Municipales : l’horizon s’éclaircit
Sollicité début mai par le Premier ministre, le conseil scientifique Covid-19 a rendu un avis favorable sur l’installation des conseils municipaux élus au premier tour des municipales, le 15 mars, dans 30 139 communes (431 739 conseillers municipaux).
Cet avis a été transmis au Parlement le 12 mai. Le même jour, Edouard Philippe a donné son feu vert en indiquant aux députés que « la date d’entrée en fonction des conseillers municipaux et communautaires est fixée au lundi 18 mai ». Et de préciser que « la première réunion permettant l’installation des équipes et notamment l’élection du maire et des adjoints s’effectuera entre le 23 et le 28 mai, dans le respect des condition sanitaires ». Le décret qui prévoit leur installation a été publié au Journal officiel du 15 mai.
Complexité de la situation des intercommunalités
France urbaine « salue cette annonce qui correspond à ce que les associations d’élus avaient demandé et permet aux équipes élues au premier tour de participer activement à la mise en œuvre de la stratégie de déconfinement sur leurs territoires ainsi qu’à la relance économique, écologique et sociale du pays ».
Le Premier ministre a aussi indiqué que les 154 conseils communautaires déjà entièrement constitués se réuniront au plus tard le 8 juin et pourront élire leurs exécutifs. La situation est plus complexe pour les autres intercommunalités qui doivent attendre la décision d’ici fin mai de reporter ou non le second tour, ou de reporter l’ensemble de l’élection (premier et second tours) à la rentrée. Dans ce dernier cas, des « conseils mixtes intérimaires » seraient alors mis en place.
Une installation dans le respect de règles sanitaires strictes
L’avis du conseil scientifique Covid-19 formule des recommandations pour la tenue de la première réunion des conseils municipaux, dans le respect de règles sanitaires strictes. Dans le cadre du déconfinement, le critère d’occupation des espaces ouverts au public est fixé à 4m2 minimum par personne présente dans un lieu fermé. Il devra s’appliquer lors de la réunion d’installation des conseils. En conséquence, elle pourra être organisée dans un autre lieu (salle des fêtes, gymnase municipal...) que la salle dédiée de la mairie si celle-ci est trop petite. Pour limiter le nombre de personnes présentes, le conseil propose une réunion à huis-clos, l’abaissement du quorum pour valider l'élection du maire et de ses adjoints ou le recours à la procuration. De plus, l’ordre du jour devra être limité pour réduire le plus possible la durée de la réunion. En plus des gestes barrières et des règles de distanciation physique, le port du masque est recommandé.
Déroulement à huis-clos ou avec moins de personnes
La plupart de ces recommandations sont reprises dans une ordonnance, présentée au conseil des ministres du 13 mai et publiée le lendemain au Journal officiel. Parmi les mesures prévues : réunion dans un autre lieu que la mairie, si la salle du conseil est trop petite ; déroulement à huis-clos ou avec un nombre limité de personnes : quorum atteint si tiers et non la moitié des élus sont présents.
Compte tenu du prolongement de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet, l’ordonnance prévoit également d’autres assouplissements pour faciliter les décisions publiques locales. Il s'agit notamment des modalités simplifiées de transmission électronique des actes au contrôle de légalité, de l'attribution automatique à chaque responsable d'exécutif local de l’intégralité des pouvoirs pouvant lui être délégués par son assemblée délibérante, etc. Des dispositions sont également prévues pour l’organisation des conseils communautaires.
Second tour avant fin juin ?
Il reste la question délicate de la date du second tour des municipales dans les 4922 communes, dont la quasi intégralité des grandes villes. Selon le journal Le Monde, le calendrier fixé par le gouvernement d’attendre l’avis du conseil scientifique sur la possibilité ou non d’organiser ce second tour avant fin juin, prévu pour le 23 mai, pourrait être avancé au début de la semaine prochaine. De quoi susciter des espoirs chez beaucoup d’élus alors que le report à la rentrée du scrutin (avec l’obligation de refaire le premier tour) semblait inéluctable il y a encore peu. Le gouvernement envisagerait d’organiser un vote au Parlement sur cette question de la date du second tour.
Dans un courrier commun au Premier ministre, envoyé le 13 mai, les présidents de l’AMF et de France urbaine, François Baroin et Jean-Luc Moudenc, tout en soulignant « le souci prioritaire du risque sanitaire », jugent « utiles » que les 5000 scrutins encore nécessaires « soient organisés le plus rapidement possible, dans le courant du mois de juin, pour retrouver un fonctionnement normal de nos institutions locales qui leur permette de remplir pleinement leur rôle dans les défis économiques et sociaux actuels ».
« Des projets à l’arrêt »
Sur Public Sénat, le 14 mai, Jean-Luc Moudenc, a estimé que « dès l’instant où tout rouvre peu à peu, cela paraît curieux de ne pas pouvoir ouvrir un bureau de vote avec des mesures sanitaires renforcées. Il y a beaucoup d’arguments de fond pour un achèvement du processus électoral dans les 5000 communes qui n’ont pas élu leur conseil entièrement ». Sur la même longueur d'onde, François Rebsamen, le maire de Dijon, estime que « le second tour doit se tenir en juin. On pourrait aller dans les magasins mais on ne pourrait pas aller voter ? La démocratie locale est vitale pour la République. »
« Tant que les exécutifs ne sont pas installés, les projets sont à l’arrêt et la machine économique ne peut repartir », souligne également le maire de Toulouse. Son courrier commun avec François Baroin insiste sur l’impossibilité actuelle de lancer des projets d’investissements lourds. Et de rappeler que « les communes et leur intercommunalité sont les premiers donneurs d’ordre de la commande publique et joueront un rôle important dans le soutien au tissu économique de proximité ».
Pour faciliter l’exercice du droit de vote des personnes plus vulnérables, les deux élus préconisent de « moderniser, par une ordonnance, l’établissement des procurations, en instaurant une procédure électronique au lieu de l’actuel système archaïque ». « Une mesure facilitatrice et de bon sens », selon eux.
Philippe Pottiée-Sperry