Le projet de loi « Energie et Climat » jugé insuffisant

Philippe Pottiée-Sperry
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François de Rugy, ministre de la Transition écologique et solidaire, a présenté le 30 avril en conseil des ministres le projet de loi relatif à l’énergie et au climat. Son objectif : atteindre zéro émission nette de gaz à effet de serre d’ici à 2050.

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« Alors que la loi de transition énergétique prévoyait une division par quatre des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050, le gouvernement va plus loin avec l’objectif zéro émission nette à horizon 2050 », a déclaré François de Rugy.

Prévu en procédure accélérée (une seule lecture dans chaque chambre), le projet de loi « énergie-climat » qui contient juste huit articles doit être examiné le 24 juin à l’Assemblée nationale.

Stratégie bas carbone et programmation pluriannuelle de l’énergie

Baisse accélérée de la consommation d’énergies fossiles

Le projet de loi décline les orientations fixées par la Stratégie française pour l’énergie et le climat, avec notamment :-Une trajectoire ambitieuse pour décarboner le mix énergétique en accélérant la baisse de la consommation d’énergies fossiles à moins 40 % en 2030, au lieu des moins 30 % prévus dans la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015.-La fin de la production d’électricité à partir de charbon en France métropolitaine d’ici 2022, en mettant en place un cadre légal permettant d’entrainer la mise à l’arrêt des centrales à charbon et des mesures d’accompagnement spécifiques pour les salariés et sous-traitants de ces installations.-Des objectifs jugés « réalistes » pour transformer le modèle énergétique en portant le délai de la réduction à 50 % la part de nucléaire à 2035, au lieu de 2025 qui aurait nécessité de construire de nouvelles centrales au gaz, et aurait impliqué une hausse de nos émissions de gaz à effet de serre.

Faciliter le développement des énergies renouvelables

Le projet de loi prévoit également la création d’un Haut conseil pour le climat. Il sera chargé d’évaluer la bonne mise en œuvre des engagements : rattaché au Premier ministre, il sera indépendant, indique le texte, et doté de moyens spécifiques. Il devra évaluer si la stratégie bas carbone de la France est suffisante, alerter en cas de mise en œuvre insuffisante ou de décisions de l’État pas cohérentes avec les objectifs fixés, et recommander des actions pour redresser la trajectoire.Le haut conseil rendra son premier rapport d’ici fin juin : il viendra alimenter les travaux de la convention composée de 150 citoyens tirés au sort et dont la première saisine portera sur la transition écologique, ainsi que ceux du conseil de défense écologique qui réunira le Premier ministre, les principaux ministres concernés, et les grands opérateurs de l’État, conformément aux annonces d’Emmanuel Macron du 25 avril.Par ailleurs, le texte fixe des « leviers supplémentaires » pour faciliter le développement des énergies renouvelables. Il indique ainsi la révision tous les cinq ans de la stratégie nationale bas carbone avec des ajustements possibles à la réalité de l’évolution de émissions. Il est aussi prévu de simplifier les différentes procédures administratives afin d’accélérer le déploiement de projets d’énergies renouvelables, ou le renforcement de la lutte contre les fraudes aux certificats d’économie d’énergie pour rendre le dispositif encore plus efficace.

Actions dans les transports et le bâtiment

Les mesures prises dans le cadre de la PPE et de la SNBC concernent essentiellement les secteurs du bâtiment et des transports. Pour ce dernier, l’objectif est de mettre fin à la vente des voitures à essence ou diesel en 2040, et d’aider les Français à sortir de la dépendance au pétrole pour leurs déplacements (loi d’orientation des mobilités, prime à la conversion des véhicules, bonus écologique, soutien au covoiturage ou au développement de la pratique du vélo…). Dans le secteur du bâtiment, l’objectif est de rénover toutes les passoires thermiques d’ici 10 ans et de mettre en place des dispositifs de soutien aux personnes qui engagent des travaux de rénovation ou prévoient d’abandonner les chaudières au fioul d’ici 10 ans. Par ailleurs, le projet de loi prévoit un recours important aux ordonnances afin de transposer l’ensemble des textes européens du paquet « Une énergie propre pour tous les Européens ».

« Des objectifs lointains mais pas de moyens »

Les collectivités ne sont même pas citées dans le projet de loi. Aucune aide n’est prévue pour elles concernant leurs nombreux projets en faveur de la transition énergétique. Jugeant le texte « insuffisant », l’Association des petites villes de France (APVF) déplore « l’absence de réponse concrète à l’urgence climatique et l’absence de dispositions relatives au financement de la transition écologique dans ces territoires ». De la même façon, le réseau Cler pour la transition énergétique, qui regroupe notamment des collectivités et de nombreuses intercommunalités, regrette « des objectifs lointains mais pas de moyens ni de mesures concrètes à court terme ». Les ONG du Réseau Action Climat en appellent aux parlementaires pour « qu’ils donnent du contenu au texte ». Le Réseau Action Climat fédère 22 associations nationales (associations généralistes ou spécialisées sur les transports, l'énergie, la solidarité, etc.), dont le réseau Cler, Greenpeace ou France nature environnement, ainsi que 9 associations locales et régionales.

Les collectivités demandent une part des recettes de la fiscalité écologique

Dans un communiqué commun du 6 mai, de très nombreuses associations de collectivités (1) affirment attendre, suite au grand débat, « des moyens pour la transition écologique et le pouvoir d’achat des Français ». Et de constater : « En accompagnant la rénovation énergétique, le développement des énergies renouvelables ou le déploiement de modes de déplacements alternatifs, les collectivités agissent de nombreuses manières mais avec des moyens très limités, bien en deçà de l’ampleur des enjeux environnementaux et sociaux liés aux changements climatiques ». Regrettant ce manque de moyens, elles demandent « d’urgence l’affectation d’une part significative des recettes de la fiscalité écologique (contribution climat énergie, TGAP déchets) afin de mettre en œuvre des solutions opérationnelles dans tous les territoires en faveur de la transition écologique, pour la protection du climat et du pouvoir d’achat des Français ».
Philippe Pottiée-Sperry
(1) AMF, AdCF, APVF, ANPP, Villes de France, France urbaine, Régions de France, Amorce, AFCCRE, Fnau, Cercle national du recyclage, Flame, Rare.
Philippe Pottiée-Sperry
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