Covid-19 : 72% des agents publics se sont sentis utiles

Philippe Pottiée-Sperry
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La Casden, banque coopérative de la fonction publique, vient de réaliser avec l’institut BVA un sondage relatif à l’impact de la crise sanitaire sur les agents publics (1).

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Premier enseignement : un vécu différent de la crise selon les métiers exercés. 42% des agents déclarent avoir travaillé à distance tandis qu’un tiers a continué à se rendre sur son lieu de travail (34%). 13% étaient en autorisation spéciale d’absence (ASA) et 3% en arrêt pour garde d’enfant. Le télétravail induit par la crise a été perçu comme une expérience plutôt enrichissante par plus des deux tiers des agents concernés (70%). Alors que la crise a bouleversé le quotidien et les habitudes de chacun, 26% des agents publics estiment avoir été en première ligne. Cela est surtout vrai parmi les hospitaliers (56%) et ceux ayant continué à se rendre sur leur lieu de travail (50%).

Un soutien apprécié des collègues et de la population

La crise sanitaire a contribué à enrichir l’image que les agents ont d’eux-mêmes, lesquels ont été 73% à s’être sentis fiers de leur mission et 72% utiles. Toutefois, seuls 37% se sont sentis reconnus par la société et 31% valorisés. Les agents hospitaliers (FPH) sont les plus positifs sur leur ressenti. Le soutien est surtout venu des collègues (83%) et de leur hiérarchie (64%), ainsi que de la part de usagers (62%). Celui des institutions a été nettement moins ressenti, que ce soit de la part des élus locaux (37%) ou de l’Etat et du gouvernement (29%). Les applaudissements des Français chaque soir ont jugé réconfortants (54%) ou stimulants (49%).

Différences de vécu selon les fonctions publiques

Très présents sur leur lieu de travail, les agents de la FPH ont été ceux ayant le moins bien vécu la période (67% l’ont bien vécue contre 71% des agents de la FPE et 78% de ceux de la FPT). Ils ont aussi été 75% à affronter un manque de protection dans le cadre de leur travail (contre 66% pour l’ensemble des fonctionnaires) et 70% un manque de moyens.

Suite à ces événements, ils sont 69% à se dire pessimistes sur leur avenir en tant qu’agents de la fonction publique et 12% à vouloir se réorienter à la fin de la crise. Toutefois, les agents hospitaliers sont ceux qui ont trouvé le plus de réconfort symbolique durant la crise sanitaire : 87% se sont sentis utiles, 84% fiers de leur mission et 59% reconnus par la société. De même, 84% se sont sentis soutenus par le public avec qui ils ont été en contact. Enfin, 70% pensent que la crise sanitaire va améliorer à l’avenir l’image des fonctionnaires auprès des Français.

Plus de difficultés pour les jeunes agents

Concernant les enseignants, 87% ont travaillé à distance contre 42% pour l’ensemble des agents publics. Seulement 46% ont trouvé cela facile à mettre en oeuvre. Globalement, les enseignants se montrent moins positifs que la moyenne des agents publics. Ils sont ainsi 37% à avoir mal vécu la période. Sur des points plus précis, 77% affirment avoir manqué d’informations durant la crise, 68% ont manqué de moyens pour effectuer leur travail et 64% à avoir eu des difficultés à concilier vie privée et professionnelle dû au télétravail.

Quant aux agents les plus jeunes, s’ils ont été bien entourés par leurs collègues (90% des moins de 30 ans se sont sentis soutenus), ils ont tout de même connu des difficultés concrètes. Moins rodés que leurs aînés, 71% des moins de 40 ans ont souffert d’un manque d’informations et 52% ont eu des difficultés à gérer vie privée et professionnelle. 52% ont également souffert de la solitude ou de l’isolement et 31% ont même rencontré une baisse de leurs revenus. En résulte une conséquence psychologique majeure : ils sont moins nombreux que la moyenne à s’être sentis fiers de leur mission (68% contre 73%), utiles (65% contre 72%) ou reconnus par la société (28% contre 37%).

Les agents de la FPT plus optimistes sur l’avenir

Concernant l’avenir de la fonction publique (fonctionnement, conditions de travail), les agents publics sont partagés à parts égales entre optimistes et pessimistes (50% à chaque fois). Dans le détail, les plus optimistes sont ceux de la FPT (58%) et de la catégorie C (54%) tandis que ceux qui le sont le moins sont les agents de la FPH (31%), ceux qui estiment avoir été en première ligne (42%) ou les catégories A (44%).

Par ailleurs, les agents publics sont peu nombreux à penser que la période de la crise sanitaire permettra d’améliorer à l’avenir leurs conditions de travail (34%) ou le fonctionnement de la fonction publique (41%). Note positive pour finir, 90% des agents pensent continuer à travailler dans leur branche à l’issue de la crise.

Réaction au sondage : les leçons de la crise

Parmi les réactions au sondage de la Casden, Sigrid Berger, la présidente fondatrice de Profil Public, estime que « la crise remet le service public sur le devant de la scène et redonne un sentiment de fierté aux agents ». Et de citer le chiffre de plus de 90% d’agents publics qui pensent continuer à travailler dans ce secteur. Selon la CORDEE, association de promotion de la diversité sociale dans les secteurs public et parapublic, « les agents publics restent peu reconnus pour leur engagement ». Selon elle, « il y a urgence à tourner la page et à lancer un grand plan de reconnaissance et de valorisation des services publics ». De même, FP21 (Fonction Publique du 21ème Siècle), association pour les jeunes agents publics, pointe la mise en lumière par la crise « des inégalités – profondément injustifiées - de rémunération économique et symbolique entre les jeunes agents publics fondées sur des appartenances de genre ou encore leurs origines culturelles, géographiques et sociales ».

Pour sa part, Johan Theuret, président de l'ADRHGCT (Association des DRH de grandes collectivités territoriales), estime que l’enquête « met en avant des perspectives intéressantes comme l'importance des collectifs de travail, les apports du télétravail ou le besoin de sens lié à l'attachement aux valeurs du service public ». De son côté, Fabien Tastet, président de l’AATF (Association des administrateurs territoriaux de France) souligne « la mise en lumière de l’engagement des millions d’agents qui se sont mobilisés ». Selon le DGS de Grand Paris Sud Est Avenir, « le télétravail va aussi représenter une évolution majeure de nos rapports sociaux ». Et de plaider pour « réaliser un véritable retour d’expérience pour tirer les enseignements de cette gestion de crise. L’AATF s’y attelle actuellement avec ses partenaires, pour mieux penser, aux côtés des élus locaux, le monde territorial de demain. »

P.P.-S.

(1) Sondage réalisé du 14 au 18 mai 2020 auprès d’un échantillon représentatif de 1000 personnes âgées de 18 ans et plus.

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Philippe Pottiée-Sperry
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