Décentralisation : l’AMIF prend le pouls des maires franciliens
L’AMIF (Association des maires d’Ile-de-France) a lancé, le 30 mars, une consultation (numérique) auprès de tous les maires franciliens (1268 communes dont 75% sont rurales). Objectif : « ouvrir le plus large dialogue afin de dessiner ce que pourrait être un véritable acte de décentralisation ».
Il s’agira de « faire remonter les demandes concrètes » des élus afin de produire un manifeste, remis à tous les candidats à la présidentielle de 2022, afin de peser dans la campagne. Selon Stéphane Beaudet, président de l’AMIF et maire d’Evry-Courcouronnes (91), « ce travail que nous lançons se situe dans le contexte d’un débat sur la décentralisation qui resurgit régulièrement, mais aussi dans le cadre d’une crise sanitaire qui a complètement replacé les collectivités au cœur de l’action, et à la veille d’une campagne électorale pré-présidentielle ».
Six débats thématiques en mai et juin
En pratique, la consultation se déroule durant le mois d’avril et ses résultats alimenteront six débats thématiques qui auront lieu en visio en mai et juin : la commune doit-elle rester à l'échelon de base ? ; le partenariat Etat/collectivités ; les besoins spécifiques d'investissement ; la situation polycentrique ; l'avenir institutionnel ; la décentralisation « à la carte ». La restitution de tout ce travail s’effectuera lors du salon de l’AMIF, qui doit se tenir les 31 juin et 1er juillet prochain. « Il sera question de notre rapport à l’intercommunalité, à la métropole et à la ville-centre, à une région qui se voulait à l’origine polycentrique. Mais aussi de la perte d’autonomie fiscale et financière des collectivités locales qui doivent dans le même temps faire face à un Etat qui est de moins en moins aménageur », explique Stéphane Beaudet.
« La consultation fera remonter les besoins et les attentes des maires franciliens. Cela donnera une photographie à un moment donné qui sera un outil utile même si nous ne serons pas d’accord sur tout », précise Jean-Philippe Dugoin-Clément, premier vice-président de l’AMIF en charge de la consultation et maire de Mennecy (91). Et d’ajouter : « particulièrement important pour l’AMIF, ce moment permettra de fédérer et rassembler, pour co-élaborer la vision que nous souhaitons porter. Sur un sujet tel que la décentralisation, les maires doivent se faire entendre largement ».
Différenciation territoriale
Cette réflexion collective visera aussi à sensibiliser l’ensemble des acteurs (économiques, sociaux, culturels...) sur les enjeux et les perspectives d’avenir de l’Ile-de-France. « Nous sommes une région un peu différente des autres avec toute une série de normes dérogatoires du droit commun, indique le maire de Mennecy. Nous sommes une région diverse entre Paris, sa zone dense et ses zones rurales qui pourrait justifier d’un régime d’exception ». Sur la même ligne, Bernard Rigault, maire de Moussy-le-Neuf (77) et vice-président de l’AMIF en charge de la ruralité, plaide pour « ne pas avoir les mêmes règles qui s’appliquent dans tous les territoires, il nous faut de la différenciation. On peut vivre en démocratie avec des règles régaliennes nationales mais pour ce qui est de la vie de tous les jours, il faut des règles différenciées selon les territoires ».
Autonomie fiscale des communes
Jacques JP Martin, vice-président de l’AMIF en charge de l’aménagement des territoires et maire de Nogent-sur-Marne (94), estime que la décentralisation c'est d'abord le débat et la démocratie locale. « Nos concitoyens veulent être propriétaires du devenir des collectivités dans lesquelles ils habitent », lance-t-il. Pour sa part, Patrice Leclerc, maire de Gennevilliers (92) et vice-président de l’AMIF en charge de la politique de la ville, souhaite que « les maires d’Ile-de-France demandent à l’Etat de publier un indicateur sur la localisation des dépenses du budget du plan de relance afin de vérifier que les crédits aillent bien là où il y en a le plus besoin ». Regrettant que l’Etat ait retiré aux communes « une grande partie de leur autonomie fiscale, ce qui est anti-décentralisation », il insiste sur l’importance d’agir en faveur des territoires fragilisés, « un enjeu majeur de la décentralisation en Ile-de-France ». Sur le sujet de la fiscalité, Stéphane Beaudet indique que plusieurs parlementaires appuient les revendications de l’AMIF, ce qui s’est notamment traduit par la mise en place avec eux d’un groupe de travail sur l’autonomie fiscale des communes.
Des propositions sur la Métropole du Grand Paris
Sur le sujet sensible de la gouvernance et de l’architecture de la Métropole du Grand Paris (MGP), sur lequel le gouvernement n’a toujours pas tranché, ce n’est apparemment pas le projet de loi « 4D » (différenciation, décentralisation, déconcentration et décomplexification) qui apportera une réponse. « Ce texte simplement technique, a minima, n’abordera pas les questions franciliennes, la ministre Jacqueline Gourault nous l’a indiqué, précise Jean-Philippe Dugoin-Clément. Il ne s’agira pas d’une loi structurelle et elle ne répondra pas à nos problématiques ». En conséquence, l’AMIF formulera ses propres propositions avec la volonté de peser dans le débat présidentiel. Pour sa part, Patrice Leclerc indique que « les élus métropolitains continuent de travailler sur l’avenir et la configuration de la MGP avec l’objectif de donner notre position au gouvernement dans le cadre de la campagne présidentielle ». Philippe Pottiée-Sperry
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