Habitat : la Fondation Abbé Pierre prône une pleine compétence intercommunale

Philippe Pottiée-Sperry
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Dans un contexte social tendu, le 25ème rapport sur « l’État du mal-logement en France » de la Fondation Abbé Pierre a été rendu public le 31 janvier. Comme chaque année, il alerte l’opinion publique sur « la multiplication des atteintes au droit au logement et à l’hébergement d’urgence ». Aujourd’hui, « quatre millions de personnes souffrent de mal-logement ou d'absence de logement personnel ».

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Au-delà, en prenant la situation de tous les publics touchés de façon moins prégnante, mais avec de réelles répercussions sur la vie de famille, la santé, l'environnement quotidien, le confort ou les fins de mois, ce sont pas moins de 15 millions de personnes qui sont concernées par la crise du logement. Parmi elles, plus d'1,2 million de locataires se trouvent en situation d'impayés de loyers ou de charges et risquent l'expulsion.

Hausse de la précarité énergétique

Le rapport pointe aussi la précarité énergétique des foyers modestes. 3,6 millions de personnes ont froid dans leur logement, pour des raisons liées à la précarité. Autre chiffre inquiétant : les Français sont 44% de plus qu'en 2006 à se priver de chauffage à cause de son coût. Selon la Fondation, « malgré certaines initiatives à encourager, le gouvernement, trop souvent, aggrave la situation par une politique de coupes budgétaires inédites dans le domaine du logement ». Elle rappelle notamment les 3,9 Md€ de coupes sur les APL. Si la situation des familles qui en sont victimes est fréquemment mise en avant, le sort des personnes seules est généralement oublié. Face à l’accroissement des célibataires (35 % des ménages français), le rapport critique un parc de logements pensé uniquement pour les familles, nécessitant donc une politique du logement mieux adaptée.

Appel aux futurs élus

À l’approche des municipales, la Fondation Abbé Pierre interpelle les candidats et les citoyens. Pour souligner que des solutions existent, un chapitre est consacré aux marges de manœuvre des communes et intercommunalités pour résorber la crise du logement.Respect des droits des personnes sans abri, mise en œuvre du « Logement d’abord », réforme des attributions HLM, respect des objectifs de la loi SRU, résorption de l’habitat indigne et de la précarité énergétique, rénovation urbaine… : sur 15 sujets jugés majeurs, le rapport estime que « les futurs élus doivent et peuvent agir, à leur échelle, pour faire reculer le mal-logement sur leur territoire ».

Une compétence éclatée

Son constat : le logement reste une compétence éclatée dans un « millefeuille » institutionnel, dans lequel les responsabilités se diluent. Il en résulte aussi des zones de flou sur certains sujets majeurs et une segmentation de l’action publique. Pour la production de logements sociaux, le logement des personnes sans-abri ou le traitement de l’habitat indigne, elle dénonce « les renvois de balles entre municipalité, département, État, justice ». En citant de nombreux exemples, la Fondation demande l’amplification des responsabilités des intercommunalités en matière d’habitat. « Mais elles ne pourront pas s’imposer comme l’acteur de référence des politiques du logement sans une véritable légitimité démocratique, qui lui fait encore défaut », juge-t-elle. Le deuxième message est adressé plus généralement aux collectivités en les appelant à mieux coopérer pour dépasser l’émiettement des compétences. Le rapport liste ici des outils à leur disposition sur 15 grandes questions liées au mal logement.

Trois objectifs complémentaires

Par ailleurs, en revendiquant « une remise en cause des orientations générales de la politique du logement dans le sens d’une plus grande solidarité et d’une plus grande justice sociale en direction des plus pauvres, mais aussi des catégories modestes », la Fondation Abbé Pierre demande la reconnaissance de trois objectifs complémentaires « pour donner à la politique du logement des finalités claires et ambitieuses » : -un logement pour chacun (accès au logement), -une ville pour tous (ségrégation urbaine, répartition spatiale du logement social, politique de renouvellement urbain), -une planète pour demain (transition écologique et lutte contre la précarité énergétique).P.P.-S.
Philippe Pottiée-Sperry
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