé estime que la discussion parlementaire a permis de préciser que ces stages permettront « la découverte de communautés territoriales de santé ». Il souligne aussi « une simplification importante des aides à l’installation des médecins libéraux dans les zones dites sous-dotées ». 

Un guichet unique départemental d’aide à l’installation
Autres mesures prévues : l’organisation de consultations de médecins par les agences régionales de santé (ARS) dans les déserts médicaux à titre expérimental ; l’exonération des cotisations vieillesse en 2023 pour les médecins retraités qui reprennent leur activité ; l’assouplissement des règles de cumul emploi-retraite pour les médecins qui exercent dans un désert médical…
De plus, il est prévu une rationalisation des dispositifs d'aide à l'installation des médecins libéraux avec la création par l’ARS d’un guichet unique départemental d’accompagnement à l’installation des professions de santé. Ces guichets sont très attendus par les jeunes médecins qui demandent un point d’entrée unique pour réaliser toutes les démarches administratives de leur projet d’installation. De plus, l’ARS pourra conclure un contrat de début d’exercice avec un médecin remplaçant ou un interne.
Les différentes mesures de la LFSS devraient être complétées dans le cadre du CNR (conseil national de la refondation) « santé » et par les négociations de la prochaine convention médicale entre l’assurance maladie et les médecins libéraux. A noter que le Conseil constitutionnel a censuré l'élargissement de la permanence des soins aux infirmiers, aux dentistes et aux sages-femmes.

Satisfaction des infirmiers
L’Ordre national infirmier (ONI) s’est réjoui de plusieurs mesures qui marquent, selon lui « une étape majeure pour la reconnaissance de la profession infirmière et pour la lutte contre les inégalités sociales et territoriales en matière d’accès aux soins ». S’agissant de l’expérimentation de l’accès direct aux infirmiers en pratique avancée (IPA), sans prescription médicale dans le cadre d’un exercice coordonné, l’ONI estime que cela va « renforcer l’offre de soins de proximité, notamment dans les nombreuses zones où les patients n’ont pas accès à un médecin traitant ». 
Mais il regrette la censure du Conseil Constitutionnel, « pour des raisons de forme et non de fond », de l’élargissement de la permanence des soins aux infirmiers, aux dentistes et aux sages-femmes, comme premier recours. L’ONI appelle à l’intégration de cette disposition dans la proposition de loi sur l’accès aux soins présentée par Stéphanie Rist, prochainement débattue au Parlement pour rendre effective les accords du CLIO « santé » qui avaient été réalisé à la demande du gouvernement par les différents ordres professionnels de santé. 

37,3 Md€ pour la branche autonomie
L’objectif de dépenses de la branche autonomie est fixé à 37,3 Md€ en 2023. Les Ehpad devraient bénéficier de 3000 aides-soignants et infirmiers supplémentaires. De plus, d’ici 2027, 50 000 postes doivent être créés dans ces établissements. Pour favoriser le maintien à domicile des personnes âgées, 4000 places supplémentaires seront créées dès 2023 dans les services d'aide à domicile. 
De même, le gouvernement s'est engagé à relever le tarif des services d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD) de 22 à 23 € par heure d'intervention. À partir de 2024, le tarif plancher national sera révisé par référence au montant de la majoration pour tierce personne (revu tous les ans suivant l’inflation). Pour lutter contre l'isolement, les bénéficiaires de l'APA (allocation personnalisée d'autonomie) auront le droit à partir du 1er janvier 2024 à deux heures supplémentaires par semaine dédiées au lien social.
À la suite de l'affaire "Orpéa", les Ehpad seront mieux contrôlés avec l'édiction de nouvelles règles de transparence et de régulation financière. Ces règles ont été renforcées par les parlementaires, de même que les sanctions financières encourues (5% maximum du chiffre d'affaires contre 1% aujourd'hui).
Sur le champ du handicap, le PLFSS encourage la transformation des établissements médico-sociaux et promeut les démarches inclusives. Sur amendement du gouvernement, la prise en charge des enfants en situation de polyhandicap et de paralysie cérébrale est améliorée. Un parcours de rééducation et réadaptation coordonné, en ville, leur sera proposé.

Philippe Pottiée-Sperry
Partager sur

Inscrivez-vous gratuitement à nos newsletters

S'inscrire