Alerte sur la situation des personnels des Sdis

Philippe Pottiée-Sperry
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Un rapport de la Cour des comptes sur les personnels des Sdis (services départementaux d'incendie et de secours), rendu public le 26 mars, s’alarme sur leur situation. Il pose un diagnostic inquiétant : une stagnation des effectifs, la dégradation de la situation financière des départements, qui sont leurs principaux financeurs, et la fragilisation du statut des sapeurs-pompiers volontaires.

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Autre difficulté des Sdis : des sollicitations toujours plus nombreuses, surtout en matière de secours d'urgence à personne, en raison notamment de la désertification médicale et du vieillissement de la population.

Face à « cette évolution qui n’est pas durablement soutenable », la Cour des comptes estime que l'État et les départements doivent offrir aux Sdis « un cadre et des outils qui leur permettent de mieux maîtriser leurs dépenses de personnel ». Elle plaide aussi pour procéder à une revue des missions des Sdis afin de les recentrer sur le cœur de leurs attributions.

La nécessaire maîtrise des charges de personnel

L'activité des Sdis est de plus en plus tournée vers les secours à victime et les aides àla personne, ces deux activités ayant progressé respectivement de 13 % et 26,6 % entre 2011 et 2017. Elles représentent désormais 84 % de l'ensemble de leurs missions (contre 7 % seulement pour la lutte contre les incendies). Le budget total de fonctionnement des Sdis était de 4,6 Md€ en 2017. Les sapeurs-pompiers volontaires assurent les deux tiers de leur temps d'intervention, pour un quartdes rémunérations. Si les effectifs des sapeurs-pompiers professionnels (40 000), des sapeurs- pompiers volontaires (195 000) et des personnels administratifs, techniques et scientifiques (11 000) sont relativement stables depuis 2011, la masse salariale a grimpé plus vite que les autres charges de fonctionnement des Sdis. Parmi les explications : le coût des réformes statutaires, mal évalué selon la Cour des comptes. Conséquence : leur part dans les dépenses de fonctionnement est passé à 83% en 2017 (80% en 2010).

Une gestion des RH à améliorer

La Cour met en évidence l'implication insuffisante de la DGSCGC (direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises) dans la définition de la doctrine d'emploi des Sdis, l'élaboration des textes statutaires régissant les sapeurs-pompiers et la gestion de leurs rémunérations. Ainsi, sur la base d'une même réglementation, le régime indemnitaire des sapeurs-pompiers professionnels connaît de fortes variations selon les Sdis. La Cour dénonce ici « la complexité et le défaut de lisibilité ». De même, l'absence persistante d'encadrement de la faculté offerte aux sapeurs-pompiers professionnels d'exercer parallèlement des activités de sapeurs-pompiers volontaires, et de bénéficier à ce titre d'indemnités non soumises à prélèvements fiscaux et sociaux, favorise les abus. De bonnes pratiques se dégagent toutefois, reconnaît la Cour en jugeant que c’est « à présent à la DGSCGC de les valoriser et les promouvoir ». Par ailleurs, les Sdis sont confrontés au défi de la professionnalisation et de la mutualisation de la gestion de leurs ressources humaines, entre eux et avec les départements.

Des organisations du temps de travail à réformer

Le temps de travail des personnels des Sdis et de la sécurité civile se traduit par « des organisations variées, peu cohérentes et dérogeant souvent aux règles de droitcommun », critique la Cour des comptes. En pratique, il est souvent inférieur à la durée légale annuelle de 1607 heures, et cela pour tous les types de personnel. Dans les Sdis, la tendance à la réduction du nombre de gardes effectuées par les sapeurs-pompiers professionnels se poursuit et l'absentéisme a augmenté depuis 2011. Par ailleurs, plusieurs Sdis ne respectent pas le repos réglementaire qui limite le temps de travail maximum, notamment lorsque des sapeurs-pompiers professionnels assurent des missions de volontariat durant leur repos réglementaire.Enfin, un arrêt récent de la Cour de justice de l'Union européenne, qui assimile lessapeurs-pompiers volontaires à des travailleurs, fragilise le modèle français de sécuritécivile en obligeant à réexaminer les modalités de recours au volontariat, au prix deconséquences financières inquiétantes, s’inquiète la Cour des comptes.
P.P.-S.
Philippe Pottiée-Sperry
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