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La réforme constitutionnelle va impacter les collectivités

Philippe Pottiée-Sperry
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Reportée de plus d’un an à cause de l’affaire Benalla, la réforme constitutionnelle, intitulée « Renouveau de la vie démocratique », a été présentée au conseil des ministres du 28 août. Le gouvernement souligne, qu’à l’issue du grand débat, est ressortie « une aspiration très forte à la participation citoyenne et à la proximité, avec la volonté de revitaliser notre démocratie en profondeur ».

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Défendue par Nicole Belloubet, la ministre de la Justice, cette réforme se compose d’un projet de loi constitutionnelle et de deux projets de loi organique et ordinaire, qui visent à modifier les institutions. Mais verra-t-elle vraiment le jour et quand, sachant que la ministre a réaffirmé que les textes ne seraient mis à l’ordre du jour du Parlement que si un accord global était trouvé avec le Sénat, qui reste très opposé à la réforme, en particulier au sujet de la réduction du nombre de parlementaires. Rappelons qu’un projet de loi organique nécessite, pour être adopté, une majorité des 3/5, députés et sénateurs confondus. Ce dont l'exécutif ne dispose pas.

Plus de participation citoyenne

Le projet de loi constitutionnelle s’articule autour de trois axes : la participation citoyenne, la proximité territoriale via une nouvelle étape de la décentralisation, le renforcement de l’indépendance de la justice. Le texte prévoit aussi d’inscrire à l’article premier de la Constitution que la République « favorise la préservation de l’environnement, de la diversité biologique et l’action contre les changements climatiques ».

La participation citoyenne serait facilitée par la mise en œuvre du service national universel, l’ouverture du champ du référendum d’initiative partagé (RIP) ou la création du Conseil de la participation citoyenne en remplacement du Conseil économique, social et environnemental.

Droit à la différenciation

Le projet de loi constitutionnelle veut donner plus de responsabilités aux territoires, en introduisant un droit à la différenciation entre collectivités territoriales autorisant certaines collectivités à exercer des compétences, dont ne disposent pas les autres de la même catégorie. Il permettrait aussi aux collectivités et à leurs groupements de déroger, lorsque la loi ou le règlement l’ont prévu, aux dispositions législatives ou règlementaires qui régissent l’exercice de leurs compétences. Le texte contient, en outre, des dispositions reconnaissant dans la Constitution les spécificités de la Corse, dans le respect du principe d’indivisibilité de la République. Enfin, une nouvelle procédure sera organisée pour permettre aux collectivités d’outre-mer de fixer, plus simplement, des règles applicables sur leur territoire dans certaines matières, sous le contrôle final du Parlement.

Réduction de 25% des parlementaires

Le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire visent à réduire de 25% le nombre des parlementaires (433 députés contre 577, 261 sénateurs contre 348), à améliorer la représentativité de l’Assemblée nationale (introduction d’une dose de 20 % de proportionnelle) et à instaurer la limitation du cumul des mandats dans le temps. L’entrée en vigueur de la réforme institutionnelle est prévue au prochain renouvellement de l’Assemblée (2022) et au prochain renouvellement du Sénat en septembre 2021. La réduction du nombre de parlementaires, prévue par le projet de loi organique, nécessitera de renouveler intégralement le Sénat en 2021, à titre exceptionnel, afin que la baisse des effectifs s’applique concomitamment aux deux séries. Les nouvelles délimitations de circonscriptions seront permises par le projet de loi ordinaire qui habilite le gouvernement à procéder par ordonnances, avec l’impératif d’avoir au moins un député et un sénateur par département. Les limites des circonscriptions législatives devront respecter l’intégrité des cantons à l’exception de ceux de plus de 60 000 habitants, et les limites communales devront être respectées dans les cantons dont le territoire n’est pas entièrement compris dans la même circonscription. En dehors de ce cas, aucun découpage de commune ne sera possible.

20% de députés élus à la proportionnelle

Le projet de loi ordinaire prévoit aussi une meilleure représentation de la diversité des sensibilités politiques à l’Assemblée nationale par l’élection de 20 % de son effectif (soit 87 députés) au scrutin de liste national à la représentation proportionnelle. Les autres députés resteront élus, comme aujourd’hui, au scrutin uninominal majoritaire à deux tours. Le scrutin proportionnel aura lieu le même jour que le premier tour du scrutin uninominal majoritaire, chaque électeur disposant pour voter de deux bulletins, le premier pour le député de sa circonscription, le second pour une liste nationale. Les professions de foi des listes seront dématérialisées, mais resteront consultables en mairie par voie d’affichage.

Limitation du cumul des mandats dans le temps

Par ailleurs, les deux projets de loi limitent le cumul des mandats dans le temps pour les parlementaires (députés, sénateurs, députés européens) et les détenteurs de fonctions exécutives locales, empêchant l’exercice d’un quatrième mandat successif. Objectif affiché : « éviter une excessive professionnalisation de la vie politique ». S’agissant des fonctions exécutives locales, les présidents des assemblées délibérantes des collectivités et les titulaires de fonctions exécutives des collectivités et des intercommunalités seront soumis à cette interdiction, à l’exception des maires des communes de moins de 9000 habitants et des titulaires de fonctions dans les établissements publics de moins de 25 000 habitants. Le gouvernement a fait ses calculs : cette mesure de limitation concernera 3 % des maires et 48 % des présidents d’intercommunalité. En pratique, elle se traduira dès à présent par la prise en compte du mandat ou de la fonction en cours dans le calcul des trois mandats ou fonctions complets et consécutifs. Philippe Pottiée-Sperry
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