Débat sur le nombre de fonctionnaires : c’est reparti !
C’est reparti ! Comme lors de la campagne présidentielle de 2017, le débat sur la suppression du nombre de fonctionnaires revient chez les candidats.
Parmi ceux à l'investiture des Républicains, Valérie Pécresse a tiré la première en proposant de supprimer 150 000 postes de fonctionnaires dans « l'administration administrante », c'est-à-dire « des fonctionnaires qui gèrent des normes et des procédures », durant le prochain quinquennat. Faisant cette proposition dans un entretien au site du journal L’Opinion, le 19 octobre, elle a dès les jours suivants fait monter ce chiffre à 200 000. « Le grand concours du n'importe quoi de campagne est ouvert », a fustigé sur Twitter Amélie de Montchalin, la ministre de la transformation et de la fonction publiques. Et de dénoncer aussi la formulation « administration administrante » : « cette expression bien floue traduit le manque de vision de l'État à droite. C'est le retour de la méthode RGPP : les coupes sombres sans l'efficacité », faisant référence à la révision générale des politiques publiques (RGPP) menée durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, de 2007 à 2012.
« Débureaucratisation du pays »
La présidente de la région Ile-de-France affirme vouloir économiser 45 Md€ en supprimant des postes de fonctionnaires. Plaidant pour « une débureaucratisation du pays et une décentralisation avec un lâcher-prise de l'Etat pour supprimer les doublons », Valérie Pécresse veut recentrer l’Etat « sur ses trois missions prioritaires : protéger, éduquer, soigner, avec là où il le faut des postes supplémentaires pour la justice, l'éducation et les soins ». Selon elle, « il ne s'agit pas de dégrader le service public, ni de casser la reprise. Mais les dépenses doivent baisser ». Ne voulant pas préciser quelle fonction publique serait concernée, elle a indiqué le 20 octobre sur France Info que sa proposition consistera à « dénormer, débureaucratiser et supprimer des procédures » ainsi qu’à « supprimer les structures qui font doublon ».
Préférence pour le « sur-mesure »
Rappelons qu’en 2007, François Fillon était celui qui allait le plus moins en proposant de supprimer pas moins de 500 000 agents publics en cinq ans ! Les autres postulants à la primaire de la droite plaidaient tous pour des réductions de postes mais sans avoir la main aussi lourde. Parmi les autres candidats à la précédente présidentielle, Emmanuel Macron défendait une réduction de 120 000 postes, 70 000 dans les collectivités et 50 000 dans la fonction publique d'Etat. L’objectif fut abandonné dès juillet 2019, notamment avec la crise des gilets jaunes puis la crise sanitaire.
Aujourd’hui, chez d’autres candidats à la primaire de la droite, en particulier Michel Barnier et Xavier Bertrand, les propositions de Valérie Pécresse ne sont pas partagées, le président de la région des Hauts-de-France préférant faire du « sur-mesure ». Un discours moins offensif que par le passé mais à qui on peut reprocher également un certain flou en se sachant pas jusqu’où ce sur-mesure pourrait aller. « On doit réduire le nombre de fonctionnaires à l’occasion des départs en retraite et des fins de contrat. Je veux être capable de faire du sur-mesure », a affirmé au micro de Sud Radio Xavier Bertrand. A l’inverse, d’autres candidats à la primaire prônent d’aller plus loin comme Eric Ciotti, député (LR) des Alpes-Maritimes, qui appelle à réduire de 250 000 le nombre d’agents publics. Avec une étrange formule prononcée au micro d’Europe 1 : « Plus on a de fonctionnaires, moins on a un service public qui répond aux attentes des Français ».
Ne pas réduire la fonction publique à un coût
Parmi les premières réactions à ce débat, le nouveau think tank « Le sens du service public » regrette une fois encore la stigmatisation des fonctionnaires et de « réduire la fonction publique à un coût et à des dépenses qu'il faudrait réduire ». En défendant une position qui se veut responsable, il plaide pour « s'interroger sur les missions à rendre, à moderniser et pourquoi pas à supprimer. Encore faut-il assumer de les nommer, de préciser le niveau attendu de qualité du service public, l'évolution du nombre de lits à l'hôpital, celle du nombre d'élèves par classe ». Selon le collectif de fonctionnaires, issus des trois fonctions publiques, « réinterroger les services publics obligerait plutôt à proposer aux Français des évolutions de missions, un niveau de service rendu ou d'accompagnement des besoins sociaux, donc à présenter les missions pour lesquelles un haut niveau de qualité de service est attendu et celles pour lesquelles des efforts de productivité s'avèrent indispensables ».
Dénonçant le fait de pointer une catégorie d’actifs « comme des dépenses inutiles sans considération des missions qu’ils accomplissent », le think tank plaide au contraire pour que le débat entre les candidats à la présidentielle « donne du sens aux transformations, du sens aux missions des administrations qui leur permettront de remplir leurs promesses, du sens au service public qui fait partie de leur responsabilité politique ». Un prisme intéressant et pertinent qui, espérons-le, ne restera pas lettre morte.
Philippe Pottiée-Sperry
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