Les élus pointent « le manque d’ambition » du projet de loi "4D"

Philippe Pottiée-Sperry
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Parmi les réactions des associations d’élus locaux au projet de loi "4D", présenté au conseil des ministres du 12 mai, Régions de France « salue » la volonté de discussion de Jacqueline Gourault lors de la préparation du texte et la volonté politique du Premier ministre de le faire aboutir, mais déplore « le manque d’ambition globale du texte, loin du nouvel acte de décentralisation annoncé il y a deux ans ».

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L’association se veut néanmoins constructive en évoquant « des avancées intéressantes ». Et d’indiquer : « Les régions, au sein de Territoires Unis [AMF, ADF et Régions de France], feront le maximum pour enrichir le texte au travers du débat parlementaire. Elles s’inscrivent en cela dans la volonté exprimée par le Sénat de le muscler et d'essayer de le faire aboutir avec un niveau d’ambition rehaussé ».

Sur le fond, Régions de France regrette que le projet de loi ne comporte aucune disposition relative à la politique publique de l’emploi ou à l’approfondissement de la compétence économique. Saluant « la réussite des comités État-Régions qui ont bien fonctionné en matière de gestion des fonds européens ou d’action économique », Régions de France déplore que le texte n’institutionalise pas une instance « indispensable à la bonne mise en œuvre des grandes politiques publiques partagées entre l’Etat et les régions, dont la cohésion et l’aménagement des territoires ». Par ailleurs, alors que le projet de loi « Climat » est en cours de discussion parlementaire, elle regrette aussi que le projet de loi « 4D » ne clarifie pas les rôles des différents niveaux de collectivités en matière de transition écologique.

« Les oubliés d’une loi 4D sans relief »

Dans une tribune publiée par le Monde du 11 mai, un collectif de 47 présidents de département, de droite comme de gauche, estime que leurs collectivités sont « les oubliés d’une loi 4D sans relief ». Parmi les signataires figurent Jean-Luc Gleyze, président de la Gironde et du groupe de gauche de l’Assemblée des départements de France (ADF), ou François Sauvadet, président de la Côte-d’Or et du groupe de la droite, du centre et des indépendants (DCI) de l’ADF. Selon les élus, le texte ne tire aucune leçon du passé, ni de la crise sanitaire, ni de la loi « NOTRe » « et ne donne pas de réelle perspective pour l’avenir. Pire, il semble oublier les départements que la crise sanitaire a pourtant renforcés en tant que collectivités de proximité ». De plus, il n’aborde pas la question qui fâche, celle des finances. « Il n’y a pas de pouvoir politique sans pouvoir fiscal », rappellent les départements.

« La réponse à la succession de crises que nous traversons exige des compétences mieux réparties, plus lisibles, avec une plus grande autonomie des acteurs locaux, et notamment fiscale, pour répondre au mieux aux enjeux du monde d’après », affirme le collectif. Les départements pointent le transfert prévu des routes nationales aux régions, pourtant pas demandeuses, « alors qu’elles ne disposent ni de l’ingénierie ni des moyens techniques et humains pour entretenir ce réseau auquel l’Etat ne fait plus face », alors que les départements « assurent déjà avec efficacité la gestion des 400 000 km de routes départementales dont beaucoup leur ont été transférées, en 2004, dans un moins bon état qu’elles ne le sont aujourd’hui ! ». De même, en matière de protection de la biodiversité, le texte prévoit d’instaurer la tutelle des régions sur les départements, « alors que ces derniers acquièrent, depuis des décennies, des espaces naturels sensibles qu’ils préservent, entretiennent et partagent avec le public avec succès ».

Consolider le binôme maire-préfet

Du côté des maires, l’association Villes de France (villes de 10 000 à 100 000 habitants) veut rapidement présenter « des propositions concrètes pour enrichir le projet de loi ». Y figurera notamment le principe « compétence déléguée, pouvoir de police dédié » pour améliorer l’efficacité des mesures prises dans le cadre de nouvelles compétences. Elle souhaite aussi la possibilité d’un transfert de compétences différenciées sur le territoire intercommunal, notamment en matière d’urbanisme. Sur le volet santé, elle se dit satisfaite du renforcement du rôle des élus locaux dans la gouvernance des ARS mais demande la même chose pour la gouvernance des hôpitaux « en réaffirmant la place et le pouvoir de décision des maires dans les conseils de surveillance des centres hospitaliers par un pouvoir décisionnel et non plus honorifique ». En matière de déconcentration, Villes de France plaide pour renforcer l’autorité du préfet de département et consolider le binôme maire-préfet.

Se félicitant également de la présentation du projet de loi « 4D », l’Association des petites villes de France (APVF) demande « un texte véritablement à la hauteur des nouveaux enjeux d’après crise ». Pointant ces dernières années « le manque de confiance de l’Etat envers les élus locaux » comme « les failles et les carences d’un système hypercentralisé et rigide, particulièrement dans le domaine de la santé », l’APVF estime qu’« il est plus que temps de donner des marges de souplesse, d’agilité et des leviers d’action supplémentaires aux territoires et de permettre une différenciation accrue de l’action publique locale ».

Philippe Pottiée-Sperry

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