Réforme du ZAN : les maires défendent une méthode alternative
L’AMF a présenté vingt propositions pour simplifier et surmonter les difficultés du ZAN. Un travail se voulant en complémentarité de celui du Sénat. Début décembre, l’AMRF a voulu aussi faire entendre sa voix en dénonçant « une méthode inacceptable » et en formulant une série de recommandations.
Le même jour que la présentation de la proposition de loi sénatoriale visant à faciliter la mise en oeuvre des objectifs du ZAN (zéro artificialisation nette), le 14 décembre, l’AMF dans une démarche concertée avec le Sénat, a formulé vingt propositions pour simplifier et surmonter les difficultés du ZAN. Objectif : conforter la mobilisation des élus locaux pour faire bouger les choses sur ce sujet au centre de leurs inquiétudes. L’AMF salue le travail de la mission sénatoriale et la proposition de loi qui en a découlé, en souhaitant les compléter par ses propres propositions.
« Insécurité juridique pour les collectivités »
L’association rappelle qu’elle n’a cessé d’alerter sur le sujet, ayant même engagé une action devant le Conseil d’Etat pour attaquer les décrets d’application de la loi « Climat » d’août 2021 les estimant contraires à des dispositions de cette loi et au motif qu’ils créent « une insécurité juridique pour les collectivités ».
« Outre les délais intenables fixés par la loi, le flou juridique autour du ZAN va générer un contentieux important et nous empêcher d’atteindre les objectifs de maîtrise de l’artificialisation des sols, auxquels les maires souscrivent pourtant avec la volonté de pouvoir agir de façon pragmatique », estime le président de l’AMF, David Lisnard. Il appelle donc à clarifier le dispositif, tout en évitant la tutelle d’une collectivité sur une autre.
Vingt propositions de l’AMF
Bien que le gouvernement ait reconnu l’imperfection du dispositif, et malgré les engagements affichés, aucune initiative n’a été engagée, « malgré l’urgence au vu des échéances légales », alerte l’AMF. Jugeant que « cette situation ne peut durer, alors que les délais fixés par la loi continuent de courir », l’association a formulé vingt propositions qui visent à surmonter ces difficultés.
Ces propositions visent à mesurer l’artificialisation des sols, planifier la mise en œuvre du ZAN, articuler le ZAN avec les autres objectifs de politiques publiques tels que le développement rural et la réindustrialisation, et répondre aux besoins d’ingénierie des communes. L’AMF se dit « à la disposition du gouvernement et du Parlement pour travailler à l’évolution du dispositif ».
Planifier le ZAN
Dans le détail, elle demande de réviser le décret du 29 avril 2022 relatif aux Sraddet pour réaffirmer le rapport juridique de prise en compte (et non de mise en compatibilité) de l’objectif ZAN. Révision réclamée également de ce décret pour imposer la prise en compte des efforts passés dans les critères de territorialisation à l’échelle régionale.
Autres propositions : augmenter d’un an les délais prévus par la loi de révision des Sraddet, des Scot, des PLU et des cartes communales, pérenniser les conférences régionales des Scot comme instance de concertation locale sur le ZAN, en lien avec la région, et instaurer un élargissement de leur composition aux communes et EPCI, en accord avec les associations d’élus. L’AMF plaide également pour adapter les procédures d’autorisation des sols et d’appropriation foncière pour mieux maîtriser les projets pendant la période intermédiaire.
Mieux articuler le ZAN avec les autres objectifs
Par ailleurs, l’AMF prône une meilleure articulation du ZAN
-avec les autres objectifs de politique publique,
-avec les politiques de développement rural (autoriser les dérogations en ZRR),
-avec les besoins d’infrastructure et de réindustrialisation (sortir du calcul des 50% au niveau national et du ZAN à 2050),
-avec les projets d’intérêt général (faire remonter au niveau régional les projets d’intérêt public régional et local),
-avec le soutien à l’agriculture (permettre le changement de destination des bâtiments agricoles),
-avec les servitudes de recul du trait de côte et les impératifs de relocalisation.
Sentiments d’injustice des élus
Quelques jours plus tôt, l’AMRF (Association des maires ruraux de France) avait également présenté ses propres propositions. Dénonçant une « méthode inacceptable et inefficace » et la réduction des élus « au statut de simples exécutants », l’AMRF insiste sur les sentiments d’injustice et de colère des élus de son réseau face à « des textes qui entérinent un déséquilibre territorial au lieu d’y remédier ».
L’association a donc décidé de lancer une grande mobilisation des élus ruraux pour proposer une méthode alternative. Elle demande aussi une révision des décrets d’application de la loi « Climat » et des consignes données aux régions et aux services de l’État. Plaidant pour « un aménagement équilibré du territoire », elle demande l’inscription de la notion d’« espace » dans la Constitution ou encore de doter les territoires ruraux de moyens financiers et d’ingénierie.
Satisfaite des annonces de révision des décrets d’application, elle appelle à « une réelle concertation » et la traduction au bénéfice des maires de la « garantie rurale » des communes dites vertueuses.
Niet au « droit de tirage illimité des territoires urbains »
L’AMRF demande également :
- l’instauration d’une concertation régionale sur l’aménagement équilibrée du territoire,
-des moyens alloués aux politiques de sobriété foncière des communes rurales,
-la réécriture du décret « Sraddet » pour que la déclinaison territoriale des objectifs de sobriété foncière prenne en compte les efforts réalisés,
-le retrait, dans le décompte régional, de l’artificialisation induite par un projet d’envergure nationale afin de ne pas impacter le solde d’artificialisation d’un territoire dont les administrés ne seraient pas majoritairement bénéficiaires de ce projet,
-le retrait par les services de l’État de leur proposition de politique de contractualisation vertueuse qui offre un droit de tirage illimité aux métropoles et territoires urbains, ces derniers disposant de l'ingénierie nécessaire pour justifier localement du caractère d’intérêt majeur de chaque projet.