Elections locales : statu quo pour la carte électorale
Le phénomène de prime aux sortants, observé au premier tour, s’est largement renforcé le 27 juin.
Avec 65,31%, selon le ministère de l'Intérieur, l’abstention est restée extrêmement élevée au second tour des élections régionales, ne reculant que d’un petit point en une semaine. Comme au premier tour, c’est le Grand Est qui a boudé le plus les urnes en avoisinant les 70% d’abstentionnistes. Cet effondrement de la participation des électeurs continue de poser beaucoup de questions et nécessitera de prendre certaines mesures mais lesquelles ? Autre leçon du scrutin : une grande stabilité politique avec tous les présidents de régions métropolitaines (cinq de gauche, sept de droite et un autonomiste en Corse) largement réélus alors que certains d’entre eux semblaient bien menacés ces dernières semaines.
Les deux grands perdants du scrutin sont le RN et la LREM. Le parti de Marine Le Pen n’atteint que 19% (-10 points de moins par rapport à 2015) et n’emporte aucune région ni département. Sans grande surprise, la LREM (avec ses alliés) n’aura réussi nulle part son implantation électorale en atteignant un résultat d’à peine 10% au niveau national.
Plus de mouvements en outre-mer
Il faut aller en outre-mer pour voir basculer des régions/on basculer : la Réunion passe ainsi à gauche. Huguette Bello, à la tête d’une liste d’union de gauche, l’emporte face au président sortant, Didier Robert (divers droite). Pour la collectivité territoriale de Guyane (issue de la fusion de la région et du département), la liste d’union avec à sa tête le député Gabriel Serville (divers gauche) a nettement remporté le scrutin au détriment du président sortant, Rodolphe Alexandre (divers gauche). Pour la Guadeloupe, le président sortant Ary Chalus (LREM) l’emporte largement et fait de cette région la seule remportée par le parti présidentiel lors de ce scrutin. S'agissant de la Martinique, le député Serge Letchimy (apparenté PS) l’emporte face au sortant Alfred Marie-Jeanne. Serge Letchimy a déjà été président de la région de 2010 à 2015, devenue ensuite collectivité unique.
Les sortants améliorent leurs scores de 2015
Dans la quasi-totalité des régions, les sortants gagnent de nombreux points par rapport à 2015, alors que le RN dégringole dans la plupart des cas. C’est l’Occitanie qui enregistre le meilleur score de tous les présidents de région avec 57,77 % pour Carole Delga (PS), confirmant ainsi largement sa dynamique du premier tour. Pour sa part, Alain Rousset (PS), élu pour la première fois en 1998, l’emporte donc pour un cinquième mandat. Les autres sortants PS sont également reconduits : François Bonneau (Centre-Val-de-Loire), Marie-Guite Dufay (Bourgogne-Franche-Comté). En Bretagne, le sortant Loïg Chesnais-Girard (PS) est sorti vainqueur à l’issue du second tour mais son score (29,8%) ne lui donne pas de majorité absolue (40 sièges sur 83), l’obligeant ainsi à nouer des alliances pour le troisième tour, c’est-à-dire l’élection du président le vendredi 2 juillet.
A droite, tous les présidents sortants sont également reconduits dans l'Hexagone : Laurent Wauquiez (Auvergne-Rhône-Alpes), Xavier Bertrand (Hauts-de-France), Valérie Pécresse (Ile-de-France), Hervé Morin (Normandie), Jean Rottner (Grand Est), Christelle Morançais (Pays de la Loire), Renaud Muselier (PACA). En Corse, le président du conseil exécutif, l’autonomiste Gilles Simeoni, l’emporte également (39,7%).
64 départements à droite sur 95
Concernant les élections départementales (65,64% d’abstention), pas de grand bouleversement en vue. La droite reste largement majoritaire (64 départements sur 95) et parvient à récupérer cinq départements à la gauche : Alpes-de-Haute-Provence (qui était à gauche depuis 1998), Ardèche, Finistère, Puy-de-Dôme et Val-de-Marne. Ce dernier est très symbolique sachant qu’il s’agissait du dernier département détenu depuis 1976 par les communistes. Dans l’autre sens, deux départements basculent de droite à gauche : Charente et Côtes d’Armor (tous deux perdus par la gauche en 2015). Deux situations restent indécises dans le Vaucluse et la Seine-Maritime où la majorité se jouera dans chacun d’entre eux par le choix d’un binôme « divers ». Réponse le jeudi 1er juillet lors de l’installation des conseils et de l’élection des présidents de départements.
Nouveaux dysfonctionnements pour distribuer les plis électoraux
Enfin, le feuilleton du premier tour avec de nombreux dysfonctionnements dans la distribution de la propagande électorale ne semble pas s’être amélioré pour le second tour. Ainsi, Adrexo, le prestataire décrié et chargé de la distribution des plis électoraux dans 51 départements, a admis avoir de nouveau rencontré « de nombreuses difficultés » dans cette distribution des professions de foi et des bulletins de vote des candidats encore en lice pour le second tour. La Poste avait pourtant repris la distribution de cinq millions de plis électoraux. Adrexo indique se tenir à la disposition du ministère de l'Intérieur « pour dresser le bilan de cette opération ». Par ailleurs, cette société doit être entendu le 29 juin par la commission des lois de l'Assemblée nationale sur le sujet des « dysfonctionnements ». Adrexo avait estimé à 9% le nombre de plis électoraux non acheminés pour le premier tour. Sur ce sujet, Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur, qui a été entendu le 23 juin par la commission des lois du Sénat, a souhaité que le législateur revienne sur la loi de 2005 régulant les activités postales. « Je suis d’accord pour que nous puissions considérer que la propagande électorale ne doit pas relever du système concurrentiel », a-t-il affirmé. Comme les dirigeants d’Adrexo et de La Poste, il doit également être entendu le 29 juin par la commission des lois de l’Assemblée nationale. Une affaire à suivre.
Philippe Pottiée-Sperry
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