Service public de la petite enfance : le « oui, mais » de l’AMF

Philippe Pottiée-Sperry
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Service public de la petite enfance : le « oui, mais » de l’AMF

En première ligne sur l’accueil de la petite enfance, les maires s’inquiètent de la forte pénurie de professionnels et des difficultés de recrutement. D’accord sur le principe d’un service public de la petite enfance, l’AMF fixe une liste de conditions « pas négociables » avec l’Etat.

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70% des établissements d’accueil des jeunes enfants (EAJE) sont gérés par les communes et les intercommunalités. « Il s’agit d’une politique non obligatoire mais qui est indispensable », insiste d’emblée Xavier Madelaine, maire d’Amfreville (Calvados) et co-président du groupe de travail « Petite enfance et parentalité » de l’AMF, suite à une réunion de ce groupe de travail le 7 juin. 

Grande diversité des modes d’accueil
« Le rôle des élus locaux est crucial dans cette politique en proposant une grande diversité de modes d’accueil sur leur territoire (public, associatif, privé, collectif, individuel, préscolarisation…) et de services, afin de répondre à la diversité des besoins », ajoute Clotilde Robin, première adjointe au maire de Roanne (Loire), vice-présidente de Roanne agglomération et autre coprésidente du groupe de travail de l’AMF. 
Les élus soutiennent également les acteurs associatifs et privés par des subventions ou des réservations de places qui sécurisent l’équilibre financier des structures.

Préparation de la prochaine COG
Les maires sont associés à la préparation de la prochaine COG (convention d'objectifs et de gestion) de la branche famille, signée entre la Cnaf (Caisse nationale des allocations familiales) et l'Etat, qui se déroule actuellement. « C’est la première fois que cela arrive », salue Clotilde Robin qui plaide aussi pour que l’AMF fasse partie du conseil d’administration de la Cnaf. De plus, elle demande de revoir et adapter le bonus « territoire », le bonus « mixité sociale » ou le financement de la PSU (prestation de service unique). « Nous souhaitons également des relations plus faciles et plus fluides localement avec les Caf », ajoute-t-elle. 
Au-delà, l’AMF défend la « remise à plat du modèle actuel de financement des EAJE et des dispositifs de soutien à la parentalité développés par le bloc communal ».

Compensation intégrale de la part de l’Etat
Les élus locaux ont aussi été associés à l’avis rendu par le Cese (Conseil économique, social et environnemental), en mars dernier, sur un « service public de la petite enfance », idée reprise dans le programme présidentiel d’Emmanuel Macron. L’AMF s’est dit favorable dans le principe, « même si certains élus restent sceptiques et craignent des règles plus rigides », note Xavier Madelaine. 
« La création d’un tel service public signifie qu’il deviendrait obligatoire pour les communes, précise Clotilde Robin. Nous sommes d’accord mais nos conditions ne sont pas discutables notamment sur une compensation intégrale de la part de l’Etat de toutes les dépenses induites par cette compétence nouvelle, ses modalités devant être coconstruites par l’AMF et l’exécutif ». 
Autre bémol : le refus de mettre en place un droit opposable à une solution d’accueil, à l’instar de ce qui existe pour le Dalo (droit au logement opposable), au motif son impossibilité d’application. C’est de même plutôt la position du Cese qui reste prudent sur sa faisabilité.

« Laisser de la souplesse aux communes »
Par ailleurs, l’AMF demande que les initiatives portées localement « restent à la main des territoires avec une certaine souplesse indispensable ». Cette souplesse laissée aux maires devrait porter sur les modalités d’organisation du service de la petite enfance. 
Sur ses gardes, l’AMF, lors de son bureau du 10 mai dernier, a insisté, en effet, pour que la mise en place de ce service public « tienne compte de la grande diversité des modes d’accueil et de gestion existants » et laisse de « la souplesse aux communes dans le choix des modes de gestion, dans le respect du principe de subsidiarité ».

Forte pénurie de personnels
Clotilde Robin et Xavier Madelaine tiennent également à alerter sur la pénurie des personnels petite enfance qui est de plus en plus forte et touche tous les types de territoires. « Ce désamour des professionnels constitue le premier frein à la création de nouvelles places, regrette la coprésidente du groupe de travail de l’AMF. Nous avons interpellé tous les acteurs concernés que sont les régions, la Cnaf et la DGCS [Direction générale de la cohésion sociale]. Nous venons d’adresser un courrier à chaque président de région ». L’AMF souligne « l’urgence de développer de nouvelles filières de formations accessibles financièrement et créées en priorité à proximité des zones où les besoins sont les plus importants.
Elle défend aussi la mise en place d’un plan métier « pour un accueil de qualité de la petite enfance ». Objectif : créer et renforcer les liens et passerelles entre les différents métiers de la petite enfance aujourd’hui trop cloisonnés. « Ce plan doit permettre de proposer de réelles évolutions de carrières aux professionnels afin de renforcer l’attractivité de ces métiers et sera également l’occasion de faire le point sur les évolutions des besoins et attentes des familles », indique l’AMF. 

Départs en retraite des assistantes maternelles
Dans les territoires ruraux, les assistantes maternelles constituent souvent la seule solution. « Il va y avoir aussi un problème de personnels car beaucoup d’entre elles vont partir en retraite d’ici cinq ans », indique Xavier Madelaine. Facteur aggravant de cette situation, la baisse importante de vocation sur ce métier. 
Autre problème : le manque fréquent de foncier pour construire de nouvelles places d’accueil. « Nous voulons bien investir mais nous avons absolument besoin d’aide sur les dépenses de fonctionnement », insiste Clotilde Robin.
 

Philippe Pottiée-Sperry
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