Le programme « 1000 cafés » redonne vie aux petites communes
Dispositif figurant parmi les propositions de l’Agenda rural, le programme « 1000 cafés » bénéficie du soutien du gouvernement. Mis en œuvre par le groupe SOS, il concerne aujourd’hui plus de 100 communes et 1200 préparent leurs dossiers de lieux multi-services pour redynamiser la vie locale.
Organisation à but non-lucratif, le groupe SOS a lancé en septembre 2019 le programme « 1000 cafés » destinés aux près de 32 000 communes françaises de moins de 3500 habitants. Son objectif ? Rouvrir des cafés pour redonner des couleurs à ces villages où les commerces ont eu tendance ces dernières années à baisser le rideau. En août dernier, 51 cafés avaient été ouverts en l’espace de deux ans et 61 sont en cours d’ouverture. Au final, il devrait y en avoir près de 120 d’ici la fin de l’année. 1200 autres communes avancent aussi pour faire mûrir leur projet.
Sur le site de 1000 cafés, de belles histoires humaines se succèdent, comme à Chambœuf, village auvergnat de 1700 âmes, où le café s’est vite transformé en un lieu multiservices : on peut bien entendu venir y boire un verre mais aussi acheter son pain, s’y restaurer, trouver des produits locaux, des journaux… Chambœuf fait partie des 53% de communes rurales qui ne comptent plus un seul commerce.
20 000 € pour chaque création
En moyenne, chaque café nécessité un financement à hauteur de 20 000 € en moyenne. En sa qualité d’investisseur, le groupe SOS a débloqué plus de 800 000 € sur les 51 premiers cafés ouverts. Il est chargé d’assurer le recrutement du gérant des lieux, de fournir les fonds pour les équipements et les premiers stocks. Tout se fait en bonne intelligence avec le maire, généralement très impliqué, et qui a le dernier mot quant au choix du gérant.
« Il s’agit souvent d’un habitant du village. Ou de quelqu’un qui dispose d’une bonne expérience dans ce secteur. On ne s’improvise pas gérant de café », explique Laure Lézat du programme 1000 cafés. Le gérant dispose d’un statut de mandataire non-salarié. Percevant une rémunération sur la base d’un Smic, il est logé par la mairie et est intéressé aux résultats de l’entreprise.
Progression continue
Chloé Brillon, présidente de 1000 cafés, tire un premier bilan : « Le réseau de cafés grandit chaque mois. Semaine après semaine, notre équipe accompagne individuellement et par des sessions collectives les élus et les gérants dans l’ouverture puis l’exploitation des cafés. 100 cafés auront ainsi ouvert d’ici la fin de l’année ». Et d’ajouter : « Parallèlement, 70 établissements, qui existent depuis plusieurs années, ont fait également appel à notre expérience pour déployer leur activité. Notre communauté se renforce par cette agrégation unique d’apprentissages et d’expertises qui nous permet de contribuer, grâce à la mobilisation commune de la mairie, des gérants, des habitants et de notre équipe, au développement de la vie locale dans les communes rurales ».
A l’automne dernier, le groupe SOS a également décidé d’apporter son soutien aux cafés déjà existants mais fragilisés, entre autres, par la période de la crise sanitaire.
Prendre l’apéro et retirer son colis
« 1000 cafés » veille bien entendu à ce que les premiers pas se fassent dans les meilleures conditions. Au moindre souci, le gérant peut appeler l’association qui peut fournir une nouvelle aide financière, à l’instar d’un investisseur classique. L’opération suscite un réel engouement : 3300 gérant potentiels ont déposé leur candidature sur le site du programme. « Le choix se fait avec le maire et suivant le profil de la personne », explique-t-on à 1000 cafés. C’est ainsi que Sandra Brill est devenue, en avril 2021, la gérante du comptoir luttangeois, à Luttange (Moselle). Elle disposait il est vrai d’une certaine légitimité.
De nombreux services proposés
« Luttange est une commune de 900 habitants que je connais bien puisque j’y habite depuis dix ans », raconte Sandra Brill. Au fil du temps, les commerces ont rendu l’âme. Même la boulangerie a fini par fermer. « Ça ne tient à rien, ça peut aller très vite. J’ai entendu parler de cette opération et je me suis dit que c’était fait pour moi », raconte-t-elle. Pour garder de l’activité sur place, l’ancienne municipalité a décidé de réagir en rachetant puis en restaurant un ancien corps de ferme afin d’y accueillir des activités périscolaires. C’est dans une partie de ce bâtiment que le comptoir luttangeois a élu domicile.
« Il a fallu acheter le matériel, machine à café, vaisselle, mobilier… Une facture de 10 000 € environ, en comptant le stock de départ », explique Sandra Brill qui a embauché une personne. « Nous proposons plusieurs services, de la petite restauration, le journal local, le Relay colis, le dépôt de pain, un coin épicerie avec des produits locaux sans oublier la Française des Jeux. C’est un rythme assez intense », reconnaît-elle.
« J’ai ça dans le sang »
Le comptoir est ouvert de 7h à 14h30, 6 jours sur 7. Cela reprend à 17h avec une fermeture quand il n’y a plus de clients ! Avec sa licence IV, le comptoir propose cafés, apéritifs et autres boissons. « On sent bien que le village revit. Les habitants nous commandent des repas, d’autres viennent des villages alentours. 90 % de la clientèle sont des habitués », se réjouit Sandra Brill. Luttange revit, elle le sent bien. « Le café, c’est mieux que Facebook quand même », assure-t-elle en ne regrettant pas un instant d’avoir sauté sur l’occasion. Ses parents avaient déjà un café. Elle a longtemps travaillé en servir restauration dans le proche duché du Luxembourg. « J’ai ça dans le sang ». Mais elle doit s’interrompre : l’heure de l’apéro approche…