Fonction publique : le conseil médical, mode d’emploi

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Fonction publique : le conseil médical, mode d’emploi

Fiche juridique réalisée par Caroline Verger-Giambelluco, avocate au cabinet Seban & Associés.

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Le conseil médical se substitue-t-il a d’autres instances ?
Oui. En vue d’une simplification et une rationalisation des instances médicales, une ordonnance n° 2020-1447 portant diverses mesures en matière de santé et de famille dans la fonction publique a créé une instance médicale unique, le conseil médical. Il intervient en lieu et place du comité médical et de la commission de réforme, instances jusqu’alors distinctes. Il s’agit là d’une résultante de l’article 40  de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 portant transformation de la fonction publique qui, pour mémoire, a habilité le  gouvernement à intervenir par ordonnance dans certains domaines et notamment pour « faciliter la prise en charge des personnels […] en simplifiant l'organisation et le fonctionnement des instances médicales et de la médecine agréée ainsi que des services de médecine de prévention et de médecine préventive, et en rationalisant leurs moyens d'action ».
Le conseil médical est, comme ses prédécesseurs, placé auprès du préfet, dans chaque département.

Les conseils médicaux sont-ils déjà entrés en vigueur ? 
Oui. L’ordonnance du 25 novembre 2020 précitée prévoyait en effet dans son article 2 que les nouvelles dispositions entreraient en vigueur le 1er février 2022. Les décrets d’application ont été adoptés avec du retard, le 11 mars 2022 pour les trois versants de la fonction publique mais des dispositions spécifiques sont intervenues pour gérer ce décalage. Notamment, le III de l’article 52 du décret n°2022-350 du 11 mars 2022 relatif aux conseils médicaux dans la fonction publique territoriale prévoit que les avis demandés aux comités médicaux et commissions de réforme avant la date d'entrée en vigueur du décret qui n'ont pas été rendus avant cette date sont valablement rendus par les conseils médicaux.

Quelle est leur composition ? 
La formation restreinte est composée de trois médecins titulaires et d’un ou plusieurs médecins suppléants désignés par le préfet pour une durée de trois ans renouvelable. Un médecin est désigné par le préfet parmi les médecins titulaires pour assurer la présidence du conseil médical. 
La formation plénière est un organe paritaire qui comprend les médecins statuant en formation restreinte, ainsi que deux représentants de l’administration et deux représentants du personnel qui disposent chacun de deux suppléants et dont le mode de désignation varie selon l’affiliation, ou non, de la collectivité au centre de gestion (article 4-1 du décret n°87-602 du 30 juillet 1987). L’article 52 I du décret n°2022-350 du 11 mars 2022 indique par ailleurs que les médecins agréés membres de comités médicaux et de commissions de réforme à la date de parution du décret siègent en tant que médecins membres des conseils médicaux pour la durée restante de leur mandat et, au plus tard, jusqu’au 30 juin 2022.  

Existe-t-il une ou plusieurs formations du conseil médical ? 
Le conseil médical comprend deux formations : une formation restreinte et une formation plénière. La formation du conseil médical varie selon le motif de saisine de cette instance. L’exercice de certaines garanties pour le fonctionnaire varie également suivant le type de formation. A titre d’exemple, l’agent pourrait être entendu seulement devant le conseil médical en formation plénière (article 7 II. du décret n°87-602 du 30 juillet 1987). 

Dans quel cas saisir le conseil médical ? 
Le conseil médical peut être à la fois saisi par l’agent, ou par l’administration. Le conseil médical en formation restreinte se prononce sur :
-l’octroi d’une première période de congé de longue maladie ou de longue durée ;
-la réintégration à l’expiration des droits à congé pour raison de santé ; 
-le reclassement dans un autre emploi à la suite de l’altération de l’état de santé du fonctionnaire, etc. 
Le conseil médical en formation plénière se prononce sur l’octroi d’une allocation temporaire d’invalidité, ou encore en cas d’accident survenu ou de maladie contractée en service, par exemple. En définitive, le conseil médical en formation restreinte reprend les attributions jusque-là dévolues aux comités médicaux, tandis que la formation plénière se substitue à la commission de réforme. 

Peut-on contester les avis rendus ? 
Tout dépend de la formation du conseil médical. Seuls les avis rendus par le conseil médical statuant en formation restreinte peuvent être contestés, à la fois par l’agent ou par l’administration, devant le conseil médical supérieur dans les deux mois suivant la notification de l’avis du conseil médical. La contestation s’effectue auprès du conseil médical concerné, qui la transmet au conseil médical supérieur, instance nationale placée auprès du ministre chargé de la santé, et qui en informe le fonctionnaire et l’administration. Le conseil médical supérieur dispose alors d’un délai de quatre mois pour confirmer ou infirmer l’avis du conseil médical. A défaut d’avis rendu dans ce délai, l’avis initial rendu par la formation restreinte est réputé confirmé. Le délai de quatre mois peut toutefois être suspendu si le conseil médical supérieur procède à une expertise médicale complémentaire.

Les avis sont-ils contraignants ? 
Non. A l’instar des avis précédemment rendus par les comités médicaux et les commissions de réforme, les avis rendus par le conseil médical et, le cas échéant, le conseil médical supérieur, ne lient pas l’administration. En revanche, à l’occasion de la contestation devant le juge d’une décision prise à la suite d’un tel avis, un agent peut invoquer les irrégularités procédurales dans le cadre de la consultation du conseil médical. 
A cet égard, sur la base de la jurisprudence Danthony (CE Ass., 23 décembre 2011, n°335033, publié au recueil Lebon), la juridiction administrative a cependant admis que certaines d’entre elles n’avaient pas vocation à entraîner l’illégalité d’une décision. A titre d’exemple, le Conseil d’Etat a récemment considéré que l’absence de médecin spécialiste au sein de la commission de réforme peut être « danthonysée » si les rapports d’expertises et certificats médicaux produits par un médecin spécialiste et versés au dossier suffisent à éclairer utilement les membres de la commission (CE, 27 décembre 2021, n° 439296, mentionné aux tables). 

Les textes récents contiennent-ils d’autres nouveautés que le conseil médical ? 
Tout d’abord, le gouvernement a entendu lutter contre la pénurie des médecins de prévention en supprimant la limite d’âge et le niveau d’expérience requis pour intégrer le contingent des médecins agréés dans la fonction publique (article 1 du décret n°86-44 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés). On note également un alignement avec le droit du travail en ce qui concerne la liste des congés de parentalité ainsi que leur durée, pour laquelle il est justement directement renvoyé au code du travail (article 11 de l’ordonnance n°2020-1447 du 25 novembre 2020). Bien plus, le terme de « médecin de prévention » est supprimé au profit de « médecin du travail ». 
Enfin, la procédure de reclassement à la suite d’une altération de l’état de santé du fonctionnaire permet aux agents de bénéficier d’un reclassement dans un autre versant de la fonction publique (avec toutefois le maintien d’une priorité dans leur administration d’origine) ainsi qu’une période de préparation au reclassement ouvrant droit à un an de traitement assimilé à un service effectif (article 2 modifié du décret n°85-1054 du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux).

Caroline Verger-Giambelluco, avocate au cabinet Seban & Associés

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