Décret sur la PSC : ce n’est pas encore gagné !
Compte tenu de la forte opposition des organisations syndicales, l’examen du décret sur le niveau minimal de participation des employeurs territoriaux à la protection sociale complémentaire (PSC), par le Conseil supérieur de la FPT (CSFPT), prévu initialement le 15 décembre, a été reporté au 20 janvier.
Une décision prise « à la demande du président du CSFPT et du gouvernement, pour permettre la poursuite des discussions avec les organisations syndicales », a indiqué un communiqué du CSFPT. Ce décret d’application de l’ordonnance du 17 février 2021 est très attendu pour commencer à y voir plus clair sur les contours de la future réforme de la PSC.
« Un dialogue social local renforcé »
Le président du CSFPT, Philippe Laurent, également porte-parole de la Coordination des employeurs territoriaux (AMF, ADF, Régions de France, AdCF, France Urbaine, Villes de France, APVF, AMRF, CNFPT, FNCDG, collège employeurs du CSFPT), a proposé un échange le 12 janvier entre employeurs et syndicats afin « de réenclencher une négociation et de fixer une méthode, en partageant les données disponibles ». Autre engagement pris : proposer à chaque membre de la coordination de disposer d’un mandat de négociation à cette occasion. Il a aussi insisté sur l’importance des négociations locales de la PSC. « Là où les organisations syndicales souhaitent faire d’un point d’arrivée le point de départ, les employeurs font le chemin inverse et tiennent à parvenir à ce même point d’arrivée par la négociation sociale locale. Des marges de progrès sont envisageables au sein même des collectivités avec un dialogue social local renforcé », a estimé Philippe Laurent. Et d’ajouter, en se voulant constructif : « Nous n’entrons pas dans un système figé, nous posons les jalons d’une politique durable fondée sur le dialogue permanent ».
Des « dispositions indigentes »
Ce discours n’est pas vraiment audible par les syndicats pour l’instant. En ligne de mire : un socle proposé par le décret jugé beaucoup trop bas et un manque de concertation avec eux. Le texte fixe la participation minimale par mois des employeurs territoriaux à 15 € pour la santé (50 % d’un montant de référence de 30 €) et à 5,42 € pour la prévoyance (20% d’un montant de référence de 27 €). Pour rappel, la participation obligatoire des employeurs pour la prévoyance entrera en vigueur le 1er janvier 2025 et pour la santé le 1er janvier 2026.
Tous les syndicats présents au bureau du CSFPT (CFDT, CGT, FA-FPT, FO, UNSA) ont dénoncé des « dispositions indigentes » qui sont « très en dessous des attentes et des besoins des agents ». Ils critiquent aussi le risque invalidité ouvert seulement pour un taux de 66% et la pension limitée à 80% du traitement net et 30% du régime indemnitaire. Plaidant pour améliorer les garanties minimales de la PSC, les syndicats affirment vouloir « un dialogue social nourri, avec l’ouverture de négociations, imposant un accord de méthode et un calendrier » et cela en prenant le temps nécessaire.
Demande d’un accord de méthode et d’un calendrier
Pascal Kessler, président de la FA-FP (Fédération autonome-Fonction publique), a regretté « qu’il y n’ait eu que deux ou trois réunions d’information mais pas de vraie concertation en tant que telle », lors d’un colloque en ligne organisé, le 15 décembre, par la MFP (Mutualité fonction publique) avec Acteurs Publics. A la même occasion, Pascale Fréry, vice-présidente de l’ADRHGCT (Association des DRH des grandes collectivités) et DGA « RH » de Grenoble, a également regretté « qu’on prenne autant de temps pour l’application de la réforme dans la FPT – 2025 et 2026 – alors qu’il s’agit de dispositions déjà en application dans le secteur privé ». Selon elle, elle aurait pu se mettre en place dès après les élections professionnelles de 2022.
Parmi les critiques des syndicats, la CGT insiste aussi pour obtenir des « garanties minimales d’un haut niveau afin de permettre plus d’harmonie entre les différentes tailles de collectivité », sachant que « la majorité des agents travaillent dans des collectivités de moins de 50 agents, dans lesquelles il n’y a pas de dialogue social hormis celui qui se tient dans les CDG ».
Déception des mutuelles
Les mutuelles jugent également insuffisants les montants proposés par le décret. Serge Brichet, le président de la MFP (Mutualité fonction publique), a pointé des « dispositifs notoirement insuffisants » lors du colloque du 15 décembre. De même, Eric Marazanoff, le président de la MNFCT (Mutuelle nationale des fonctionnaires des collectivités territoriales) juge les montants minimums « beaucoup trop bas » et les délais de la réforme dans la FPT très longs « alors qu’il y a urgence à agir ». En revanche, il se satisfait du maintien par la réforme de la PSC de la procédure de la labellisation de la convention de participation « à laquelle nous sommes viscéralement attachés ».
Pour sa part, tout en jugeant que la réforme « va dans le bon sens », Laurent Besozzi, vice-président de la MNT (Mutuelle nationale territoriale) et DGA de la région PACA, regrette des paniers moyens trop bas retenus dans le projet de décret. « Une participation de 5,40 € pour la prévoyance est très insuffisante avec le risque d’un renchérissement de l’offre auquel s’ajoute l’absence de révision possible du montant prévu par le décret », estime le territorial. Il rappelle que la participation actuelle facultative des collectivités varie de 10 à 14 €, soit près de trois fois plus.
Importance du risque prévoyance
Le vice-président de la MNT s’inquiète aussi du sujet de la prévoyance des retraités, en proposant avec d’autres mutuelles depuis déjà plusieurs années, la création d’une caisse de compensation. Il est rejoint ici par Pascale Fréry, estimant que le risque prévoyance est le risque numéro1 dans les collectivités, en rappelant que tout fonctionnaire en arrêt maladie au-delà de trois mois se retrouve en demi-traitement, « avec des situations terribles humainement ». Selon la vice-présidente de l’ADRHGCT, « beaucoup de collectivités, surtout chez les plus grandes, n’ont pas attendu les derniers textes pour s’engager bien au-delà des 5,40 € ».
« Le décret actuel est déconnecté de la réalité des risques supportés par les mutuelles dans le cadre de la prévoyance », regrette également Laurent Besozzi. Et d’ajouter : « On n’est pas du tout à la hauteur des enjeux de la prévoyance et de la santé qui étaient affichés dans l’ordonnance. Pour l’instant, nous sommes déçus tout en voulant croire en l’intelligence collective pour faire avancer les choses ». Réponse à partir du 12 janvier.
Philippe Pottiée-Sperry
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