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La Cour des comptes juge la situation financière des collectivités « très favorable »

Philippe Pottiée-Sperry
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La Cour des comptes juge la situation des collectivités « très favorable »

La bonne santé financière des collectivités résulte de leur bonne gestion mais aussi de la dynamique favorable des transferts d’impôts nationaux. Dressant ce constat, les magistrats financiers jugent « nécessaire » leur participation au redressement des finances publiques.

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Dans son rapport annuel sur les finances locales, publié le 4 juillet, la Cour des comptes juge que les collectivités territoriales ont encore connu, en 2022, « une situation financière très favorable, comme le montre l'évolution de leur épargne, de leurs dépenses d'investissement et de leur endettement ». Selon les magistrats financiers, ce constat vaut pour les trois grandes catégories de collectivités (communes et EPCI, départements, régions), avec néanmoins « des disparités internes ». 
S’ils reconnaissent que cette bonne santé des collectivités résulte de leurs choix de gestion, ils insistent aussi sur une autre explication : la dynamique favorable des transferts d’impôts nationaux visant à compenser la suppression d’impôts locaux. Et d’ajouter qu’elles ont également bénéficié « de la protection de l’État en cas d’accident conjoncturel (crise sanitaire en 2020, poussée de l’inflation en 2022) ». Pas sûr que ces constats soient partagés par tous les élus locaux !

Hausse des recettes de TVA
Dans le détail, les produits de fonctionnement des collectivités ont augmenté, en 2022, à un niveau identique à celui de l'inflation (+ 5,2 %) et un peu plus élevé que celui de leurs charges de fonctionnement (+ 5,0 %). La hausse des produits a été tirée par les recettes de TVA (+ 9,2 %), amplifiées par l'inflation et la hausse de la consommation. 
Selon la Cour, « la TVA compense la suppression de la DGF des régions (depuis 2018), de la taxe d'habitation sur les résidences principales (depuis 2021) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (depuis 2021 pour les régions et 2023 pour les départements et les intercommunalités) ». Cet impôt procure désormais aux régions plus de la moitié de leurs recettes de fonctionnement et constitue la première recette des départements.

Impact de l’inflation
À l'exception de la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques et de la taxe sur les cartes grises, les recettes de tous les autres impôts ont augmenté. C'est le cas de la taxe foncière sur les propriétés bâties affectée aux communes (+ 5,6 %), sous l'effet de l'indexation des bases d'imposition sur l'inflation constatée et de hausses de taux par certaines communes.
L'augmentation des charges de fonctionnement traduit l’impact de l'inflation : effets directs sur les achats de biens (carburants, énergie, alimentation) et de services ; effets indirects sur les dépenses de personnel, à travers la revalorisation du point d'indice de 3,5 % au 1er juillet. 
La progression des dépenses de personnel résulte aussi de mesures catégorielles en faveur de certains agents et d'une hausse des effectifs de fonctionnaires et, plus encore, de contractuels.

+ 6,8 % pour les dépenses d'investissement 
L'épargne brute (solde des recettes et des charges de fonctionnement) constitue la principale source de financement des investissements. En 2022, son montant (44 Md€) a continué d’augmenter. Les dépenses d'investissement (68 Md€) ont ainsi continué de croître (+ 6,8 %) même si l’effet de l'inflation réduit leur progression en volume.
Par ailleurs, le poids de l’endettement financier des collectivités (186 Md€) a continué de se réduire : il représente 4,3 années d'épargne brute contre 5,3 années en 2016. Il est d'autant plus limité que les collectivités ont une trésorerie élevée (60 Md€), constatent les magistrats financiers.

Disparités entre collectivités
Les charges du bloc communal ont augmenté un peu plus que leurs recettes de fonctionnement, ce qui n'a pas empêché leur épargne et leurs dépenses d'investissement de continuer à croître. 14 % des communes et 8 % des intercos connaissent une épargne négative après remboursement des emprunts. Ces proportions ont baissé par rapport à l'avant crise sanitaire. 
Les recettes de fonctionnement des départements ont un peu plus augmenté que leurs charges. Ces collectivités ont connu contexte favorable, estime la Cour des comptes qui cite la dynamique des recettes de TVA, le maintien des recettes de droits de mutation à titre onéreux à un niveau exceptionnel et la réduction des dépenses de RSA qui se poursuit. Leurs dépenses d'investissement ont augmenté.
Grâce à la TVA, les recettes de fonctionnement des régions ont plus augmenté que leurs charges, ce qui leur a permis de continuer à reconstituer leur épargne, qui avait chuté en 2020. Leurs dépenses d'investissement continuent à s'inscrire à un niveau élevé.

Dynamique des recettes de TVA
Sous l'effet de la compensation par la TVA de la suppression d'impôts locaux, les transferts financiers de l'Etat ont couvert un peu plus de 50 % des recettes totales des collectivités en 2022, contre 36 % en 2019. « Sauf exception, les collectivités bénéficient de la totalité de la dynamique annuelle des recettes de TVA », souligne la Cour. Et d’indiquer, qu’en 2022, cet impôt leur a procuré 5,6 Md€ de recettes supplémentaires par rapport à celles qui auraient résulté du maintien des impôts supprimés. Elle estime donc que la question se pose sur « l’affectation aux seules collectivités ou la répartition avec l’État de la dynamique des recettes de TVA qui ont remplacé depuis 2021 des impôts locaux » (taxe d’habitation sur les résidences principales et CVAE).

Le retour des contrats de Cahors ?
Dressant ce constat, les magistrats financiers défendent « une nécessaire participation des collectivités au redressement des finances publiques ». Pas de quoi ravir les associations d’élus locaux qui sont vent debout contre toute idée du retour des contrats de Cahors ou d’un équivalent. 
La Cour rappelle que le programme de stabilité adressé en avril dernier par le gouvernement à la Commission européenne prévoit une diminution en volume de 0,5 point par an des dépenses des collectivités entre 2024 et 2027. « La situation financière favorable des collectivités doit avoir pour contrepartie une participation accrue de leur part à l’effort global de redressement des finances publiques », affirme-t-elle. Selon les magistrats financiers, l’encadrement de leurs dépenses doit donc faire partie du projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027 qui sera examiné cet automne au Parlement.

Philippe Pottiée-Sperry
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