Publication de la loi simplifiant les expérimentations

Philippe Pottiée-Sperry
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Publiée au Journal officiel du 20 avril, la loi organique du 19 avril relative à la simplification des expérimentations, mises en œuvre sur le fondement du quatrième alinéa de l'article 72 de la Constitution, a été quelques jours plus tôt validée par le Conseil constitutionnel. Dans sa décision du 15 avril, celui-ci estime notamment que ce texte ne déroge pas au principe d'égalité devant la loi.

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Le texte, adopté dans les mêmes termes par l’Assemblée nationale et le Sénat (sans donc devoir passer par une commission mixte paritaire), consacre le droit à la différenciation territoriale. Les collectivités locales pourront appliquer, dans un cadre expérimental puis, dans certaines conditions, de façon pérenne, des règles relatives à l'exercice de leurs compétences différentes pour tenir compte de leurs spécificités. A noter que le Sénat a fait préciser dans le texte que la pérennisation d'une expérimentation sur une partie seulement du territoire doit se faire « dans le respect du principe d’égalité ». Il a également conservé la mention explicite de la possibilité d’abandonner une expérimentation, et renforcé les moyens du Parlement pour évaluer les expérimentations. Le gouvernement devra lui remettre des rapports annuels sur les collectivités volontaires. Pour chaque expérimentation en cours, une évaluation à mi-parcours aura lieu en plus de l'évaluation finale.

Seulement quatre expérimentations déjà menées

Créé par la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 sur l'organisation décentralisée de la République, l'article 72 de la Constitution permet aux collectivités ou à leurs groupements de déroger, à titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions sur l'exercice de leurs compétences. La loi organique vise tout d’abord à simplifier le recours à ces expérimentations locales, jusqu’alors très encadrées, notamment en devant être autorisées par un décret en Conseil d'État. Pour preuve, seules quatre expérimentations ont été menées depuis cette date, dont trois ont été généralisées (RSA, tarification sociale de l'eau et accès à l'apprentissage jusqu'à 30 ans). Au lieu d'une procédure comptant de nombreuses étapes, toute collectivité entrant dans le champ d'application de l'expérimentation pourra décider par délibération motivée d'y participer, sous le contrôle du préfet. La souplesse existera aussi avec un contrôle de légalité allégé, réduisant le délai moyen d’entrée dans l’expérimentation d’un an actuellement à deux mois.

Fin de l’alternative « généralisation ou abandon »

Second pilier de la loi : assurer une évaluation plus pertinente des expérimentations. Des rapports d’évaluations et de recensements seront ainsi effectués régulièrement. De plus, il est prévu de nouvelles issues au terme des expérimentations locales. La loi permettra de sortir de l’alternative binaire entre la généralisation ou l’abandon. Différentes options seront désormais possibles à l’issue de l’expérimentation lui permettant notamment d’être pérennisée seulement sur certains territoires ou d’être étendue à d'autres collectivités. Autre souplesse prévue : la loi pourra également modifier les dispositions régissant l'exercice de la compétence ayant fait l'objet de l'expérimentation.

« A travers cette loi organique, notre souhait est de rendre les expérimentations plus simples d’accès et plus attractives, en réduisant les obstacles dans leurs démarches. Il était donc de notre responsabilité de les rendre plus flexible afin d’encourager les collectivités dans leurs engagements locaux », a déclaré Jacqueline Gourault, la ministre de la Cohésion des Territoires, durant la discussion parlementaire.

Des « guichets permanents » auprès des préfets

Pour s’assurer de l’effectivité des futures expérimentations, des « guichets permanents » seront installés auprès des préfets pour mieux accompagner les collectivités et favoriser ainsi leurs initiatives. La DGCL (Direction générale des collectivités locales) centralisera ces demandes et déterminera, avec les autres ministères, leur faisabilité. La loi « Expérimentations » se veut une première étape vers la future loi « 4D » (décentralisation, différenciation, déconcentration et décomplexification). Présenté normalement au conseil des ministres le 12 mai avec une discussion prévue au Sénat en juillet, ce texte devrait lister certaines expérimentations comme par exemple la recentralisation du RSA par des départements volontaires. De plus, elle proposerait d’autres outils visant le même objectif comme par exemple le transfert de compétences aux seules collectivités volontaires, un pouvoir réglementaire local renforcé ou des mesures de déconcentration spécifiques.

Philippe Pottiée-Sperry

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